Romain, vous faites cette saison votre retour en France avec Bretagne-Séché Environnement. Comment vous êtes-vous rapproché de cette équipe ?
Au mois de juin, on commençait à douter de la continuité de Vacansoleil-DCM. Après quatre années à l’étranger, j’avais à cœur de revenir en France. C’était un souhait. Et parmi les équipes françaises, Bretagne-Séché Environnement était celle qui me tentait le plus, n’étant pas trop attiré par les trop grosses structures. Je n’ai jamais été très éloigné d’Emmanuel Hubert et Dominique Moyon. Le rapprochement s’est fait petit à petit, jusqu’à trouver un accord. Là, je sens que je vais avoir un rôle important à jouer, qui plus avec notre sélection pour le Tour de France.

Vous sortez de deux années compliquées. Les résultats ont été là mais la victoire vous a fait défaut. Que s’est-il passé ?
J’ai eu des soucis de santé. J’ai traîné pendant longtemps une appendicite qui n’avait pas été décelée. J’ai passé des examens à l’hôpital mais ils n’ont jamais rien trouvé. Quand ils ont ouvert, ils se sont aperçus que ça faisait longtemps que c’était là. Ça a été nettoyé au cours d’une intervention durant laquelle j’ai été bien « chatouillé ». Ça m’a été difficile de remettre en route en fin de saison. Mais depuis le mois d’août tout va bien et je suis tourné vers l’avenir.

A ces soucis dont vous ne trouviez pas la cause s’est ajoutée une perte de confiance…
Ça a entraîné un manque de réussite, un manque de confiance aussi donc. De ma part puis de l’équipe. Je me suis engouffré dans une spirale négative et me suis enfoncé petit à petit. Durant cette période je me suis posé beaucoup de questions. Par moments ça allait mieux. Et c’est justement quand ça commençait à aller mieux que ça me retombait dessus. C’était cyclique. Tous les mois, je souffrais d’une crise de l’appendice. J’allais à l’hôpital, je passais des tests, ils ne trouvaient rien, et je repartais sans être plus avancé.

Aujourd’hui que vos problèmes sont résolus, vous entamez la saison avec un nouveau maillot à défendre. Vous avez fait le plein de ressources pour repartir du bon pied ?
Ça remotive, oui. Ces dernières années, je m’étais un petit peu éloigné des courses de type Coupe de France, que j’ai toujours aimées. Ça me fait vraiment plaisir de revenir aux sources. Entre-temps, le sprint français a beaucoup évolué. Avant, sans être prétentieux, j’étais peut-être le meilleur sprinteur français. Aujourd’hui c’est loin d’être le cas. Il y a des jeunes qui sont là et qui marchent très fort, ça me donne une envie supplémentaire de me battre contre eux. Ils ont mis la barre très haut, ne serait-ce que les battre de temps en temps serait bien.

Quel regard portez-vous précisément sur ces jeunes sprinteurs ?
Bryan Coquard, Nacer Bouhanni et Arnaud Démare sont vraiment des tout bons, et pas qu’au niveau français. Au niveau mondial ils font partie avec certitude des quinze meilleurs. C’est pourquoi les approcher sera déjà bien. Chacun m’épate à sa façon. Bryan Coquard a peut-être obtenu moins de victoires que les deux autres l’année dernière mais j’avais vraiment été impressionné par ce qu’il avait fait à Bessèges, jusqu’au chrono le dernier jour. Nacer Bouhanni a gagné beaucoup, de belles courses, avec une concurrence internationale parfois élevée. Quant à Arnaud Démare, il s’est lui aussi adjugé de belles épreuves, parfois avec un peu de relief. Ils sont tous différents mais très impressionnants.

Que vous restera-t-il de vos quatre années passées à l’étranger chez Vacansoleil ?
Ça restera de bonnes années. J’ai appris la culture du vélo dans différents pays. J’ai vu comment ça se passait ailleurs. Ça m’a apporté une ouverture d’esprit. Ça ne sera que bénéfique, ne serait-ce que pour la culture des courses flamandes, savoir ce qui se passe dans leurs têtes, comment ils appréhendent le truc. Je reviens en outre en France fort de quatre années de plus. J’ai pris un peu de maturité.

A 29 ans, vous êtes le coureur le plus expérimenté de l’équipe Bretagne-Séché. Que rôle aurez-vous à jouer auprès de vos coéquipiers ?
Je suis le deuxième coureur le plus âgé après Florian Guillou, ça fait bizarre. Forcément, j’aurai des choses à apprendre aux plus jeunes, je pense notamment à des coureurs prometteurs comme Erwann Corbel ou Armindo Fonseca.

Avant la reprise au Grand Prix La Marseillaise, l’équipe a réalisé un dernier stage des plus intensifs en Espagne, en quoi consistait-il ?
Ça a été un stage très structuré durant lequel tout s’est bien passé, chacun ayant respecté le plan. Nous avons été très sérieux. Ça n’a duré que huit jours mais huit jours d’entraînement très scrupuleux. Nous avons réalisé des efforts de haute intensité. Sur quatre jours, nous avons essayé je pense de faire le maximum que le corps puisse supporter en termes d’efforts intenses au seuil ou au-dessus du seuil. C’est le type d’efforts qu’on peut fournir sur une course très éprouvante. Mais nous l’avons fait sérieusement. Nous avons été massés deux jours sur trois, ce qui est bien en stage. L’équipe n’a pas un gros budget mais il est bien géré. Tout est optimisé et c’est ce que je trouve intéressant.

2014 marque le retour de la fratrie Feillu dans une même équipe. Qu’est-ce que cela vous apporte mutuellement ?
J’ai signé le premier, puis Brice a été en pourparlers. Sans trop insister, j’ai essayé de faire passer le message que ça me ferait vraiment plaisir qu’on se retrouve. C’est bien pour nous deux, il y a moyen de faire de belles choses ensemble. Avoir les deux frères, c’est bien aussi pour les sponsors. Ces dernières années nous nous étions un peu éloignés, c’est l’équipe qui nous rapproche. Si Brice a besoin d’un conseil ou d’une épaule pour se reposer, après les directeurs sportifs, ce sera moi. Et inversement.

L’ambition va automatiquement renaître cette saison. Vous évoquiez la Coupe de France ?
Ce sont des courses que j’aime bien. Gagner le classement général serait très bien mais c’est un objectif qui requiert de les faire toutes et de ne pas avoir de souci. Maintenant, en gagner une, un Cholet-Pays de Loire, une Route Adélie, une Châteauroux-Classic de l’Indre, tout est bon à prendre ! Qu’il s’agisse ou non d’une Coupe de France.

Propos recueillis à Rennes le 30 janvier 2014.