Les parcours ayant été présentés au cours du mois d’octobre, de nombreux suiveurs ont considéré que le coureur d’AG2R – La Mondiale devait rempiler pour une année supplémentaire en visant prioritairement la Grande Boucle.

Romain Bardet, jusqu’en 2017 et dans une moindre mesure en 2018 a vécu une belle histoire avec le Tour de France : ses 5ères participations l’ont vu progresser au point qu’en 2017 son bilan faisait état d’une 3ème et surtout 2ème place. Il pouvait se dire qu’avec des circonstances de course favorables et un parcours correspondant à ses qualités, il pouvait viser la plus haute marche.

Sauf que pour parvenir à sa 2ème place, il avait déjà bénéficié d’une étape en particulier – celle de Saint Gervais – durant laquelle tout était réuni : une forme exceptionnelle, une échappée avec un coéquipier à l’avant, une météo pluvieuse ayant mis Chris Froome à terre et l’obligeant à effectuer la dernière montée avec le vélo de Geraint Thomas ! L’année suivante, il n’a pas été véritablement capable de faire la différence en montagne, excepté sur sa victoire à Peyragudes où Froome avait été victime d’une défaillance aussi tardive qu’inattendue.

Pour le reste, lorsque le bilan est fait, de façon froide mais objective, sur le Tour, Romain Bardet se bat pour grappiller quelques secondes en montagne après avoir perdu des minutes pleines sur le Contre La Montre. Qu’il soit individuel ou par équipes. Dans ces conditions, il apparait difficile de le voir se battre pour le maillot jaune. A la différence d’un Thibaut Pinot, capable de limiter les dégâts sur l’effort solitaire et ayant lâché à plusieurs reprises le futur vainqueur Egan Bernal en 2019.

Quoi qu’il en soit, sur les 2 dernières éditions du Tour de France, le coureur français de Brioude a marqué le pas. Légèrement moins performant en 2018 puis fatigué en 2019, il a souhaité dès le début de l’automne marquer une vraie rupture en explorant le calendrier italien qui lui avait si bien réussi sur les Strade Bianche 2018, 2ème place à la clé. On sait que l’homme marche au moral et à l’histoire du Cyclisme, qu’il aime les courses de mouvement plutôt que celle où il doit suivre et se battre à la pédale. Ces caractéristiques là semblent véritablement vouloir mettre le Giro au cœur de son programme plutôt que le Tour qui se joue globalement lors de la dernière ascension en montagne après un tempo dicté par l’équipe Sky-Ineos.

nullRomain Bardet en CLM, un exercice qu’il affectionne peu | © Sirotti

Une inversion des difficultés 

Mais voilà que les présentations respectives du Tour puis du Giro ont forcément mis le doute dans l’esprit de Romain Bardet et de son encadrement. En effet, sur le papier et depuis 2013 année de sa 1ère participation, jamais un parcours n’aura été plus favorable à ses qualités que celui du Tour 2020 : des étapes de montagne dès le 2ème jour et très régulièrement tout au long des 3500 km mettant en jeu les qualités de récupération, des arrivés pentues et surtout des (un !) Contre La Montre réduits à la portion la plus congrue.

Hasard du calendrier, le Giro qui proposait jusqu’à présent un parcours jugé comme le plus explosif des 3 Grands Tours, semble avoir édulcoré ses reliefs au point que les organisateurs eux-mêmes ont bien expliqué que le Giro 2020 serait une édition moins difficile que les précédentes.

Sur le papier toujours, pour résumer Romain Bardet trouverait en France un terrain plus adapté qu’en Italie.

Devrait-il changer ses plans pour autant ?

nullLe parcours du Tour d’Italie 2020 dans son ensemble | © Giro d’Italia

Le Giro reste attractif

Le palmarès de Romain Bardet reste pour le moment bloqué à 7 victoires et sa dernière en date remonte au début de la saison 2018 sur la Classic de l’Ardèche. A 29 ans (le 09 novembre), il lui reste à ajouter des lignes un peu partout sur le calendrier internationl. Le Tour d’Italie en fait partie et étant donné son profil de coureur, il lui sera probablement plus facile d’y briller sans compter que la concurrence est traditionnellement moindre. Si Ineos pourrait aligner Carapaz afin de défendre son titre sous ses nouvelles couleurs, les autres prétendants ne sont pas encore connus de façon certaine. Jumbo-Visma pourrait se montrer redoutable, que ce soit avec Tom Dumoulin, Primoz Roglic ou Steven Kruijswijk (qui retrouverait alors le col d’Agnel et notamment sa descente, un passage qui lui avait entrainé sa perte du maillot rose).

Mais il devrait rester de la place à Romain Bardet pour s’exprimer, probablement plus que sur le Tour où l’édition 2019 a montré que la concurrence semble s’être resserrée derrière l’équipe Ineos.

Et surtout, si le Giro 2020 n’aura pas d’équivalent à l’arrivée au col de la Loze, la 3ème semaine permettra aux coureurs de se départager sur un terrain qui restera très exigeant avec notamment le Stelvio et surtout l’étape reine dont l’arrivée sera jugée à Sestrières par delà les pentes terribles du col d’Agnel puis une incursion en France avec le col d’Izoard, le col de Montgenèvre avant l’arrivée dans la station de Sestrières.

Par Olivier Dulaurent