Le terme d’étape de transition n’existe pas dans le vocabulaire des organisateurs du Tour d’Italie. Alors que la course rose remet le cap au nord, quittant l’Emilie Romagne pour rejoindre la Vénétie, elle aurait très bien pu concevoir une étape tout à fait classique, destinée vraisemblablement aux sprinteurs. C’est d’ailleurs ce qu’elle proposera demain entre Noale et Bibione avec une étape plate comme la main, mais aujourd’hui, le Giro joue avec les nerfs des finisseurs. Longue de 227 kilomètres, l’étape remonte la plaine du Pô pendant plus de 200 kilomètres sur des routes rectilignes qui aiguiseront sans aucun doute l’appétit des sprinteurs. Manque de chance, les 20 derniers kilomètres en direction d’Asolo sont très vallonnés, avec la Forcella Mostaccin (2,9 km à 7,8 %) et de multiples bosses non répertoriées rendant ce final technique et hautement explosif et compliquant sérieusement la tâche des rois de la dernière ligne droite.

Mais on ne saura pas ce dont Arnaud Démare (FDJ) par exemple aurait été capable de faire sur cette fin d’étape typique de ce que peut proposer le Tour d’Italie. La nervosité est palpable au sein d’un peloton qui chasse encore derrière Liam Bertazzo (Nippo-Vini Fantini), Vegard-Stake Laengen (IAM Cycling) et Anton Vorobyev (Team Katusha) avant le début de ce final en toboggan. L’avance des trois fuyards qui a dépassé les 7 minutes est déjà réduite comme peau de chagrin quand une chute scinde le peloton en plusieurs parties. Arnaud Démare est donc impliqué. La course poursuite qui s’en suit ne permettra pas aux coureurs retardés, dont fait partie Domenico Pozzovivo (Ag2r La Mondiale), de faire leur retour au sein du peloton. Sur la ligne, le leader de l’équipe Ag2r La Mondiale débourse plus d’une minute.

Le grimpeur de poche pourra amèrement regretter de voir que les favoris, si frileux depuis le départ du Tour d’Italie, se sont subitement décidés à faire la course dans la montée de la Forcella Mostaccin. Si l’accélération de Carlos Betancur (Movistar Team) est fatale à Vegard-Stake Laengen, dernier représentant de l’échappée, il faut attendre d’aborder la descente pour assister aux premières joutes entre favoris. Celles qui sont attendues depuis le départ de ce Tour d’Italie, celles qui n’ont pas eu lieu sur les deux premières arrivées au sommet à Roccaraso et à Sestola et celles qui ne devraient pas manquer dès ce week-end quand le Tour d’Italie entrera dans les Dolomites. Vincenzo Nibali (Astana) dont les qualités de descendeur ne sont plus à vanter en est à l’origine. Une chose est sûre, on n’attendait pas les favoris aussi remuants !

Le Maillot Rose à l’attaque, Diego Ulissi récidive.

Le Sicilien sur son terrain exploite la descente de la Forcella Mostaccin, annoncée très technique et comprenant quelques courbes délicates. Coutumier du fait, le champion d’Italie ne surprend pas Alejandro Valverde (Movistar Team) et Esteban Chaves (Orica-GreenEdge) quand il accélère à 16 kilomètres du but. Le trio est royal, mais l’entente n’est pas parfaite. Surtout qu’à l’arrière, les autres favoris, et surtout Bob Jungels (Etixx-Quick Step), ont flairé le danger. Le Luxembourgeois entend passer plus que 24 heures dans ce maillot rose qu’il a tant convoité et prend lui-même la direction des opérations pour recoller au trio emmenant avec lui, Ilnur Zakarin, Rigoberto Uran, Davide Formolo, Steven Kruijswijk, Andrey Amador et Rafal Majka. Bref, tous les favoris qui ne sont pas tombés dans le piège tendu par cette fin d’étape explosive.

Aussitôt la jonction opérée, Bob Jungels voit son maillot rose à nouveau menacé par Andrey Amador. Les efforts qu’il a consentis hier pour finalement échouer dans sa quête du maillot de leader n’ont manifestement pas découragé le Costaricain qui profite d’un moment de flottement à 13 kilomètres du but pour fausser compagnie au groupe des favoris. Ni une, ni deux, le Maillot Rose saute dans sa roue et le rejoint. Mais plutôt que de se relever, le Sud-Américain et le Luxembourgeois s’entendent pour repousser au maximum le groupe de chasse, composé d’une trentaine d’unités. Un regroupement dans l’une des portions descendantes du final permet en effet à de rares sprinteurs et à quelques puncheurs de faire leur retour. Parmi eux, figure un certain Diego Ulissi (Lampre-Merida).

Le Toscan, déjà vainqueur à Praia a Mare au retour de la course rose sur le sol italien, voit se présenter à lui une nouvelle opportunité d’étoffer son palmarès sur le Tour d’Italie. Sur le chemin qui mène à l’arrivée à Asolo, une montée de 1600 mètres à 6 % permet de rejoindre le centre historique à moins de 5 kilomètres du but. Cette dernière bosse est vue comme le tremplin idéal par Diego Ulissi qui en profite pour combler seul la dizaine de secondes de retard qu’accusait le peloton sur le duo de tête. Les desseins de l’Italien sont favorisés par le comportement de Bob Jungels qui n’hésite pas à sacrifier ses chances pour la victoire d’étape dans le but de conforter son maillot rose. Le trio parvient à préserver 13 secondes sur la ligne. Pour le plus grand bonheur de Diego Ulissi qui signe sa sixième victoire d’étape sur la course rose.

Demain, l’étape entre Noale et Bibione ne peut théoriquement pas échapper aux finisseurs.

Classement 11ème étape :

1. Diego Ulissi (ITA, Lampre-Merida) les 227 km en 4h56’32 » (45,9 km/h)
2. Andrey Amador (CRC, Movistar Team) m.t.
3. Bob Jungels (LUX, Etixx-Quick Step) m.t.
4. Giacomo Nizzolo (ITA, Trek-Segafredo) à 13 sec.
5. Sonny Colbrelli (ITA, Bardiani-CSF) m.t.
6. Matteo Trentin (ITA, Etixx-Quick Step) m.t.
7. Sacha Modolo (ITA, Lampre-Merida) m.t.
8. Enrico Battaglin (ITA, Team LottoNL-Jumbo) m.t.
9. Tim Wellens (BEL, Lotto-Soudal) m.t.
10. Alejandro Valverde (ESP, Movistar Team) m.t.

Classement général :

1. Bob Jungels (LUX, Etixx-Quick Step) en 45h16’20 »
2. Andrey Amador (CRC, Movistar Team) à 26 sec.
3. Alejandro Valverde (ESP, Movistar Team) à 1’07 »
4. Steven Kruijswijk (PBS, Team LottoNL-Jumbo) m.t.
5. Vincenzo Nibali (ITA, Astana) à 1’09 »
6. Rafal Majka (POL, Tinkoff) à 2’01 »
7. Ilnur Zakarin (RUS, Team Katusha) à 2’25 »
8. Esteban Chaves (COL, Orica-GreenEdge) à 2’43 »
9. Gianluca Brambilla (ITA, Etixx-Quick Step) à 2’45 »
10. Diego Ulissi (ITA, Lampre-Merida) à 2’47 »

Classement par points :

1. André Greipel (ALL, Lotto-Soudal) 119 pt
2. Arnaud Démare (FRA, FDJ) 103 pt
3. Diego Ulissi (ITA, Lampre-Merida) 100 pt
4. Giacomo Nizzolo (ITA, Trek-Segafredo) 97 pt
5. Maarten Tjallingii (PBS, Team LottoNL-Jumbo) 82 pt
6. Sacha Modolo (ITA, Lampre-Merida) 66 pt
7. Matteo Trentin (ITA, Etixx-Quick Step) 64 pt
8. Andrey Amador (CRC, Movistar Team) 57 pt
9. Bob Jungels (LUX, Etixx-Quick Step) 52 pt
10. Giulio Ciccone (ITA, Bardiani-CSF) 47 pt

Classement de la montagne :

1. Damiano Cunego (ITA, Nippo-Vini Fantini) 56 pt
2. Giulio Ciccone (ITA, Bardiani-CSF) 27 pt
3. Tim Wellens (BEL, Lotto-Soudal) 25 pt
4. Stefano Pirazzi (ITA, Bardiani-CSF) 18 pt
5. Giovanni Visconti (ITA, Movistar Team) 17 pt
6. Gianluca Brambilla (ITA, Etixx-Quick Step) 16 pt
7. Alessandro Bisolti (ITA, Nippo-Vini Fantini) 16 pt
8. Stefan Küng (SUI, BMC Racing Team) 15 pt
9. Ivan Rovny (RUS, Tinkoff) 15 pt
10. Nicola Boem (ITA, Bardiani-CSF) 11 pt

Classement des jeunes :

1. Bob Jungels (LUX, Etixx-Quick Step) en 45h16’20 »
2. Davide Formolo (ITA, Cannondale) à 5’49 »
3. Sebastian Henao (COL, Team Sky) à 13’31 »
4. Valerio Conti (ITA, Lampre-Merida) à 14’38 »
5. Carlos Verona (ESP, Etixx-Quick Step) à 24’50 »
6. Tobias Ludvigsson (SUE, Giant-Alpecin) à 31’48 »
7. Merhawi Kudus (ERY, Dimension Data) à 32’53 »
8. Damien Howson (AUS, Orica-GreenEdge) à 35’45 »
9. Nathan Brown (USA, Cannondale) à 38’56 »
10. Stefan Küng (SUI, BMC Racing Team) à 44’25 »

Classement par équipes :

1. Movistar Team (ESP) en 135h54’01 »
2. Etixx-Quick Step (BEL) à 2’07 »
3. Astana (KAZ) à 5’52 »
4. Team Katusha (RUS) à 9’28 »
5. Cannondale (USA) à 10’28 »
6. Tinkoff (RUS) à 10’58 »
7. Ag2r La Mondiale (FRA) à 13’11 »
8. Lampre-Merida (ITA) à 30’15 »
9. Dimension Data (AFS) à 31’06 »
10. Team Sky (GBR) à 31’22 »