Yvon, les objectifs de Cofidis changent-ils depuis l’arrivée de Nacer Bouhanni ?
Effectivement, une part importante des objectifs réside dans le recrutement de Nacer avec la mise en place d’un dispositif digne de ce qu’il est nécessaire pour un sprinteur de valeur mondial. On a travaillé là-dessus, tant au niveau du recrutement qu’au niveau de l’entraînement. On sort d’ailleurs de belles séances en Espagne. D’un autre côté, on ne perd pas de vue que le cyclisme, c’est aussi des moments intéressants dans la montagne pour les classements généraux. Dani Navarro fait maintenant partie de l’histoire de l’équipe avec de belles performances. Il montre qu’il a aussi une place à jouer aux côtés de Nacer. Ils sont, c’est vrai, sur des terrains complètement différents mais qui sont complémentaires pour une équipe. Nacer et Dani sont capables d’emmener l’ensemble de l’équipe vers de bons résultats.

Son arrivée marque-t-elle le début d’une nouvelle histoire pour Cofidis ?
Je l’ai déjà dit, Nacer est un patron dans le bon sens du terme. C’est un moteur dans une équipe. Il est exigeant avec lui même. Il sait demander clairement ce qui doit être fait. C’est hyper positif. Je pense que nous avons gagné en professionnalisme et une forme de sérénité et d’épanouissement dans le travail. Au stage, il y a eu un vrai échange pour voir ce qui s’était bien passé et ce qui ne s’était pas bien passé. Cela permet d’affiner les sensations des uns et des autres. L’expertise de Nacer est précieuse. Malgré son jeune âge, il y a déjà beaucoup de réflexion par rapport à ce train. Il sait ce qu’il lui faut pour bien travailler et être performant.

L’équipe a-t-elle franchi un cap ?
Nous avons connu une belle préparation, un bon travail collectif, sérieux dans tous les domaines, une bonne implication de tous les coureurs. C’est important avant de se lancer sur les routes. Il faut aborder les choses avec humilité. Nos adversaires bossent aussi. Il faut avoir confiance en nous. Nous avons fait ce qu’il fallait pour être des protagonistes sérieux sur les routes cette saison.

L’équipe et vous-même n’avez jamais paru aussi confiants…
J’ai eu la chance de côtoyer quelques grands coureurs. Cela apporte de la sérénité. Nacer apporte également cette sérénité à l’équipe. Ça peut aller jusqu’au manager général (il rit). Notre saison 2014 a été correcte, mais quand on voit ce qu’ont fait les jeunes coureurs français, ça peut paraître un peu pâlot. J’avais envie de mener une vraie aventure avec une équipe de vélo. Avec Nacer, on s’est vite rencontré sur un projet sportif. On a envie de le faire grandir.

Comment sera constitué le train de Nacer Bouhanni ?
Adrien Petit, suivant ses qualités, entrera dans le train avec Nacer. Peut-être pas dans les tout derniers parce que nous avons des coureurs hyper explosifs. Quelqu’un comme Geoffrey Soupe qui accompagne Nacer est un coureur de grande qualité et très polyvalent. Il y a aussi Jonas Ahlstrand qui est aussi un coureur disposant de toutes les qualités requises pour l’épauler dans la dernière partie du train.

Vous ne mentionnez pas les deux sprinteurs flamands que vous avez recrutés, Michael Van Staeyen et Kenneth Vanbilsen. Ils ne rentreront pas dans le train de Nacer Bouhanni ?
Nous comptons bien sûr beaucoup sur eux. Ce sont des sprinteurs de talent qui auront un programme adapté. On compte sur eux pour aller gagner des courses ailleurs. Les victoires, c’est ce qui nous a manqué l’année dernière malgré de nombreux podiums et dix succès. Nous voulons en rajouter une dizaine pour cette saison. Aujourd’hui, ils ne sont donc pas dans la première partie de ce travail-là. Nous avons dans notre programme les classiques flandriennes ou un Kenneth Vanbilsen peut faire de gros résultats. On sait que ces courses sont très exigeantes et nous ne voulons pas exposer les coureurs du train à trop de classiques. Même si Nacer fera Kuurne-Bruxelles-Kuurne et Gand-Wevelgem.

Vous avez également été invités pour Milan-San Remo. Grâce à Nacer Bouhanni ?
En tout cas, sa présence n’a pas nui ! Je pense que c’était important pour l’organisateur d’avoir Nacer au départ de Milan-San Remo. Nous avons de bonnes relations avec eux et nous sommes très contents d’y participer. Toute l’équipe est motivée pour retrouver cette grande épreuve.

La culture du sprint n’est pas forcément ancrée chez Cofidis. Comment allez-vous y remédier ?
Il y a déjà l’expérience de Nacer. Il faut avoir le super sprinteur pour créer quelque chose autour. Il y a eu un recrutement de coureurs qui pouvaient être compatibles. Il y a un travail fait par les entraîneurs, notamment Jacques Decrion. Bref, c’est un ensemble de paramètres. Aujourd’hui, les sprints sont menés avec des coureurs capables de lancer un train. À partir de là, on ne pouvait pas recruter un des meilleurs sprinteurs du monde sans mettre de train autour de lui. C’était pour moi un non-sens. On travaille là-dessus. Il y a eu quelques belles séances d’entraînement. Il va maintenant falloir confronter les choses au terrain. Mais on a déjà pu voir des choses intéressantes en la matière.

Votre sponsor vous a-t-il mis la pression pour obtenir plus de résultats ?
Avoir l’envie, c’est normal ! Nous avons un partenaire présent dans le vélo depuis dix-huit ans. Il veut que ses couleurs soient portées le plus haut possible, c’est légitime. C’est vrai que lorsque l’idée de monter un projet sportif avec Nacer s’est présentée, il y a eu un intérêt de la structure. C’est important pour l’entreprise d’avoir un coureur de ce type dans les rangs de son équipe. Nous avons à cœur de renvoyer au travers du résultat, un retour au partenaire qui s’est investi et qui nous est fidèle depuis de si longues années.

Avec ce recrutement ambitieux et cette nouvelle direction, l’équipe a-t-elle les capacités de remonter en première division ?
La montée en WorldTour viendra avec les résultats sportifs. Ce que nous recherchons, c’est l’excellence en matière sportive. Si nous parvenons à remplir nos objectifs, ce dont je ne doute pas, on se posera alors la question du retour dans l’élite mondiale. Même si on sait tous qu’il y a un paramètre budgétaire qui rentre en ligne de compte. La première des choses est donc de se hisser au niveau sportif du WorldTour. Nous avons les atouts pour y arriver.

Propos recueillis à Roubaix le 23 janvier 2015.