Si ceci semble logique et justifié, votre entrainement global ne doit pas négliger pour autant le travail plus spécifique : la fréquence gestuelle, l’explosivité, les qualités « anaérobies », autant de thèmes qui doivent prendre une place de choix dans votre programme. Ne vous dites surtout pas que ces exercices assez particuliers ne sont réservés qu’aux « coursiers » : les bénéfices que vous pourrez en tirer vous convaincront d’aborder ce travail de « vitesse » que nous pourrions définir comme « potentiel musculaire maximal ».

Voyons pourquoi et comment le travail de la vitesse et de l’explosivité doit être intégré dans vos séances.

Fibres rapides et fibres lentes

Quels que soient votre âge et votre niveau, vos muscles sont composés de deux types de fibres : les fibres lentes (ou blanches) et les fibres rapides (ou rouges). Il existe aussi des fibres intermédiaires « mixtes », mais, pour rester simple nous évoquerons seulement les deux grandes catégories de fibres. Amateurs de cyclosportives et de vélo en général, vous avez une majorité de fibres lentes, ce qui vous procure une bonne endurance. Vos muscles sont habitués à des efforts longs et sous-maximaux et seul l’épuisement des réserves énergétiques (séance très longue et/ou très intense) limite votre effort. D’une manière générale, disons que la répartition entre les deux types de fibres est déséquilibrée.

Si vos sorties se résument à accumuler les kilomètres à allure presque constante (« vite » seulement dans certaines bosses courtes) vous vous sentez probablement à l’aise sur la distance mais la moindre côte, le moindre sprint vous fait mal aux jambes.

C’est ce que l’on appelle communément « l’effet diesel » : il vous faut de nombreux kilomètres « orientés turbo » pour vous mettre en rythme, vous avez du mal à atteindre des cadences de pédalage élevées. Le travail de vitesse et d’explosivité, s’il ne limitera en rien votre endurance, vous permet de trouver un meilleur équilibre entre fibres lentes et fibres rapides, de quoi passer, en somme, du « diesel » au « turbo diesel » : en étant aussi endurant mais en disposant d’une réserve de vitesse bien supérieure, vous descendrez aisément vos « chronos » sur les cyclos à venir.

Il est toujours temps de penser à développer vos fibres rapides. Ces fibres musculaires sont recrutées par l’organisme pour fournir un effort maximal de courte durée. Si, à l’entraînement, elles ne vous sont guère utiles, hormis pour régler quelques sprints « à la pancarte » entre copains, elles seront très souvent utilisées lors des prochaines épreuves, même si la saison est plus qu’avancée. Voyons donc comment aborder ce travail très spécifique qui peu à peu, prendra une place grandissante au sein de votre « quotidien ».

 Un entrainement bien menéUn entrainement bien mené | © Lyon Sprint Evolution


Les fibres rapides utiles à l’effort cyclosportif

Lors d’une cyclosportive, quelle qu’elle soit, vous allez majoritairement solliciter vos fibres lentes. En effet, l’effort musculaire n’est pas maximal et, gestion de l’effort et du chrono obligent, vous allez tenter de maintenir un effort plus ou moins constant sur la totalité du parcours.

Pourtant, les situations durant lesquelles votre organisme fera appel aux fibres rapides sont légions : même sur ces épreuves, à dominante « endurance » il est commun de devoir fournir un gros effort : départ souvent rapide, montées où généralement se font les groupes de niveaux et donc les écarts, relances, « boucher un trou » pour s’économiser plus tard, voire sprint d’arrivée pour les meilleurs d’entre vous, vous solliciterez finalement assez souvent votre organisme de manière intense voire très intense et il faut s’y préparer à l’entraînement sur de longues semaines pour que le travail soit efficace.

Pour cela, il faut travailler ses qualités « anaérobies », c’est à dire développer ses capacités sur des efforts courts. Outre le travail d’interval training (développement du VO2max) c’est le travail d’explosivité, de sprints, voire de côtes qui devra être mis en place : encore une fois, si ces qualités ne constituent pas la principale composante de la performance cyclosportive, elles n’en sont pas moins indispensables à l’homogénéité de votre condition physique… et donc à vos performances à venir.

De plus, il a été prouvé que les fibres rapides pouvaient prendre le relais des fibres lentes pour assurer la couverture énergétique de l’effort : en d’autres termes plus vous travaillerez vos fibres rapides, plus vous finirez vos épreuves dans de bonnes conditions. Sans compter que le travail de sprints fait progresser tout le monde, du premier au dernier, en permettant d’acquérir une réserve de vitesse : en étant capable d’aller plus vite et d’avoir une cadence de pédalage maximale plus élevée, vous allez augmenter votre aisance à une intensité « spécifique » celle demandée lors des cyclosportives.

Enfin, précisons qu’en côte et plus encore dans les cols mythiques qu’empruntent les cyclosportives, ce sont les fibres rapides qui vont permettre de soutenir l’effort : en effet, celui-ci étant très intense, c’est la filière « anaérobie » qui prend le relais de la filière « aérobie » pour assurer la couverture énergétique. Les deux types de fibres travaillent alors conjointement pour vous permettre de parvenir au sommet et ce même si votre cadence de pédalage ou votre vitesse sont faibles.

Participer à de Participer à de « vraies » courses peut aussi permettre de travailler ses qualités de vitesse | © CC Nogent sur Oise

 

 

La progressivité et le « mixage » des séances

Au sein du programme d’amélioration des qualités « anaérobie » en général et de la vitesse en particulier, il est nécessaire de respecter une progression bien précise.

En prenant un peu d’avance sur la préparation hivernale, et dans le but de travailler ses points faibles, la première qualité à travailler est l’explosivité : commencez par intégrer des accélérations progressives au sein de vos séances : 4×30 secondes la première séance, puis 6×40 secondes puis jusqu’à 10 accélérations de l’ordre d’une minute maximum, entrecoupées de grosses périodes de récupération entre les efforts (5 minutes minimum) vous permettront de retrouver « du jus » : sautez, giclez des pédales en danseuse puis lancez-vous jusqu’à atteindre une vitesse maximale vous permettront de stimuler des fibres rapides « endormies » par un début de saison trop peu intense. En complément, quelques sprints aux panneaux d’entrées de village lors des sorties collectives du week-end contribueront à retrouver une bonne vitesse de base.

Par la suite, un travail de vitesse pure et de développement de la filière « anaérobie alactique » pourra être entrepris. Celui-ci n’a pas pour but de faire monter le cœur, c’est un travail de coordination musculaire dans lequel le muscle est sollicité de manière maximale : celui-ci va alors réagir en recrutant les fibres rapides qui, au fil des séances, vont devenir de plus en plus efficaces et de moins en moins « effacées ». Parallèlement, ceci vous permettra de disposer d’une réserve suffisante lorsque vous tournerez à « moyen régime » au sein du peloton :

Séance type en solo sur route ou sur Home Trainer :

Echauffement sur 20’ de manière progressive jusqu’à atteindre 75% de FC max

Corps de séance sur 30’ : 6 sprints explosifs sur 7 secondes en hypervélocité assis sur la selle, avec le plus faible braquet possible et la plus grosse cadence de pédalage possible. Départ toutes les 5’ (soit récupération de 4’53)

Retour au calme sur 10’ très souple à 60-70%.

De telles séances sont réalisables en groupe sur des sorties plus longues : dans ce cas on entreprendra des périodes de récupération plus élevées pour pouvoir étaler les sprints sur la durée de la séance.

Question progression, on pourra par la suite augmenter la charge de travail : 8×10 secondes puis 10×10 secondes puis 12×8 secondes puis 12×10 secondes et jusqu’à 15×15 secondes.

Les qualités d'explosivité et de sprint sont à travailler quels que soient l'âge et le niveauLes qualités d’explosivité et de sprint sont à travailler quels que soient l’âge et le niveau | © Lyon Sprint Evolution 

Par la suite vous pourrez aborder le travail de sprints en cherchant à atteindre la cadence de pédalage maximale tout en étant le plus explosif possible : pour cela il vous faudra enchaîner les sprints.

Séance type en solo sur route ou sur Home Trainer :

Echauffement sur 20’ de manière progressive jusqu’à atteindre 75% de FC max

Corps de séance sur 30’ : 6 sprints lancés en danseuse sur 20 secondes sur petit ou grand plateau. Départ toutes les 5’ (soit une récupération de 4’40)

Retour au calme sur 10’ très souple à 60-70%

Ici également, on cherchera à augmenter la charge de travail au fil des semaines : dans un premier temps en augmentant le nombre de sprints (8, 10 puis 12), tout en conservant comme critère la recherche de la cadence maximale ; dans un second temps en augmentant la durée des sprints (25 puis 30 et jusqu’à 40 secondes). Ainsi, au fil des semaines vous pourrez acquérir une meilleure explosivité, une meilleure cadence de pédalage et c’est votre allure de compétition qui s’en ressentira.

Enfin, une fois acquise la vitesse de jambes, dans un dernier temps on pourra entreprendre ce même travail avec un plus gros braquet, ce qui permettra d’atteindre des vitesses maximales et de solliciter les groupes musculaires en profondeur. Sur petit (en vélocité) et sur grand plateau (en puissance) vous allez ainsi recruter des fibres musculaires rapides.

Globalement, plus vous abordez explosivité et vitesse tout au long de l’année et meilleure sera son efficacité. Si vous visez une cyclosportive en mai ou en juin, travaillez sur des cycles courts (d’un mois environ) pour pouvoir suivre la progression. Si vous avez plutôt des ambitions sur l’Etape du Tour ou sur des épreuves de l’arrière-saison allongez vos cycles de travail pour terminer ces séances peu de temps avant votre objectif principal. Pour tout cyclosportif ambitieux le travail de la vitesse et de l’explosivité devient capital alors que les premières échéances se rapprochent : en effet, il n’y a qu’en sollicitant l’organisme de manière maximale qu’on le conditionne à recruter des fibres rapides. En outre, ces exercices ne sont pas réservés aux sprinteurs : chacun pourra y trouver matière à progresser puisqu’en augmentant sa vitesse maximale on augmente également sa vitesse de course.

 

Par Olivier Dulaurent