Christian, quelles étaient les ambitions de Giant-Shimano au départ du Tour de France à Leeds ?
Tout simplement une victoire d’étape. C’est le premier objectif que l’on s’était fixé. Le Tour 2013 avait été fabuleux. Nous repartons avec quatre victoires dans la poche, comme l’an dernier. C’est un beau succès pour l’équipe Giant-Shimano.

Le maillot jaune au soir de la 1ère étape, c’était la cerise sur le gâteau.
Oui, on l’a vu. Vincenzo Nibali a un peu cannibalisé le maillot jaune. Nous l’avons eu un jour. C’est toujours sympa et important de l’avoir ne serait-ce qu’une journée sur les épaules.

Est-ce pour vous le moment fort de ce Tour de France ?
C’est difficile de garder un fait majeur. Mais il est vrai que le Grand Départ du Yorkshire était incroyable. Je n’ai jamais vu autant de monde sur le bord de la route. Le Tour est quelque chose de festif. C’est gratuit, les gens viennent voir les champions. Le public fait partie du Tour, c’est très important. Sur le plan sportif, je retiendrai les dégâts chez les leaders. Froome, Contador, mais aussi Cavendish, notre principal concurrent. C’est le Tour, c’est très exigeant, on peut avoir de la malchance. Cela a permis à la jeune génération française de pouvoir jouer le podium.

Si Marcel Kittel repart avec quatre victoires, John Degenkolb ne repart qu’avec deux 2ème places. Est-ce une déception ?
C’est une grosse déception pour lui, mais je ne suis pas déçu en tant que directeur sportif. Il a donné le maximum. Certes, il n’y a pas la victoire au bout, mais on est sur le Tour de France. Deux places de deux, c’est déjà un très bon résultat. Pour lui, c’était rageant. Il savait que l’arrivée à Bergerac était sa dernière chance et il a terminé 2ème derrière Ramunas Navardauskas.

Ce succès sur le Tour de France valide-t-il votre choix de tout miser sur le sprint, quitte à ne pas sélectionner Warren Barguil ?
Pour nous, c’est la performance qui compte. Or nous sommes performants au sprint. C’est notre marque de fabrique même si nous avons révélé de jeunes grimpeurs talentueux. Si un jour on découvre le futur grand coureur pour le général, il faudra prendre des dispositions. On a vu que le Team Sky avait emmené Cavendish avant de ne prendre que des coureurs pour le classement général. Cela devient tellement spécifique. Nous y réfléchissons. Il faut franchir des étapes chaque année. Warren sera sur la Vuelta. L’année prochaine il pourrait découvrir le Tour en électron libre. On s’adaptera. La Vuelta était une option pour le développement de Warren. Il a tellement de qualités qu’il aurait pu avoir de très bons résultats sur le Tour de France, c’est indéniable. Mais la politique de l’équipe a été de le mettre sur la Vuelta.

Quel y sera son rôle ?
On va le mettre dans les meilleures conditions pour qu’il puisse se concentrer sur le général. Un Grand Tour, c’est trois semaines. C’est très exigeant. Il est parti pour cela. Il a fait un camp d’entraînement à La Plagne et a enchaîné avec le Tour de Pologne avant la Vuelta.

Votre approche diffère-t-elle en tant que directeur sportif selon que vous soyez au Tour ou à la Vuelta ?
On essaye de travailler en amont au maximum. Si je n’ai rien à dire dans la voiture, c’est fabuleux. Cela veut dire que les gars maitrisent tout. C’est ce qu’on leur demande. Les oreillettes ne font pas tout. On a bien vu à Nîmes avec la pluie et l’orage qu’ils doivent se débrouiller et prendre leurs responsabilités. On analyse donc avant, au briefing. Et même avant le Tour où on fait les plans de notre organisation. Ensuite c’est juste un rappel, mais les coureurs sont conditionnés.

Parmi les autres membres de la nouvelle génération française, jugez-vous que les sprinteurs comme Arnaud Démare ou Bryan Coquard sont encore un cran en dessous des meilleurs comme Marcel Kittel ?
Ils sont encore très jeunes. Ils sont venus sur le Tour pour apprendre. Cela doit aussi être une politique de l’équipe. Il faut savoir les entourer. Construire une équipe autour d’eux. Au Tour, cela ne pardonne pas. Il faut bien protéger le sprinteur et l’emmener dans les meilleures conditions. C’est un travail technique assez difficile.