Son regard est d’autant plus intéressant voire exotique puisque du haut de ses 51 ans, il a 30 ans d’expérience en tant que mécanicien pro. Nous savons qu’Education First Pro Cycling se distingue par exemple par le côté cosmopolite des coureurs constituant l’équipe. Mais du côté du staff en général et des mécaniciens en particulier, le « bilan » est également très bon, ce qui amène forcément une ambiance différente des équipes franco-françaises.

 

Comment cela se répartit votre travail en intersaison ?

– Le calendrier est déjà fixé en décembre, mais tout de suite avec pas mal de travail en amont : préparation des vélos, collage des boyaux et préparation des camions, ce qui représente un gros travail.

 

Vous étiez dans l’univers Mavic, combien de temps chez Education First Pro Cycling ?

– C’est la 4ème année avec Education First Pro Cycling. Auparavant, j’ai quitté Mavic en 2013 après avoir travaillé pour eux pendant 8 ans au sein du Service Course (une très belle expérience d’ailleurs au niveau de la chaussure sur mesure) puis j’ai créé ma propre société. J’ai commencé dans cette équipe comme vacataire avec 100 jours avant d’être employé à plein temps depuis 3 ans.

Le contrat de travail s’étale sur 1 ou 2 ans chez EF. Chaque année, il y a donc une vraie remise en question. Le CDI n’existe pas vraiment. Cela explique peut-être que nous ne sommes que 4 mécanos français à travailler à l’étranger avec un autre mécano chez Deceuninck Quick Step ainsi que chez Astana et enfin un 4ème chez Trek Segafredo.

 

Est-ce que cela rend la situation compliquée quand on va voir le banquier ?

– Oui, j’ai connu cette période. Mais dans la même banque depuis plusieurs années, cela pose moins de soucis.

 

EF03Frédéric Bassy | © Vélo 101

 

Et les vacances dans tout ça ?

– Alors cette année, j’ai eu 5 semaines pleines de vacances. Octobre est le mois de remise en état (chaine, guidoline, etc.) des vélos pour la vente. Nous enlevons les capteurs de puissance. Suite à cela, sur le mois de novembre et en débordant un peu, j’ai pris de bonnes vacances.

 

Quand les calendriers vont sur des Championnats internationaux, vous intervenez pour l’équipe ou bien ce sont des mécanos dédiés ?

– Ce sont bien les équipes nationales et leurs mécanos qui sont présents mais à la demande des coureurs, les mécanos d’équipe interviennent parfois, ce qui ne s’est pas produit pour moi cette année.

 

Nous voyons un partenariat fidèle de l’équipe avec Cannondale. Cela rend les intersaisons plus faciles ?

– Nous avons beaucoup de chance cette année d’avoir reçu les cadres dès la fin décembre, ce qui nous a permis de monter 140 vélos en janvier. Et cette année, pour la 1ère fois en 30 ans nous avons reçu les groupes à temps, avec Shimano ici. Nous avons pu tout faire d’un seul coup.

2020 se présente donc sous un meilleur angle. Habituellement, nous avons un manque de selles, de tiges de selle ou de cintres. Cela demande 90 jours de délai qui peut être réduit si l’on pioche dans les pièces destinées à la vente au grand public.

 

Combien de nationalités avez-vous chez les mécanos de l’équipe ?

– Si je compte bien, 2 Portugais, un Sud-Africain, un Australien, un Allemand, un Espagnol, un Italien, un Anglais.

 

Et vous, à titre personnel, vous êtes susceptibles de dialoguer en combien de langues ?

– On va dire en 4 langues. L’anglais bien sûr langue officielle, en Français même si Pierre Roland n’est plus là, en Italien puisque je me débrouille (je parle ainsi avec Alberto Bettiol) et enfin en Espagnol.

 

Le 1er stage est le stage administratif qui permet de poser les bases de la saison à venir. En ce qui vous concerne, est-ce le moment où vous émettez vos préférences, en fonction des besoins par exemple ?

– Il s’agit bien de cela, d’une part en fonction de nos(mes) besoins et l’on peut également faire des demandes comme dans mon cas où j’ai demandé à ne pas faire le Tour de France parce que j’en ai déjà fait 26 et il y a une grosse pression sur cet événement. Je laisse ma place aux jeunes et serai au Tour de Pologne à peu près à la même période.

Le manager, sachant que j’aime bien voyager m’envoie souvent loin. Comme par exemple sur le Tour de l’Utah, une très belle course et un très bel endroit. Est également prévu à mon programme le Tour de Chine à la fin de l’année. Sur ces destinations, selon le planning et en fonction du feu vert du manager nous pouvons avoir un peu de temps avant ou après (2-3 jours) pour visiter les régions et en profiter.

 

EF02Frédéric Bassy | © Vélo 101

 

Vous conseilleriez aux lecteurs de Vélo 101 d’acheter un vélo de l’équipe en fin d’année ?

– Pour les vélos de galerie, il n’y évidemment pas de problème. Mais les vélos de course ne font que 60 jours de course dans l’année. Il faut savoir que les coureurs ont ainsi 4 vélos à l’année et donc chacun d’eux roule finalement peu. Je pense que ce sont donc de très bonnes occasions. Même le prix est intéressant, autour de 3500€ au lieu de 7000-8000€ environ.

 

Quel est le coureur le plus méticuleux que vous avez côtoyé ?

– C’est Ryder Hesjedal dans le passé mais il a pris sa retraite.

Sebastian Langeveld aujourd’hui. D’ailleurs, il est surnommé Mister Five car il a toujours la clé allen de 5 pour régler ses poignées et je dirais que c’est tous les jours.

Sep Vanmarcke également, mais uniquement pour le réglage du nez de la selle.

Mais dans l’ensemble, les coureurs sont très sympas, ils s’adaptent très bien. Bien sûr pour les nouveaux coureurs il y a toujours des ajustements lorsqu’ils doivent rouler sur du nouveau matériel comme par exemple la selle, qui est un poste très important. Nous essayons de régler cette question de la selle au mois de Janvier pour que tous les 5-6 vélos soient concernés d’un seul coup et ne plus y revenir par la suite.

 

Avez-vous eu d’autres soucis d’adaptation en ce qui concerne le nouveau matériel, nous pensons aux disques bien évidemment ?

– Oui, les disques il y a eu un peu de réticence au départ mais finalement tout le monde est content de rouler avec. Même le poids n’est plus un souci. Comme le vélo d’Alberto Bettiol que nous avons à côté, pesé à 6,9 kg avec des jantes de 50 mm de haut.

 

Vous voyez une évolution encore arriver ?

– En CLM, nous roulons sur du Tubeless et je vois arriver cela sur les courses en ligne avec un gain de résistance au roulement de 25-30w. Pas en montagne forcément car les roues sont un peu plus lourdes qu’avec les boyaux.

Également, par rapport à la résistance à la crevaison. Sur Paris-Roubaix il est prévu que nous roulions en Tubeless, en section de 30 mm avec des enveloppes fabriquées spécialement par Vittoria.

 

Si l’on fait un bilan annuel, cela vous fait combien de kilomètres et de pays visités ?

– Je dirais 30000 km, 3-4 pays visités. 200 jours de travail.

Mais il faut savoir qu’un Grand Tour, c’est déjà entre 8000 et 10000 km.