Jean-Christophe, que peut-on vous souhaiter à l’aube de votre rentrée 2015 ?
Réaliser la même saison qu’en 2014 serait déjà une performance. J’espère être aussi performant. Ça nécessite beaucoup d’entraînement, de la rigueur, du travail, en espérant que l’âge n’ait pas trop d’emprise sur moi ! J’ai terminé 2ème du Tour de France l’été dernier. Maintenant, envisager la victoire, je crois qu’il faut être réaliste. Il y a des coureurs mieux placés que moi pour prétendre à la première marche du podium. Je ne l’envisage pas. Je n’ai pas la jeunesse que peuvent avoir pour eux Thibaut Pinot ou Romain Bardet. Bien entendu, quand on a goûté au podium du Tour, on rêve de réaliser la même chose. Je vais essayer de bien préparer mon Tour et d’être aussi bon l’été prochain.

Après votre podium à Paris, avez-vous ressenti le besoin de faire le vide durant l’hiver ?
J’ai eu besoin de le faire, oui, mais je n’ai malheureusement pas trop pu le faire, si ce n’est entre les fêtes, quand j’ai enfin pu me retrouver en famille… J’ai été très sollicité tout l’hiver, si bien que je suis en retard sur ma préparation en ce début de saison. Aujourd’hui, je suis dans le même état d’esprit qu’au début du mois de décembre 2014. Clairement, j’ai deux petits mois de retard.

Comment abordez-vous la saison dans la peau d’un 2ème du Tour de France ?
Dans un sens de la même manière que l’an dernier. Pour ambitionner un podium, il faut être dans le même état d’esprit. Je reste appliqué sur la tâche, je reste concentré, et j’essaie de faire abstraction de toute cette pression extérieure, des médias, de l’engouement populaire autour de ça. C’est je crois le meilleur moyen d’obtenir le résultat escompté.

Allez-vous répéter la préparation qui fut la vôtre l’an passé ?
Je vois ma saison en deux phases. Une première période jusque début mai, une seconde en vue du Tour. J’ai pris du retard cet hiver, ce qui m’inquiète un peu pour la première période. Mais quant à la seconde et la préparation du Tour, j’ai largement le temps de m’y consacrer. Mon programme, je le modifierai sans doute l’an prochain en courant le Giro et la Vuelta. Ce sont deux envies. Je veux découvrir le Giro que je n’ai jamais fait. Mais sur cette année 2015, l’objectif c’est le Tour de France à 100 %.

Quelle est la première course sur laquelle vous souhaitez marcher cette année ?
J’ai le Tour du Pays Basque en tête, voire peut-être le Tour de Romandie, une course que je n’ai jamais trop réussie. Vu mon retard, je pense que je pourrai être présent au mois d’avril et jusque début mai. Mon objectif ensuite sera de retrouver ma forme de l’été 2014 et de faire le Tour avec cette forme.

Vous avez eu le temps cet hiver d’étudier le parcours du Tour 2015. A-t-il des similitudes avec celui de 2014 ?
Je vois vraiment deux Tours totalement différents. J’avais beaucoup apprécié la moyenne montagne en 2014 quand 2015 est beaucoup plus axé sur des étapes piégeuses en première partie avec les pavés, les risques de bordures. Le Tour pourra se perdre dès la première semaine. Une fois cette semaine écoulée, le parcours fera la part belle aux purs grimpeurs avec la haute montagne. J’espère pouvoir tirer mon épingle du jeu. C’est un profil pour purs grimpeurs, sans chrono copieux pour me favoriser. Ça peut aussi être un beau Tour pour Romain Bardet.

Vous cohabiterez justement à nouveau avec lui, 6ème du Tour l’an passé. Qui aura le leadership ?
Nous nous rendrons sur le Tour comme nous l’avons fait l’année dernière, c’est-à-dire qu’il n’y aura pas de leader défini. Nous aurons tous les deux notre course à faire. Ensuite, c’est la course, ses aléas, l’état de forme qui détermineront la manière d’agir pour porter au mieux l’intérêt collectif.

Le duo Péraud-Bardet est un duo qui fonctionne bien ?
Bien sûr, et il va encore fonctionner. Je m’entends bien avec Romain. Nous sommes deux coureurs complémentaires. Lui est plus porté sur l’attaque, moi sur la défensive. Nous savons travailler intelligemment pour l’intérêt collectif. Avoir deux coureurs de très haut niveau capables de se sacrifier l’un pour l’autre, c’est ce qui fait la différence et c’est ce qui fait notre force.

Croyez-vous franchement un nouveau podium à Paris possible ?
Sur le papier, ça semble compliqué, mais je vais tâcher de me donner les moyens d’atteindre mes objectifs. Monter sur le podium sans concours de circonstances c’est possible. Gagner le Tour sans concours de circonstances me paraît plus compliqué. Cet été il y aura à nouveau Chris Froome, Alberto Contador et Nairo Quintana. En battre un des trois à la pédale pour monter sur le podium du Tour, pourquoi pas. Mais pour le gagner, il faudrait que ces trois-là aient un gros problème. Ça paraît plus improbable. Maintenant, tout est possible…

Vous susciterez logiquement beaucoup d’attentes de la part du grand public. Avez-vous peur de décevoir ?
Oui, clairement, j’appréhende l’attente qu’il y aura autour de moi cette saison. Maintenant, j’y suis déjà préparé psychologiquement. Je ferai ce que je suis capable de faire. Je ne pourrai pas faire plus ! J’ai déjà déculpabilisé par rapport à ça, sachant que je donnerai le meilleur de moi-même et que je m’appliquerai sur ce que je sais faire. On verra le résultat à la fin.

Propos recueillis à Paris le 2 février 2015.