L’étape du jour : Saint-Flour – Albi (217,5 km)profil étape 10 tdf 2019profil étape 10 tdf 2019 | © ASO

Le profil de cette 10e étape est celui d’une étape de transition quelque peu déguisée. En effet, les 80 premiers kilomètres de la journée s’effectueront sur un plateau à 800 mètres d’altitude sur lequel les coureurs rencontreront deux difficultés répertoriées, parmi de nombreuses autres petites bosses, mais rien d’excessivement méchant ou difficile. Les 100 derniers kilomètres en direction d’Albi seront d’ailleurs relativement plats, tout en présentant encore quelques aspérités dont la côte de la Malric à 53 kilomètres du terme de cette étape (3,6 km à 4,7%). Mais à partir du sommet, les coureurs évolueront sur de grands axes sans la moindre difficulté de taille, ce qui jouera forcément en la faveur d’un peloton bien garni face à une échappée à l’effectif sûrement réduit.

La victoire devrait donc en toute logique revenir à un sprinteur, mais il reste à savoir si la bande des fous du final sera au complet dans les rues de la cité albigeoise, ou si la concurrence opposée à Peter Sagan sera moins fournie qu’à l’ordinaire…

 

La Grosse Cote du Jour : Sonny Colbrelli

Dans la famille des sprinteurs qui passent bien les bosses je veux Sonny Colbrelli ! Actuel troisième du classement par points derrière les indétrônables Peter Sagan et Michael Matthews, l’italien impressionne par sa régularité ! Déjà 4 fois dans le top 10 des 8 premières étapes en ligne du Tour, il a démontré de réelles capacités en côte tout en alliant cela avec d’incroyables aptitudes de finisher. Toujours placé mais jamais gagnant, le coureur de la Bahrain-Merida pourrait tirer profit des reliefs de cette 10e étape tracée entre Saint-Flour et Albi pour glaner son premier bouquet sur la Grande Boucle en profitant d’une éventuelle absence des purs sprinteurs. Mais pour cela, il faudrait tout de même que le petit poucet lombard se joue de l’ogre slovaque…

 

Le beau geste de la veille : le rappel du code moral du cyclisme par les Deceuninck Quick-Step

Le peloton professionnel est régi par de nombreuses règles non écrites, qui n’exigent aucune sanction officielle en cas d’infraction. Un long règlement issu d’une culture traditionnelle du sport, affiné au fil des années et des éditions de la Grande Boucle, qui fait en sorte que tous les coureurs le connaissent et le respectent.

Pourtant, ce code induit du Tour de France, Rui Costa semble le négliger. En effet, lors des premiers kilomètres de l’étape entre Saint-Etienne et Brioude, l’équipe UAE du portugais ne possédait pas de coureur dans ce qui n’était pas encore la bonne échappée. Un souci que le portugais a essayé de régler en sortant de la meute à son tour, mais en profitant d’un arrêt du maillot jaune Julian Alaphilippe, chose fermement défendue par le règlement du peloton.

Un grave manquement que les équipiers du français se sont empressés de rappeler à l’ancien champion du monde lorsque quelques dizaines de bornes plus loin celui-ci fut repris après avoir vainement tenté de rattraper les hommes de tête, faisant alors des Deceuninck Quick-Step les gardiens du jour d’un ordre moral bien établi.

 

Une Histoire du Maillot Jaune : 10 juillet 2011 : L’origine de la « Voeckler mania »

10 juillet 2011, Saint-Flour. « Voeckler ce héros », c’est justement la une que le journal L’Equipe s’apprête à publier dans son édition du lendemain. Au terme d’une fantastique épopée sur les routes du Cantal, le jeune père vient de s’offrir un fabuleux destin. Le destin d’un homme qui a su saisir sa chance, et même la provoquer. A l’issue d’une de ces journées mémorables où les fortunes s’enchevêtrent comme des vélos dans le fracas d’une chute générale, le malheur des autres a fait le bonheur de l’un. Le succès du premier de l’étape à être parvenu à s’extirper du peloton, de celui qui s’est montré plus fort que les autres, impressionnant par sa force et sa hargne. Il fallait le voir dans la côte de Massiac, briser le verrou d’acier du peloton, ne laisser aucun espoir à ses adversaires de lui reprendre le moindre mètre, et s’en aller vers une journée supplémentaire en tant qu’échappé.

L’escapade, c’est le propre de Voeckler, sa spécialité. Ce qu’il aime, c’est courir devant, ouvrir la route du Tour de France, voir la foule attendre sa présence pour saluer le passage de ce grand cirque qui illumine chaque village qu’il visite. Ces journées de transition, où l’on passe son temps au sein du peloton, attendant le sprint final ou l’explication entre les favoris marquant la fin de l’étape, très peu pour lui. Depuis toujours, Thomas Voeckler est l’homme de l’action, du panache, du spectacle. Il est parfois celui qui crée la course, là où d’autres préfèreraient la voir rester éteinte. Il est celui qui tente parfois l’impossible, avec à chaque fois l’espoir de le voir se réaliser.

Ce 10 juillet 2011 a récompensé cette ardeur. Il a décidé d’enfin sacrer ce saltimbanque du vélo, ce troubadour de la Grande Boucle, ce trouble-fête du peloton. Il a joué mesquinement avec les poupées vaudou de ses adversaires, propulsant ceux-ci dans les barbelés clôturant les champs, éjectant ceux-là dans les ravins délimitant la montagne. La situation initiale était pourtant le schéma classique. Une échappée de gaillards bien costauds, mais somme toute insignifiants pour peser sur la course, apparemment inaptes à déjouer les plans de la meute. La tentative était belle, mais le contrôle exercé par le peloton l’annonçait vaine. L’écart était plafonné à moins de quatre minutes, laissant les fuyards à la portée du peloton, n’attendant que le moment opportun pour les engloutir. Ce déroulement, ce fut celui du commun des étapes de la Petite Reine, celui connu et répété presque quotidiennement sur le Tour de France, celui dont la maîtrise par les acteurs était proche de la perfection. Pourtant, en ce 10 juillet 2011, il y eu une fausse note. Il y eu cet insignifiant grain de sable qui dérègle la monstrueuse machine, ou plutôt ce mesquin ravin qui en engloutit une partie des engrenages.

Alors le train déraille et laisse filer le wagon de tête. L’avance des échappés augmente d’une façon exponentielle, pour atteindre une ampleur inédite depuis le départ de cette 98e édition. La victoire d’un fuyard devient probable, la prise du maillot jaune par Thomas Voeckler, mieux classé au général que ses compagnons du jour, potentielle. L’enjeu compris, il se démène d’autant plus vivement pour accroître l’avantage de l’échappée. Il harangue ses partenaires, les motive et les pousse à l’accompagner dans sa démarche. Chacun avait quelque chose à gagner dans cette entreprise : eux l’étape, lui le maillot, sans pour autant faire une croix sur la première.

Les kilomètres défilent et les fuyards ne perdent rien, comme emportés par leur élan. Le panache de Voeckler, la force de Sanchez et l’expérience de Casar portent cette petite escapade sur les routes du Cantal. Saint-Flour se rapproche et leur entreprise s’avère définitivement fructueuse. Unis jusqu’aux derniers hectomètres, les trois hommes se relayent à merveille, agrégent leurs forces, afin d’être certains de se mettre définitivement à l’abri d’un retour du peloton. Finalement, les Français s’avouent impuissants face à la puissance de l’espagnol pour le gain de l’étape. Mais l’essentiel est ailleurs pour l’alsacien : l’écart avec la meute était amplement suffisant, la tunique dorée lui revient, lui offrant même un léger matelas de deux minutes. Matelas que les favoris mettront 10 étapes à renverser. L’épopée commence…

 

La spécialité du coin : Le foie gras albigeoisfoie grasfoie gras | © cuisine AZ

Met recherché et raffiné, le foie gras trouve à Albi l’un des pôles majeurs de sa fabrication. Issu de l’engraissement des oies et des canards par une technique de gavage, le foie gras était déjà apprécié à l’époque romaine, avant de devenir l’une des plus grandes spécialités gastronomiques françaises. Consommé le plus souvent pour les fêtes populaires, dont le paroxysme en Occident reste celle de Noël, il est généralement étalé sur des toasts de pain grillé ou inséré dans des salades. On aime accompagner sa dégustation d’un vin liquoreux ou d’un champagne, convenant parfaitement pour l’occasion.

Toutefois, cette rubrique sur le foie gras ne peut s’effectuer sans évoquer la controverse actuelle autour de la maltraitance animale qu’engendre sa production. En effet la conception de ce met du Sud-Ouest étant désormais individuelle, elle donne lieu à des scènes atroces de souffrance après un gavage forcé et détaché de toute considération de la bête.

De ce fait, produit culturel, le foie gras a désormais pris une tournure politique, se ressentant dans sa consommation.