Formé à l’école Bernaudeau, avec lequel il a connu les aventures Vendée U, Bonjour, Brioches La Boulangère et Bouygues Telecom, Anthony Charteau est de retour à la maison. Après deux années passées au Crédit Agricole puis deux autres chez Caisse d’Epargne, il s’est engagé au sein de l’équipe Bbox Bouygues Telecom, fort d’une riche expérience acquise dans d’autres effectifs. A 30 ans, c’est un rôle de capitaine de route que devrait endosser ce coureur au fort potentiel dans les semaines à venir. Lieutenant de luxe sur les courses internationales, leader sur les courses françaises, avec un penchant affirmé pour la Coupe de France et le rêve de devenir champion de France chez lui en Vendée à la fin du mois de juin, Anthony Charteau a déjà bien commencé l’année. Il vient de s’adjuger au Gabon la Tropicale Amissa Bongo.

Anthony, on vous retrouve chez Bbox Bouygues Telecom après quatre saisons passées ailleurs, qu’avez-vous ressenti en retrouvant ce groupe ?
Pour dire la vérité, j’ai vraiment l’impression de n’être jamais parti. C’est vrai que j’ai roulé pour deux autres belles structures mais je suis vraiment très heureux de revenir là. Que ce soit avec les gars que je connais bien ou ceux que j’ai pu côtoyer tous les jours sur la Tropicale Amissa Bongo au Gabon, je n’ai vraiment pas eu l’impression d’être parti. J’éprouve toujours autant de plaisir à courir avec eux.

Des choses ont bien dû changer depuis votre départ fin 2005 ?
Oui. Déjà, le staff a été modifié, des coureurs sont partis, d’autres sont arrivés. Il est évident que des choses ont changé en quatre ans d’absence. Cependant, j’ai retrouvé le même Jean-René Bernaudeau. Au Gabon, j’ai roulé avec des coureurs qui étaient déjà là avant que je parte. On ne peut pas dire que je me sois aperçu d’un gros changement. Maintenant, quand je vais me retrouver sur les courses avec Didier Rous en tant que directeur sportif, ça va me faire drôle. Quand je l’ai quitté, il était encore coureur.

Qu’est-ce qui a motivé votre retour dans l’équipe de Jean-René Bernaudeau ?
Plein de choses. J’arrive à 30 ans, j’ai pu faire de belles choses au Crédit Agricole, j’ai pu courir avec de supers leaders à la Caisse d’Epargne. Et je m’aperçois qu’à 30 ans, j’ai vraiment envie de continuer, et surtout de gagner des courses, d’être devant. Je n’ai jamais pris autant de plaisir à faire du vélo qu’en ce moment. C’est pourquoi je suis revenu avec Jean-René, avec qui l’histoire dure depuis longtemps. Nous avons partagé pas mal de choses. Avec Thomas Voeckler aussi. Je suis Vendéen, comme l’équipe, c’est un tout. Pour moi, il n’y avait pas d’autre alternative.

Qu’avez-vous retenu de vos expériences dans d’autres formations ?
J’ai appris beaucoup sur le travail d’équipe et le boulot d’équipier à la Caisse d’Epargne. Les Espagnols ont un respect énorme pour leurs équipiers. Il faudrait arriver à intégrer cela dans nos équipes pour que l’équipier soit considéré comme un coureur à part entière et non pas comme on le traite parfois dans certaines équipes françaises. A la Caisse d’Epargne, les équipiers ont un rôle primordial dans le fonctionnement de l’équipe. Sans eux, on ne peut rien faire. Après, j’ai appris beaucoup stratégiquement. J’ai vieilli, je me suis assagi mais j’ai toujours beaucoup d’ambition.

Y a-t-il un gros écart entre le mode de fonctionnement d’une équipe française et d’une équipe espagnole ?
Ce n’est pas flagrant, c’est surtout culturel, comme en société. Les Espagnols ne voient pas la vie comme nous. Ca influe forcément sur le fonctionnement de l’équipe. Après, les bases sont plus ou moins les mêmes. Ce qui m’a le plus frappé, comme je le disais, c’est la considération de l’équipier. Il a un rôle bien précis au début de la course, et à partir du moment où il a rempli son contrat, il reçoit les félicitations du leader le soir à l’hôtel. Que l’équipe ait réussi ou non, à partir du moment où tu as fait ta tâche, le contrat est rempli. J’ai vécu cela auprès de Luis-Leon Sanchez sur Paris-Nice ou d’Alejandro Valverde.

Venons-en maintenant à 2010 et une saison qui a déjà bien commencé puisque vous venez de remporter la Tropicale Amissa Bongo…
C’est un peu une tradition pour moi. J’aime beaucoup commencer sous les tropiques (NDLR : il avait remporté le Tour de Langkawi en 2007, qui demeurait sa dernière victoire). Ca permet de reprendre contact avec la compétition mais avec un peu moins de pression que sur le continent européen, où la presse est présente et où on recherche le résultat à tout prix. On va là-bas pour gagner évidemment mais si on ne le fait pas c’est moins grave. Il y a moins de stress. J’ai découvert une super course, une organisation extraordinaire, un pays magnifique avec des routes faites pour faire du vélo et un climat que j’aime beaucoup puisque j’aime les fortes chaleurs. Je reviens donc super content, très motivé. Et cette victoire me pousse à continuer l’entraînement et me rassure sur mon niveau.

Vous avez côtoyé le cyclisme africain, parfois bluffant. A quand un coureur africain chez les pros ?
Je crois que ça ne devrait pas tarder. C’est vrai qu’on a vu une équipe du Kenya extraordinaire, avec certains coureurs qui ne font du vélo que depuis trois mois et qui avaient un niveau très raisonnable pour le peu d’entraînement qu’ils avaient. Bon, on a vu qu’ils n’avaient aucune technique, aucune stratégie, mais quand on leur aura éduqué la façon de courir, on aura affaire à de sacrés sportifs et de sacrés cyclistes. Ils m’ont vraiment surpris par leur niveau physique.

Quelles vont être vos ambitions cette année ?
Je ne peux pas me permettre de cibler les courses, ce n’est pas mon rôle premier dans l’équipe. Mais lorsque je prendrai le départ d’une Coupe de France, ce sera pour la gagner. J’aime beaucoup la façon dont on court ces épreuves. Le Championnat de France en Vendée me fait aussi rêver. Sur les courses d’un niveau supérieur, je ferai plus l’équipier, le capitaine de route. Je vais poursuivre ma saison sur le Grand Prix La Marseillaise ce week-end puis ce sera le Tour Méditerranéen et le Tour du Haut Var.

Propos recueillis à Boulogne-Billancourt le 27 janvier 2010.