Richard, pourquoi avez-vous intégré l’équipe de l’organisation du Tour de Normandie ?
C’est relativement simple. Au cours de l’été dernier, Jean-Noël Colin (secrétaire général) et Arnaud Anquetil (organisateur) nous ont contacté Claude Carlin (ancien champion de France amateur) et moi. Ils nous ont fait part du fait qu’ils avaient de gros soucis vis-à-vis de la charge de travail qu’ils pouvaient avoir. Ils nous ont demandé de les rejoindre sur le Tour de Normandie, ce qui nous a étonnés parce que l’organisation est plus que saine. Tout marche bien. Mais c’est quelque chose d’énorme et ils ont éprouvé le besoin d’avoir du renfort. Avec Claude, nous avons réfléchi assez longuement avant de donner une réponse positive fin août en précisant que l’équipe devait conserver son rôle.

Pourquoi ce délai ?
La proposition était simple. Arnaud Anquetil nous a dit « on vous donne le Tour de Normandie pour qu’il continue de vivre. » On est réalistes, on sait ce que c’est que d’organiser une épreuve comme celle-là. C’était infaisable. On pouvait apporter un support. Claude Carlin et moi sommes encore en activité. On est toujours dans le milieu à travers l’entreprise Arc-en-ciel assistance. À partir de là, il faut trouver le temps. Les journées ne durent que 24 heures. La réflexion était là : est-ce qu’on s’engage pour durer dans le temps ou pas ? On est pas là pour une année ou deux, on est là pour que le Tour marche et que ce soit plus un plaisir qu’une galère.

Quel sera votre rôle exactement ?
Dans un premier temps, on est là pour apprendre. On connaît bien le milieu du cyclisme en tant que coureurs, mais nous n’étions pas encore organisateurs. On apprend beaucoup aux côtés d’Arnaud Anquetil et de Jean-Noël Colin qui restent les chevilles ouvrières du Tour de Normandie. Ils gèrent encore une grosse partie des dossiers. Ce qu’on apporte c’est beaucoup de contacts et la manière d’amener les dossiers au niveau des collectivités.

Vous a-t-on dit pourquoi l’équipe avait fait appel à vous ?
C’est ce qu’on s’est demandé : pourquoi nous ? Ils nous ont répondu assez directement. Ils ont fait le tour des personnes auxquelles ils pouvaient demander. Ils ont proposé l’épreuve à ASO. Mais cela ne les intéressait pas. En faisant le bilan des choses en Normadie, il n’y avait pas beaucoup de personnes capables d’apporter ce dont ils avaient besoin.

Quel sera le rôle de la famille Anquetil ?
Josiane Anquetil reste trésorière. Sa fille prendra sa succession. Marcel Anquetil sera président d’honneur. Cela lui vient de droit, car c’est lui qui a créé le Tour de Normandie. Je me vois mal lui demander de partir aujourd’hui. C’est quelqu’un qui a donné beaucoup et qui a fait du Tour de Normandie une belle épreuve.

Vous avez connu une belle carrière chez les amateurs…
Je suis arrivé à l’UV Caen en 1986, c’est ce qui m’a fait progresser’. J’ai eu un directeur sportif qui a su déceler chez moi toutes les ficelles pour me faire avancer. Il savait comment faire pour me booster. Je dispute ma première course internationale au Tour de Normandie et je gagne la dernière étape. J’ai fait le Tour de Bretagne par la suite où j’ai aussi gagné une étape. Le monde a connu une catastrophe : Tchernobyl. Pour moi, elle a été « positive » dans le sens où les autres coureurs français ne voulaient plus aller dans les pays de l’Est. C’est ce qui m’a permis d’entrer en équipe de France, de faire la Course de la Paix et par la suite, d’être champion du monde amateur. J’ai ensuite gagné une dizaine d’épreuves internationales, la dernière au Grand Prix de Tokyo. J’ai été premier amateur français en 1989. C’est beaucoup de souvenirs. À travers des personnes aussi comme quand Jacques Anquetil me dit « Gamin, c’est bien ce que tu as fait », quand je suis champion du monde Le fait que je me remémore tout ça, ce n’est que de bons souvenirs. Je ne regrette pas du tout ma carrière sportive.

Comment s’est déroulé votre après-carrière ?
J’avais anticipé le fait que ça allait s’arrêter. Je travaille aujourd’hui à ERDF. À la fin de ma carrière, nous avons monté avec Claude Carlin, arc-en-ciel assistance. Arc-en-ciel, rapport à mon titre de champion du monde.

Pouvez-vous détailler le service ?
Quand on a arrêté de courir, on s’est dit qu’il y’avait parfois des choses en peu folles qui se passaient dans les dépannages. On a monté un service d’assistance en s’inspirant de Mavic, la référence à l’époque, mais avec moins de moyens. On a des véhicules de dépannage neutre et des services de liaison radio. On a aussi des podiums pour les protocoles d’arrivée. Ce n’est pas notre activité principale parce que le but est toujours de rester dans le milieu, mais de ne pas tout consacrer au vélo. On a une vie à côté. On est restés dans le milieu en faisant des choses utiles. Ça nous a permis de continuer à côtoyer les coureurs que l’on connaissait, avec lesquels on courrait. Tout cela nous amène aujourd’hui à l’organisation. En étant dedans maintenant, on s’aperçoit du travail et de l’investissement qu’ils peuvent donner. On a l’impression d’avoir fait le tour de ce qu’était le cyclisme. Tout en sachant qu’on apprend toujours. Aujourd’hui, j’ai l’impression de commencer une nouvelle carrière en tant qu’organisateur. Cela reste de la découverte et du plaisir dans ce milieu qui nous a toujours apporté.

Dans quel état avez-vous retrouvé l’épreuve ?
On avait l’impression qu’elle dormait un petit peu. Quand un Tour se termine, on repart aussitôt sur l’organisation de l’édition suivante. Là, tout le monde était un peu figé. Mais on a senti un réel soulagement, car le Tour de Normandie, je connais bien. C’est là que j’ai acquis ma première victoire internationale. J’ai été au club de l’UV Caen sous la présidence de Madame Anquetil. À l’inverse, les organisateurs me connaissent bien. On a senti un réel plaisir à ce qu’on vienne les aider.

Le parcours de l’édition 2013 change peu finalement…
Du fait que l’on a pris un peu de retard, on est reparti sur les villes-étapes de la dernière édition. On a tout de même une étape totalement nouvelle entre Thuit-Signol et Argentan avec une belle difficulté à mi-parcours. Le but pour nous, c’est d’apporter du nouveau. Les équipes nous ont fait savoir qu’il leur fallait des choses nouvelles. Aujourd’hui, on est dans une phase où l’on a besoin de regarder pour voir comment tout le monde fonctionnement. Et un peu de temps pour chercher de nouvelles villes étapes et faire quelques changements sans pour autant changer l’image du Tour de Normandie. Sans pour autant bouleverser les villes étapes, mais apporter des circuits un peu différents pour que les choses ne soient pas figées dès le départ et qu’on n’ait pas l’impression de faire la même chose d’une allée sur l’autre.

En revanche, pas de demi-étapes, pourquoi ?
Ça fait beaucoup de difficultés dans la même journée, ça veut dire se lever de bonne heure le matin et ce n’est jamais très simple pour une organisation. Les coureurs n’aiment pas spécialement cela. J’ai souvenir d’avoir gagné deux étapes dans la même journée sans pour autant les apprécier. Quand les conditions climatiques sont mauvaises, c’est frustrant pour tout le monde. Le tout, c’est que tout le monde prenne du plaisir. Il faut que les coureurs y retrouvent leur compte. L’organisation, c’est une centaine de bénévoles qui se déplace sur l’ensemble du tour. On doit ménager tout le monde pour que cette épreuve dure.

La sélection des 24 équipes est tombée ce week-end, comment avez-vous fait votre choix ?
Pour moi, c’était tout à fait nouveau, car je n’étais jamais passé du côté sélection. J’ai fait principalement cela avec Arnaud Anquetil et le reste du bureau. Le but était de favoriser les équipes réserves du WorldTour. On ne peut pas faire autrement que de les sélectionner, car c’est tout de même l’image du cyclisme mondial. Il y a ensuite, les fidèles au Tour de Normandie. Ensuite, ce sont les équipes régionales. Ce n’est pas une gymnastique facile. Car en fin de compte, on arrive facilement à une vingtaine d’équipes. L’hébergement des équipes, c’est la moitié du budget du Tour et ce n’est pas négligeable.

Avez-vous déjà une idée des têtes d’affiche ?
On a vu que Jérôme Cousin, vainqueur l’an dernier a déjà remporté une étape à Bessèges. Ensuite, c’est très aléatoire, car on n’a pas assez de recul sur ce que les coureurs ont fait depuis le début de saison. Les équipes comme Europcar et BMC ne seront pas là pour faire de la figuration. BMC vient avec un encadrement gonflé par rapport à beaucoup d’équipes, ils ne viennent pas là pour amuser la galerie.

Propos recueillis le 6 février 2013.