Devant le camping-car de la Telenet-Fidea d’Arnaud Jouffroy sont massés quelques supporters essayant d’obtenir un autographe ou une photo du coureur français, à quelques dizaines de minutes du Championnat de France. Et c’est le plus naturellement du monde que le Languedocien se plie aux différentes sollicitations, ne frustrant jamais ses fans émerveillés. De la sérénité se ressent chez ce jeune garçon d’une grande gentillesse. Bien que ses saisons soient contrariées par des blessures à répétition depuis 2010, Arnaud Jouffroy persévère et continue sa route vers le haut niveau, car malgré les embûches qui se dressent sur son chemin, il est et reste un garçon hors normes.

Hors normes d’abord par son palmarès de cyclo-crossman. A 21 ans, il a tout gagné ou presque chez les jeunes : champion du monde Juniors en 2008, champion du monde Espoirs en 2010, multiple champion de France Cadets, Junior et Espoirs. La gagne, il a ça dans le sang. Ce touche-à-tout (il le reconnaît lui-même) fait de la route, du VTT mais c’est le cyclo-cross qu’il préfère. « Ce sont la Belgique et les Coupes du Monde que j’ai faites quand j’étais jeune qui m’ont donné envie. Tout comme le Challenge National. Courir là-bas, ça me fait toujours rêver. »

Arnaud Jouffroy est aussi un grand coureur par sa détermination. Son parcours depuis octobre 2010 n’a pas été simple à gérer. Il se blesse au genou à l’aube de la saison dernière et un scanner lui révèle que le cartilage de sa rotule est abîmé. Il est contraint de mettre un terme à sa saison avant même la fin 2010. En 2011 cette fois, après un retour plutôt encourageant, la chance ne lui sourit toujours pas. « Je suis tombé sur la Coupe du Monde de Zolder, au mois de décembre, et j’ai des traits de fracture au niveau du tibia. Et du coup, je ne peux pas me préparer correctement. La différence avec 2010 c’est que je ne ressens pas trop la douleur sur le vélo. »

Le week-end dernier, il n’a pas hésité à s’aligner sur les Championnats de France dans la catégorie Elite alors qu’il aurait pu prétendre gagner un nouveau titre chez les Espoirs. Cela prouve sa détermination à rattraper le temps perdu. « J’étais plus motivé par la course Elite car je suis déjà professionnel, j’avais plus à y gagner. » Aux vues de sa course, on se dit qu’il est sur la bonne voie. Parti en sixième ligne au départ, il a rapidement remonté le paquet pour se retrouver au contact des meilleurs après même pas deux tours de course. Pendant une demi-heure, il s’est accroché à la tête de course mais comme bon nombre de favoris, il n’a pu résister au rouleau compresseur FDJ-BigMat. Il termine 13ème après avoir longtemps occupé la 8ème place. Toujours est-il que le coureur de la Telenet-Fidea a fait le spectacle. Il n’a pas hésité à sauter les planches au plus grand bonheur du public, très friand de ce genre de prouesses techniques.

Jouffroy possède un vrai potentiel. Après sa saison blanche de 2010, il a su repartir de l’avant, surmonter sa douleur et les moments difficiles, là où d’autres auraient sans doute abandonné. Un potentiel qu’il travaille avec Carlo Meneghetti, son entraîneur. Ensemble, ils ont réussi à faire retrouver un bon niveau à Arnaud, pas encore celui qu’il devrait avoir sans ses blessures, mais suffisamment bon pour qu’il termine 4ème du Championnat d’Europe Espoirs, ne s’inclinant qu’au sprint face à trois Néerlandais. Le chemin pour lui est long, il y a des hauts, comme des bas. « Cette année, mon moins bon souvenir est une 24ème place à Essen sur le Trophée GVA avec les Espoirs. J’ai pris un tir, j’étais dégoûté. Et mon meilleur souvenir est survenu le lendemain à Namur lorsque je gagne. »

Le garçon possède une envie débordante, une envie qui se ressent dans ses choix. Ainsi, depuis 2009 et sa signature avec l’équipe belge BKCP-Powerplus, il s’est installé en Belgique pour pouvoir courir dans le pays du cyclo-cross. Loin de son Languedoc-Roussillon natal, il a fait des sacrifices pour profiter de sa passion. Cette année, il a signé avec Telenet-Fidea, toujours en Belgique : « mon ancienne équipe m’avait proposé un nouveau contrat mais Fidea m’en a également proposé un. Ils m’avaient déjà approché quand j’étais Junior donc je les connaissais avant que je signe. Ça se passe super bien, je ne regrette pas mon choix, on s’entend tous bien avec les coureurs, l’ambiance y est très conviviale. » Depuis septembre, il vit désormais chez son entraîneur, Carlo Meneghetti, dans le nord de la France, loin de ses proches. Son envie lui impose des sacrifices mais il en veut. « C’est plus dur de s’entraîner dans le nord que dans le sud, question météo, mais je suis plus près de la Belgique donc des courses. Je n’ai qu’à faire une heure et demie/deux heures de route pour me rendre sur les courses. » Mais si Arnaud fait des sacrifices, il garde quand même la notion de plaisir comme sur le Championnat de France où il avoue qu’il est venu en partie pour cela : « ça m’a fait plaisir de revenir en France, courir le championnat national. » En tout cas, il met tous les atouts de son côté et lorsqu’on lui demande ce qui lui manque le plus dans sa nouvelle vie, il nous répond : « un peu de chance, ce serait pas mal. »

Il ne faut donc pas se fier aux résultats actuels d’Arnaud Jouffroy, ils ne sont pas révélateurs de son talent. Il n’est encore qu’au commencement d’une carrière parmi l’élite mondiale. Le chemin sera long et difficile mais le garçon y croit et fera tout ce qui est en son possible pour atteindre les sommets. Et qui sait, avec un peu de chance comme il l’espère, il pourrait refaire parler de lui sans tarder ! – Pierre Arz