C’est une magie qui n’opérait plus depuis de longues décennies qui a envahi cet après-midi le vélodrome Jean Stablinski à Roubaix. Ce n’est pourtant pas à l’illustre champion nordiste que François Lamiraud (Team Vulco-VC Vaulx-en-Velin) voulait rendre hommage, mais à une autre légende du cyclisme français, Roger Rivière. Pour ce faire, le coureur de 32 ans s’est mis en tête depuis plus de six mois de ressortir des cartons le record de France de l’Heure, vieux de plus de 56 ans. Parcourir plus que les 47,346 kilomètres réalisés en 1958 par le champion disparu trop tôt : tel est le destin que s’est fixé le pensionnaire du Team Vulco-VC Vaulx-en-Velin. Alors que d’autres en finissent tout juste avec un Paris-Roubaix Challenge pluvieux, c’est à un défi tout autre auquel s’attaque François Lamiraud lorsqu’il s’élance sur la piste roubaisienne à 17h16 précises.

Pour effacer des tablettes ce record ancestral, cent quatre-vingt-dix tours de piste devaient être bouclés. François Lamiraud en fera quasiment huit de plus pour porter ce record à 49,408 kilomètres. « C’est une heure de souffrance, mais c’est la plus belle heure de ma vie », résume-t-il quand le micro lui est tendu au terme d’une performance de très haut niveau.

Pendant que la grande aiguille parcourt un tour de cadran, l’ancien vainqueur du GP Saint-Etienne Loire maîtrise pleinement son sujet en faisant parler ses excellentes qualités de pistard. Parfaitement posé sur sa machine, appliqué et prudent, il ne lui faut pas plus de dix minutes pour trouver son rythme de croisière. Les temps de passage qu’il s’est fixés sont pleinement respectés. Les temps au tour qu’il réalise ne varient que très peu (aux alentours de 18 secondes aux 250 mètres), même au plus fort de la douleur. Les premières indications qui le donnent plus de 2 km/h plus rapide et donc largement en avance sur les temps de passage de Roger Rivière ne feront que se confirmer au fil des minutes.

Même dans la période réputée pour être la plus difficile sur un record de l’Heure, François Lamiraud tient bon. Sa vitesse moyenne faiblit à peine, passant de 49,6 à 49,4 km/h une fois la barre de la demi-heure passée. Mais alors que les forces viennent à lui manquer, le coureur de 32 ans trouve une ressource inespérée dans un vélodrome qui monte progressivement en température. Les applaudissements des quelques centaines de spectateurs présents sont de plus en plus nourris. La gouaille et les encouragements du staff qui l’a épaulé dans cette tentative lui permettent également de repousser les frontières de la douleur durant les pénibles dix dernières minutes au cours desquelles son visage se fait de plus en plus grimaçant.

C’est au mental qu’il en conclut avec cette heure qui concrétise six mois de travail. Les minutes s’égrènent, les 60 minutes sont bientôt bouclées et c’est The Final Countdown, le célèbre morceau d’Europe, qui résonne dans l’enceinte roubaisienne. Le compte à rebours est bientôt terminé et c’est sur l’air d’Eye of the Tiger qu’en termine François Lamiraud. Aujourd’hui, le Stéphanois était bien un « Survivor » ayant dépassé ses limites. Il signe à 32 ans la plus belle performance de sa carrière.