Christophe, vous remportez la première étape pyrénéenne du Tour de France, c’est un grand moment pour vous ?
Oui, d’autant que j’avais des sensations mitigées depuis le départ du Tour de France, je n’étais pas content de ce que je faisais. Je m’étais dit qu’il me restait une semaine pour y aller, il fallait essayer aujourd’hui. Les jambes étaient exceptionnelles, j’en ai bien profité. Je ne sais vraiment pas quoi dire, je suis ému, c’est tellement incroyable. L’écart est bien monté puis Astana a roulé, on s’est dit que Contador voulait gagner ici. Il nous fallait arriver au pied du col avec le plus gros écart possible sans laisser trop de forces. Après, j’ai bien géré la montée. Ca fait un bout de temps que j’attendais un résultat comme ça…

Vous ne vous êtes pas écroulé, n’ayant pas perdu de temps quand Contador a attaqué à l’arrière ?
Tant mieux si je n’ai rien perdu quand Contador a attaqué, c’est bon pour les étapes à venir ! Plus sérieusement, quand on est devant pour la gagne, le sentiment est partagé. On se concentre, le plus incroyable c’était le public au bord de la route, ou les motos de la radio et de la télé qui m’encourageaient, qui me disaient que c’était bon, que j’allais gagner. J’ai refusé d’y croire avant le dernier kilomètre. On ne sait jamais ce qui peut se passer. Je voulais avoir l’arrivée en point de mire pour savourer.

Vous étiez déprimé hier soir, que s’est-il passé ?
Je n’ai jamais été au bord de l’abandon, je suis un coureur qui y croit et qui se bat toujours. Je m’étais fixé des ambitions au classement général mais j’ai vu sur ces quinze derniers jours que je n’avais pas d’assez bonnes sensations. Hier soir, j’étais déçu de moi et de ma performance, et je ne voulais surtout pas faire un Tour de France comme j’étais en train de le faire, c’est-à-dire sans pouvoir me projeter à l’avant et sans avoir la possibilité de gagner une étape. Le staff d’Ag2r La Mondiale m’a encouragé. Il m’a rappelé que je récupère bien et que je suis toujours bien en troisième semaine d’un Grand Tour. Hier, je n’aurais pas mi un euro sur moi mais c’est arrivé aujourd’hui. C’est le sport, on a des jours avec, des jours sans.

Pourquoi n’étiez-vous pas dans le rythme ces deux dernières semaines ?
Ce n’est pas évident de gérer une saison complète. J’ai eu un pic de forme un peu trop tôt, j’ai fait un bon Critérium du Dauphiné et je suis arrivé sur ce Tour avec de gros objectifs. Alors le moral en a pris un coup mais je ne suis pas du genre à me décourager. Aujourd’hui ça s’est fait, je me suis regonflé. L’année dernière, les Pyrénées avaient bien souri à Ag2r La Mondiale.

Vous êtes pistard et vous remportez une étape de montagne n’est-ce pas contradictoire ?
Je suis passé pro en janvier 2005, ça fait déjà cinq ans et demi. La piste, j’en ai toujours fait. Je suis licencié depuis que j’ai 6 ans, j’ai été élevé à l’école de la piste, qui tient une grande place dans ma carrière sportive. Vincent Lavenu me donne la chance de faire les deux et c’est comme ça que je conçois ma carrière. Ca peut paraître se disperser pour certains mais je prouve qu’on peut très bien faire les deux, il y en a bien qui font du cyclo-cross. En plus, j’en fais pour les résultats et j’en obtiens. Mon équipe me laisse bien gérer mon programme de course et mon entraînement. Je ne suis pas un grimpeur exceptionnel, je suis loin du niveau des meilleurs.

Comment voulez-vous mener votre carrière ?
Mes objectifs cette année, c’était une médaille aux Championnats du Monde voire un titre. Après, bien entendu, il y avait le Critérium du Dauphiné, les Championnats de France sur route et le Tour de France. Je fais du vélo depuis que j’ai 6 ans et j’ai vu des Chiappucci, des Claveyrolat, des Indurain. Je regardais en boucle les étapes du Tour quand j’étais petit, ça a toujours été un grand rêve. Quand j’étais gamin, on disait qu’il fallait faire un vœu quand on voyait une étoile filante. Mon vœu c’était de devenir professionnel et de faire une carrière. Aujourd’hui, je garnis mon palmarès tout doucement.

Propos recueillis à Ax-3 Domaines le 18 juillet 2010.