Jamais le record du monde de l’Heure n’avait connu un tel engouement. Huit tentatives en l’espace de neuf mois, ou l’effet d’une modernisation du règlement autorisant le recours aux plus belles technologies cyclistes quand seule l’utilisation d’un vélo de route classique était autorisée depuis l’an 2000. Mais qu’on ne s’y trompe pas, si tant de challengers se sont présentés au départ de l’heure de course la plus dure de toute leur carrière ces neuf derniers mois, c’est que les redoutables spécialistes de l’effort solitaire n’étaient pas encore entrés en piste. On avait bien senti la pression monter d’un cran depuis la nouvelle marque fixée le 18 septembre dernier par Jens Voigt (51,115 km), battue trois fois depuis par Matthias Brändle (51,852 km), Rohan Dennis (52,491 km) et Alex Dowsett (52,937 km) le mois dernier à Manchester.

C’est cette marque que devait ce soir améliorer Bradley Wiggins, premier d’un trio magique auquel appartiennent Tony Martin et Fabian Cancellara à se frotter au record du monde de l’Heure. Evidemment, tout portait à croire que l’ancien vainqueur du Tour de France, champion olympique et du monde du contre-la-montre en titre, irait inscrire son nom sur les tablettes. Seule la distance parcourue par l’Anglais sur la piste du Valley VeloPark de Londres restait une énigme.

Plus tôt dans la semaine, Bradley Wiggins a annoncé se fixer 55,250 kilomètres en entendant tourner à 16,1 secondes au tour pendant une heure. A Londres, en dépit de conditions atmosphériques moins optimales qu’espéré, avec une pression de l’air beaucoup plus élevée que prévu, il est tout de suite dans l’allure. Rapidement, il prend son rythme de croisière pour porter sa performance au-delà de celle de Dowsett. Sur son Pinarello Bolide HR monté d’un 58×14, Wiggo tourne à la manière d’un métronome. Pourtant l’effort est violent, une torture dira-t-il à sa descente de vélo, mais les chiffres parlent en sa faveur. Bientôt, la barre des 52,937 kilomètres sera franchie. Il restera alors à Bradley Wiggins à établir la nouvelle marque de référence ! Et de placer la barre suffisamment haut pour décourager les futurs prétendants au titre de recordman du monde de l’Heure, qui devrait déjà compter moins d’adeptes ces prochains mois.

Lorsque la grande aiguille de l’horloge boucle son tour du cadran, Bradley Wiggins a parcouru 54,526 kilomètres. C’est 1589 mètres de plus qu’Alex Dowsett. Record pulvérisé ! L’exploit est remarquable. Il permet au champion londonien, 35 ans, de rejoindre le cercle très fermé des vainqueurs du Tour de France détenteurs du record du monde de l’Heure (Petit-Breton, Coppi, Anquetil, Merckx et Indurain… sur Pinarello déjà).

Sa dernière heure de gloire ? Sans doute pas. Avant de raccrocher une bonne fois pour toutes le vélo au clou, il lui reste un dernier défi à relever. Deux mois après avoir mis un terme à sa carrière sur route avec le Team Sky à Paris-Roubaix, celui qui porte dorénavant les couleurs du Team Wiggins se tourne à présent vers Rio et les Jeux Olympiques 2016, sur lesquels il entendra égaler dans un an Sir Chris Hoy, l’athlète britannique le plus titré aux JO de tous les temps (six médailles d’or). Lui qui fut champion olympique de poursuite individuelle à Athènes en 2004, de poursuite individuelle et par équipes à Pékin en 2008, et du contre-la-montre à Londres en 2012.