Médaillé de bronze les deux années passées (une crevaison dans la première partie de la course l’avait empêché d’obtenir la médaille d’argent l’année dernière alors qu’il semblait avoir les jambes pour), l’Allemand Tony Martin est donc arrivé sur la plus haute marche du podium du Championnat du Monde du chrono. A 26 ans, celui qui s’était déjà annoncé tout au long de l’année comme le meilleur rouleur du monde, vainqueur notamment des exercices chronométrés des Tour de France et d’Espagne, a confirmé son énorme potentiel en donnant une raclée à ses adversaires. Il les a atomisés après la mi-course, en atteste ce chiffre éloquent. Le quadruple tenant du titre Fabian Cancellara, qui avait bouclé le premier tour en 19 secondes de plus que Tony Martin, a cédé 62 secondes dans la seconde boucle de 23,2 kilomètres !

Tony, vous restiez sur deux médailles de bronze lors des derniers Championnats du Monde contre-la-montre, vous paraissiez très concentré dès le départ, comme si c’était votre jour. Comment vous sentiez-vous exactement ?
Pour moi, la chose la plus importante est de prendre un bon départ et de trouver rapidement un bon rythme. Aujourd’hui, après un ou deux kilomètres, je sentais déjà que j’étais très rapide, que ma position était très bonne et que mes jambes répondaient. Tout se passait parfaitement et une fois passé au premier pointage intermédiaire, j’étais déjà très confiant car je savais que je n’avais qu’à continuer comme cela. Je sentais que c’était vraiment mon jour et ma course. C’était vraiment une journée parfaite pour de bout en bout.

Qu’est-ce qui a fait la différence entre votre performance d’aujourd’hui et celles des deux précédents éditions, que vous aviez finies troisième ?
Je pense qu’il y a plusieurs éléments qui ont fait la différence. D’abord je me sens beaucoup plus fort mentalement. Je sais maintenant parfaitement comment gérer un contre-la-montre, comment trouver mon rythme et rester très rapide sur l’ensemble de l’effort. J’ai appris aussi à gérer la pression. De plus, je pense avoir trouvé cette année la formule parfaite pour préparer les Mondiaux, en participant à la Vuelta et en remportant le contre-la-montre de cette épreuve. C’était la première fois que je me préparais de la sorte à cette échéance et je pense que ça a porté ses fruits. J’arrivais ici à Copenhague avec de très bonnes jambes et j’étais très confiant. Je pense que c’est finalement le meilleur moyen de se préparer pour les Championnats du Monde et je rééditerai certainement cela les années à venir.

Etiez-vous au courant de votre performance tout au long de la course ? A quel moment avez-vous su que vous seriez champion du monde ?
Je courais avec une radio. J’étais donc au courant des temps de passage officiels et j’avais aussi des références qui m’étaient données par les membres de l’équipe nationale d’Allemagne. Pour être honnête j’ai su que je serais champion du monde à trois ou quatre kilomètres de l’arrivée. J’avais alors 50 secondes d’avance sur Cancellara et j’étais encore assez frais. Je savais que je pouvais continuer à ce rythme jusqu’à l’arrivée. J’étais donc vraiment confiant sur la fin de course.

Vous êtes l’adversaire principal de Fabian Cancellara depuis plusieurs années, est-ce quelque chose de spécial pour vous de lui prendre le maillot arc-en-ciel ?
Cela fait quelques années maintenant que ce n’est pas uniquement une lutte entre moi et Fabian Cancellara. Il y a d’autres coureurs qui réalisent de très bonnes performances contre-la-montre comme Bradley Wiggins ou David Millar. Ils sont nombreux à avoir été compétitifs ces dernières années et il ne faut pas réduire la lutte à Fabian et moi. Aujourd’hui je suis juste heureux d’avoir le maillot de champion du monde, quel que soit le coureur à qui je le prends, même si je suis un peu désolé pour Fabian. Je sais qu’il avait beaucoup de pression sur les épaules, mais pour avoir été à sa place les deux dernières années je sais que la troisième place est également un très bon résultat. Il doit quand même être heureux aujourd’hui, je le suis aussi. L’année prochaine nous nous affronterons à nouveau et peut-être que cette fois-ci la course tournera en sa faveur. C’est la course. Mais dans tous les cas aujourd’hui est un jour heureux pour nous deux.

Propos recueillis par Sylvain Chanzy à Copenhague le 21 septembre 2011.