Marie-Jeanne, le vélo, c’est une histoire de famille chez les Pinot ?
Une grande histoire, oui. Mon mari a fait des courses régionales, moi-même je suis passionnée de vélo depuis ma plus tendre enfance. A 8 ans, j’étais amoureuse de Raymond Poulidor… Thibaut a même eu un papy commissaire de course, donc il a baigné là-dedans.

Comment avez-vous vécu l’étape de Porrentruy dimanche ?
Avec beaucoup d’émotion. On est allés au départ et mon mari pensait qu’on serait bien mieux devant la télé, qu’on verrait mieux le déroulement de la course. Très vite, on a été très stressé. On voyait que Thibaut avait les jambes. Il était nerveux, ça a été des moments très forts jusqu’au bout. Car on a eu peur d’un ennui mécanique, d’une chute, qui viendrait contrarier son exploit.

Mais il a été au bout, comment avez-vous réagi ?
On a pleuré tous les deux, mon mari et moi. Je ne peux pas dire que c’est de la fierté, c’est de l’admiration. Je me demande où il va chercher cette force. Il a une force de caractère. Dans la famille, il y a des caractères forts, ça lui vient peut-être de là.

Quand l’avez-vous revu ?
Nous sommes allés le rejoindre à l’hôtel le soir-même. On ne l’a retrouvé que quelques instants dans sa chambre. Mais il a été tellement happé par la presse que nous n’avons pas pu profiter de lui dans l’intimité. Là, ce n’était plus mon petit à moi toute seule !

Pour gagner, Thibaut a enfreint les consignes dimanche. Il a bien fait ?
Oui il a bien fait. C’est vrai qu’il devait rester au contact des plus grands, ne pas bouger. Il est là sur le Tour pour apprendre, alors on lui avait donné pour consigne de rester auprès des meilleurs. Le déroulement a fait qu’il a pu s’échapper.

Il est supervisé par son frère, qui analyse ses fichiers SRM notamment…
Julien, c’est un technicien, c’est un peu l’intellectuel de la famille. Thibaut a une énorme confiance en son frère. Ils sont très proches l’un et l’autre. Julien est toujours de bon conseil et Thibaut écoute beaucoup son grand frère, qui arrive parfois à faire passer des messages que d’autres n’arrivent pas à faire passer.

Thibaut a la réputation d’être le plus déconneur de l’équipe, vous confirmez ?
Il est très insouciant, il a toujours été comme ça. A l’école, il charmait ses institutrices par son sourire, ses espiègleries.

Quel est son principal défaut ?
Son défaut, c’est qu’il est franchement bordélique. Mais franchement ça n’a pas de mot ! Quand il n’est pas là, la maison paraît morte. Quand il est là, c’est un tremblement de terre. Nous sommes partis en Crète l’année dernière. En rentrant d’une course, il a été contrôlé par l’UCI. Il y avait les valises partout, et sa petite sœur m’a rapporté que les contrôleurs avaient dû se demander dans quelle famille ils mettaient les pieds.

Comment voyez-vous la suite de son Tour de France ?
Je pense qu’il ne s’arrêtera pas là. Il a gagné une étape mais je pense qu’il va chercher à faire mieux. Peut-être qu’il finira bien au classement général, ce serait bien aussi.

Propos recueillis à Arc-et-Senans le 9 juillet 2012.