Fabian, pensiez-vous être en mesure de remporter le sprint sur le vélodrome ?
Beaucoup de choses me sont venues à l’esprit quand j’ai vu les situations difficiles dans lesquelles j’étais. Je ne dirais pas que je me suis retrouvé isolé trop tôt. Mais nous savions que ce serait tout le monde contre nous, tout le monde contre moi. Je ne sais toujours pas comment j’ai fait. C’est ce qui rend cette victoire si spéciale. Bien sûr, c’est toujours bien de venir sur le vélodrome. Je ne cherchais pas à faire le show, je cherchais la victoire. C’était juste un combat, une grande bataille. Je ne sais même pas comment Stybar et Vandenbergh n’étaient plus là. Il ne restait plus que Vanmarcke et moi. Il a fait une course fantastique. Cela ne s’est plus joué à l’instinct. Aujourd’hui c’était juste un combat, faire des choses dont on ne se pensait pas capables. Je ne sais toujours pas comment j’ai gagné, mais je suis allé au-delà de mes limites. Probablement comme jamais je l’avais fait. J’étais content de franchir la ligne, car cela voulait dire que la course était terminée. J’ai chercher à m’allonger dans l’herbe pour reprendre mon souffle et revenir sur terre. J’ai besoin de repos, car jamais je n’ai été autant épuisé. Nous avions une mission ce matin, la mission est accomplie. J’ai besoin de quelques jours pour réaliser ce que j’ai fait.

Quand vous vous êtes retrouvé seul, vous êtes-vous souvenu du scénario de 2011 ?
J’avais plus de confiance aujourd’hui qu’en 2011. Je savais que l’équipe était très forte. Elle a fait un travail extraordinaire. Nous savions dès le départ que ce serait un gros combat. Tout le peloton était contre nous, contre moi. Je savais que l’équipe donnerait tout. Nous avons aussi été malchanceux, ça fait partie de cette course. Mais je suis parvenu à arriver sur la ligne sans crevaisons et sans ennui mécanique. Quand j’ai vu que les attaques fusaient, je savais que je devais choisir ceux que je devais contrer. Dans l’oreillette, tout le monde me motivait, me disait que je ne devais pas abandonner. Mais je ne pouvais pas aller derrière tout le monde.

C’est une saison extraordinaire…
Je suis content de cette victoire, de ce doublé. C’est une grande période de classiques. De San Remo à Roubaix, je ne pensais pas garder mon pic pendant si longtemps. Je suis très content. J’ai hâte de retrouver ma famille et me reposer.

On vous a vu discuter avec Sep Vanmarcke, que vous lui avez vous dit ?
Je savais que c’était un jeune coureur, que c’était la première fois qu’il se retrouvait dans cette situation. C’est assez spécial. J’étais sûr de ma force. Nous n’avons pas énormément parlé, mais j’ai voulu qu’il joue le jeu. Qu’il prenne des relais pour lui montrer que je n’aillais pas l’amener comme ça jusqu’à la ligne. Il m’a dit dans l’avant-dernier secteur qu’il voulait prendre la tête, mais j’ai refusé. J’avais un peu peur, du moins, on ne sait pas comment sont les coureurs. Sur les pavés, j’avais plus l’impression de reculer que d’avancer, c’est pour cela que j’étais plus fort sur les routes goudronnées. Je voulais faire la différence à cet endroit. Sep à l’avenir devant lui. Il aura d’autres possibilités de se battre pour la victoire.

Vous vous êtes livrés à un vrai duel de pistards.
J’ai voulu jouer le jeu. Je ne sais pas comment j’ai fait. Je voulais surtout ne pas perdre, en particulier après une journée comme celle-là. C’est ce qu’ils font sur la piste, du sur place. J’avais un peu peur quand nous étions pratiquement à l’arrêt dans les virages.

Quels sont vos plans pour les prochaines semaines ?
Je veux surtout passer une bonne soirée avec l’équipe, m’amuser et profiter de cette victoire. Je vais ensuite me reposer. Je ne pense pas au reste de la saison, je veux simplement récupérer.

Peut-on comparer votre palmarès sur les classiques avec celui de Tom Boonen ?
J’ai beaucoup de respect pour Tom. J’étais vraiment désolé pour lui quand il est tombé la semaine dernière. Il est né pour courir, comme moi. Nous aimons tous les deux ces courses. Qui est meilleur ? Chacun à sa spécialité. Il est meilleur sprinteur, je suis meilleur rouleur. Nous sommes tous les deux très forts de manière différente. C’est bon pour le cyclisme.

Vous aviez déjà deux pavés, où ira le troisième ?
Il ira à la place où il devait être. Nous avons construit un sauna l’année dernière avec ma femme. Il y a trois fenêtres, mais il n’y avait que deux pavés. Sa place est toute trouvée. C’est agréable de s’asseoir dans ce sauna et de regarder ces trois pavés. J’espère que ce sera le cas quand le temps sera meilleur, car je pourrais les regarder sous le soleil. Mais ce troisième pavé a besoin de temps, pour que je puisse réellement réaliser ce que j’ai fait. Les deux premiers, je les ai gagnés avec la manière et ce troisième aura une tout autre signification.

Il n’y a donc pas de place pour un quatrième ?
Je n’y ai pas pensé. Peut-être qu’on devra construire un nouveau sauna (il rit). En fait, je ne pense pas à une quatrième victoire. Je pense davantage à me reposer. Physiquement, mais aussi mentalement, car les dernières semaines ont été très stressantes.

Propos recueillis à Roubaix le 7 avril 2013.