Nicolas, tu gagnes la Quebrantahuesos, un des mythes cyclosportifs avec 7737 inscrits, 200 kilomètres, quatre cols à travers les Pyrénées Aragonaises et Françaises. Comment as-tu manoeuvré pour gagner en 5h50’26 » ?
C’est la deuxième année que je participe à cette magnifique cyclo et l’an dernier j’avais fait beaucoup d’efforts prématurés. Cette année, j’avais décidé en parlant avec Jacques Corteggiani d’attendre la fin et le dernier mur de Hoz de Jaca. J’ai donc toujours été aux avant-postes avant de me tester une première fois dans le Portalet et j’ai vu que les jambes étaient là. Donc dans la dernière bosse j’ai imposé mon rythme avant de faire la descente très technique derrière. J’ai pris vingt secondes, il restait alors 30 kilomètres, j’étais parti pour un petit contre-la-montre. Avec ensuite la foule, les motos de la police et l’hélico, cela m’a donné des ailes…

La météo a été terrible: pluie, humidité, froid, neige. Par quels états d’âme, es-tu passé pendant ces presque 6 heures ?
Je crois que c’est la première fois qu’il y a une météo comme celle-là en 26 ans. Quand on est au départ, il faut essayer d’occulter le facteur météo. C’est déjà un poids en moins. Ensuite je suis parti bien couvert sur le haut du corps et avec de l’huile sur les jambes. Après Marie Blanque j’ai vu que le froid n’avait pas d’incidence sur moi. En haut du Portalet, nous avons pris la neige et j’ai vu que les autres avaient froid, cela m’a donné encore plus d’énergie. J’avais remporté l’Etape du Tour entre Pau et Bagnère-de-Luchon dans les mêmes conditions.

On se souvient de ta commémoration des 50 ans de la victoire de Jacques Anquetil sur Bordeaux-Paris, où les conditions avaient été très dures également. En as-tu repris quelques souvenirs ou réflexes ?
Oui et non. Je n’ai surtout pas fait la même erreur d’attendre avant de me protéger de la pluie et du froid. Toutes ces expériences sont très bénéfiques pour chaque nouvelle épreuve. Les conseils que m’avait prodigués Joël Gallopin qui pilotait le derny ce jour-là me servent sur chaque épreuve. Samedi, j’ai toujours eu à l’esprit de tourner les jambes pour préserver ma musculature et être performant à la fin.

As-tu fait des choix matériels particuliers compte tenu de la météo ?
Il est vrai que ma victoire s’est jouée en partie dans la descente étroite et sinueuse de Hoz de Jaca. En effet, j’ai pris une vingtaine de secondes dans cette partie grâce à la confiance que j’ai au niveau de mes boyaux Mavic en 25 de section que j’avais gonflés à 6,5 bars. Ils ont une très bonne accroche sur route humide.

La performance est d’autant plus marquante qu’à la Time, une semaine avant, les sensations n’étaient pas là…
C’est assez simple, c’est le sport. J’ai été blessé au dos et je suis allé chez l’osthéo juste avant la Time. C’était une grosse dépense d’énergie contre la douleur et la remise en place. Mais tout est revenu dans l’ordre.

Il y a vingt-neuf nationalités au départ, et pourtant très peu de Français. Pourquoi ?
Effectivement, c’est la première fois en vingt-six ans qu’un Français la gagne. L’épreuve est peu connue en France et il y a tellement de cyclos sur notre territoire ! En plus, elle tombe le même week-end que l’Ardéchoise. C’est vraiment dommage, car c’est une cyclo du niveau de l’Etape du Tour. Je conseille vivement à tous d’aller y participer.

Quel est ton programme d’ici l’étape du Tour, le 10 juillet ?
La semaine prochaine je serai au départ de la Grand Bo. Ensuite je ne sais pas encore si je cours ou si je reste chez moi pour m’entraîner avant le jour J.

Tu nous réserves une surprise ainsi qu’aux lecteurs de Vélo 101 lors de cette Etape du Tour. Tu peux nous en dire un peu plus ?
C’est vrai, il y aura une petite surprise au départ cette année. Le départ est chez moi à Megève et j’aurai un dossard très particulier pour une occasion particulière…. Mais je n’en dis pas plus !

Propos recueillis le 19 juin 2016.