Appelons ça de l’orgueil même si d’autres y verront autant de l’audace. Quand Alejandro Valverde (Movistar Team) se dresse sur ses pédales alors que le peloton du Tour d’Espagne vient de franchir la dernière difficulté du jour et qu’il entame les 25 derniers kilomètres à profil descendant jusqu’à Cordoue, c’est une mèche que l’Espagnol allume. La première d’une Vuelta qui a commencé à une intensité moindre que les précédentes, les favoris n’étant pas appelés à se découvrir avant jeudi et la première des huit arrivées en altitude. On sait que l’équipe Movistar s’est présentée avec deux leaders en Espagne, et bien que Nairo Quintana ait la faveur des pronostics, Alejandro Valverde entend provoquer la course là où on ne l’attend pas. C’est le pari qu’il prend dans l’étape du jour, courue entre Mairena del Alcor et Cordoue (164,7 km).

Sous une chaleur éprouvante, cette étape n’appartient pas aux étapes présumées décisives. Tout juste doit-elle livrer un bras de fer entre les sprinteurs et les baroudeurs, qui voient dans la succession de deux cols en dernière partie de course une opportunité à saisir. Francisco-Javier Aramendia (Caja Rural-Seguros RGA), Jimmy Engoulvent (Team Europcar), Gert Joeaar (Cofidis) et Sébastien Turgot (Ag2r La Mondiale) n’attendront pas les pentes de l’Alto de San Jeronimo (4,3 km à 7 %) pour se presser devant. Dès le départ de Maireno del Alcor, ils forment l’échappée matinale. Une échappée toutefois sans espoir de réussite car très vite contenue à moins de 3’40 » d’un peloton sur la défensive. S’il laissera le quatuor franchir devant l’Alto de San Jeronimo à 65 kilomètres du but, il ne tardera plus à bondir sur lui dans la difficulté suivante, l’Alto del Catorce por Ciento et ses 8 longs kilomètres à 4,8 % sous un soleil de plomb.

Tous les éclaireurs repris, c’est vers l’arrière du peloton que se tournent nos regards. Le paquet perd des unités à tour de bras. Et l’on s’étonne de voir des coureurs susceptibles de passer ce genre de difficulté se ranger si vite comme le font Peter Sagan (Cannondale), Fabian Cancellara (Trek Factory Racing) et Tom Boonen (Omega Pharma-Quick Step). Ce n’est pas très bon signe dans la perspective des Championnats du Monde de Ponferrada qu’ils sont venus préparer tout spécialement au Tour d’Espagne. En tout cas on mesure le chemin qu’il reste à parcourir à ces garçons-là pour pouvoir peser sur le Mondial dans moins de cinq semaines. Mais la route est encore longue. Celle qui mène au sommet de l’Alto del Catorce por Ciento l’est finalement trop pour Nacer Bouhanni (FDJ.fr), qui finit lui aussi par se garer.

Soudain, Alejandro Valverde met le feu dans le faux-plat descendant qui suit le col.

Dans cette course à l’élimination (par l’arrière), personne ne s’attend vraiment à ce qui va se produire passé le sommet de l’ultime difficulté à 26 kilomètres de l’arrivée. En vue du sommet, trois coureurs ont démarré : Winner Anacona (Lampre-Merida), Romain Sicard (Team Europcar) et Adam Yates (Orica-GreenEdge). Quand soudain, Alejandro Valverde met le feu dans le faux-plat descendant qui suit le col. En un rien de temps, le Murcian rentre sur le trio de tête et se met à rouler comme un déchaîné sans réclamer un relais. En favori assumé. Le peloton, lui, comme désarçonné, ne se précipite pas dans la poursuite rendue compliquée par une descente un peu scabreuse, la route étroite serpentant sous les bois. Alejandro Valverde et les trois coureurs qui l’accompagnent y font fructifier leur avance jusqu’à 20 secondes.

Mais il reste bien des kilomètres jusqu’à Cordoue, et quand les coureurs présents dans la roue de Valverde se décident à passer des relais, ils ne sont pas suffisamment appuyés. Derrière eux, le peloton grandement diminué s’organise. Alejandro Valverde aura donné un coup d’épée dans l’eau, mais au moins il s’est rassuré sur sa condition, lui qui a dû abandonner son maillot rouge sans possibilité de se défendre hier, retardé avant la montée vers Arcos de la Frontera par une chute causée par ses propres coéquipiers. Tombé lourdement sur le dos, le Murcian a sauvé la face en ne cédant pas plus de 7 secondes aux meilleurs coureurs de cette Vuelta. Son démarrage aujourd’hui tient de l’orgueil. Mais il ne sera pas récompensé et, à 9 kilomètres de l’arrivée, chacun des quatre coureurs sortis dans la descente reprend sa place dans le peloton.

Il est temps de se tourner alors vers les quelques sprinteurs encore présents dans ce peloton réduit à une soixantaine de coureurs. Le porteur du maillot rouge Michael Matthews (Orica-GreenEdge) est là, John Degenkolb (Giant-Shimano) aussi. C’est entre ces deux-là que se jouera l’étape, dans un duel qu’arbitre Vicente Reynes (IAM Cycling) en lançant le sprint de loin. John Degenkolb dans sa roue surgit alors pour foncer à pleine puissance vers une ligne d’arrivée qu’il n’avait plus coupée en vainqueur depuis Gand-Wevelgem en mars dernier. Lui qui a depuis multiplié les 2èmes places à Paris-Roubaix, au Grand Prix de Franfort, au Championnat d’Allemagne, deux fois au Tour de France (Oyonnax et Bergerac), une fois sur la Vuelta (San Fernando), gagne sa sixième étape dans la Vuelta. Matthews 3ème reste en rouge.

Demain mercredi, la cinquième étape reliera Priego de Cordoba à Ronda (180 km).

Classement 4ème étape :

1. John Degenkolb (ALL, Giant-Shimano) les 164,7 km en 4h02’55 » (40,7 km/h)
2. Vicente Reynes (ESP, IAM Cycling) m.t.
3. Michael Matthews (AUS, Orica-GreenEdge) m.t.
4. Damiano Caruso (ITA, Cannondale) m.t.
5. Daniel Martin (IRL, Garmin-Sharp) m.t.
6. Alexandr Kolobnev (RUS, Team Katusha) m.t.
7. Lloyd Mondory (FRA, Ag2r La Mondiale) m.t.
8. Valerio Conti (ITA, Lampre-Merida) m.t.
9. Bob Jungels (LUX, Trek Factory Racing) m.t.
10. Fabio Aru (ITA, Astana) m.t.

Classement général :

1. Michael Matthews (AUS, Orica-GreenEdge) en 13h30’44 »
2. Nairo Quintana (COL, Movistar Team) à 8 sec.
3. Alejandro Valverde (ESP, Movistar Team) à 15 sec.
4. Rigoberto Uran (COL, Omega Pharma-Quick Step) à 19 sec.
5. Damiano Caruso (ITA, Cannondale) à 21 sec.
6. Johan-Esteban Chaves (COL, Orica-GreenEdge) m.t.
7. George Bennett (NZL, Cannondale) à 24 sec.
8. Haimar Zubeldia (ESP, Trek Factory Racing) m.t.
9. Alberto Contador (ESP, Tinkoff-Saxo) à 27 sec.
10. Wilco Kelderman (PBS, Belkin) m.t.

Classement par points :

1. Michael Matthews (AUS, Orica-GreenEdge) 45 pt
2. John Degenkolb (ALL, Giant-Shimano) 45 pt
3. Nacer Bouhanni (FRA, FDJ.fr) 33 pt
4. Daniel Martin (IRL, Garmin-Sharp) 32 pt
5. Lloyd Mondory (FRA, Ag2r La Mondiale) 21 pt
6. Vicente Reynes (ESP, IAM Cycling) 20 pt
7. Joaquim Rodriguez (ESP, Team Katusha) 16 pt
8. Roberto Ferrari (ITA, Lampre-Merida) 16 pt
9. Valerio Conti (ITA, Lampre-Merida) 14 pt
10. Damiano Caruso (ITA, Cannondale) 14 pt

Classement de la montagne :

1. Luis Mas (ESP, Caja Rural-Seguros RGA) 9 pt
2. Jérôme Cousin (FRA, Team Europcar) 9 pt
3. Danilo Wyss (SUI, BMC Racing Team) 6 pt
4. Winner Anacona (COL, Lampre-Merida) 5 pt
5. Amets Txurruka (ESP, Caja Rural-Seguros RGA) 3 pt
6. Nathan Haas (AUS, Garmin-Sharp) 3 pt
7. Adam Yates (GBR, Orica-GreenEdge) 3 pt
8. Kristian Sbaragli (ITA, MTN-Qhubeka) 2 pt
9. Jimmy Engoulvent (FRA, Team Europcar) 2 pt
10. Valerio Conti (ITA, Lampre-Merida) 1 pt

Classement du combiné :

1. Valerio Conti (ITA, Lampre-Merida) 79 pt
2. Luis Mas (ESP, Caja Rural-Seguros RGA) 124 pt
3. Amets Txurruka (ESP, Caja Rural-Seguros RGA) 125 pt
4. Danilo Wyss (SUI, BMC Racing Team) 134 pt
5. Jimmy Engoulvent (FRA, Team Europcar) 241 pt
6. Francisco-Javier Aramendia (ESP, Caja Rural-Seguros RGA) 242 pt

Classement par équipes :

1. Belkin (PBS) en 40h04’29 »
2. BMC Racing Team (USA) à 9 sec.
3. Team Katusha (RUS) à 26 sec.
4. Omega Pharma-Quick Step (BEL) à 29 sec.
5. Astana (KAZ) à 32 sec.
6. Movistar Team (ESP) à 36 sec.
7. Garmin-Sharp (USA) m.t.
8. Lampre-Merida (ITA) à 1’02 »
9. Cofidis (FRA) à 1’44 »
10. Tinkoff-Saxo (RUS) à 2’36 »