Tous les deux jours, Maxime Bouet revient sur son Tour de France. Aujourd’hui, il livre ses impressions sur l’arrivée au sommet du Col du Galibier, hier. Il revient également sur la réaction d’orgueil de Nicolas Roche, présent dans l’échappée matinale et finalement dépassé par Andy Schleck sur les pentes du Col du Lautaret. Il évoque enfin la gestion d’une étape aussi courte que celle d’aujourd’hui ainsi que l’état de forme de son Leader Jean-Christophe Péraud. Immersion en plein coeur du peloton du 98ème Tour de France.

Maxime, quel est le programme d’un coureur du Tour après une étape comme celle arrivée au Galibier ?
On est arrivé à l’hôtel tard, vers 19h45, après un transfert assez long. Dès que nous sommes arrivés à l’hôtel, je suis allé au massage pendant une heure. Ensuite, on attend un peu les autres, ceux qui se font masser après nous. Car c’est toujours plus sympa d’être à table tous ensemble. Cela fait que l’on ne mange pas avant 21h-21h30 après ce genre d’étape.

Quelles ont été vos sensations au cours de cette 18ème étape ?
Je me sentais vraiment bien. Au sommet du Col d’Agnel j’ai basculé dans un gros groupe de 30 à 50 coureurs parmi lesquels les favoris au classement général. Ensuite j’ai un peu lâché mais c’est vraiment très encourageant pour l’Alpe d’Huez. J’essayerai d’accompagner Jean-Christophe Péraud le plus loin possible.

On vous a vu sortir du groupe des favoris dans l’Izoard, pourquoi ?
On avait encore à coeur d’être dans la bonne échappée chez Ag2r La Mondiale. Car cela faisait deux jours que nous n’y étions pas. Là, c’était bien, on avait Nicolas Roche devant. Donc ce n’est pas pour ça que j’ai attaqué, c’était plus en prévision de ce qu’il pouvait se passer après. Je me doutais qu’il y allait avoir des attaques dans le Col d’Izoard car dans le Col du Lautaret, avec un tel vent de face, cela paraissait vraiment très compliqué. Alors, j’ai voulu prendre un peu d’avance pour pouvoir donner un coup de main quand je me ferai reprendre. Si jamais une cassure s’opérait, j’aurais pu aider même si ce n’était que sur 500 mètres, Jean-Christophe Péraud ou Hubert Dupont.

En parlant de Jean-Christophe Péraud, il est désormais l’unique Leader de votre équipe ?
Oui. Nicolas Roche a perdu toute chance de bien figurer au classement général après les pyrénées et l’étape de Gap. Maintenant, tout n’est pas perdu puisque Jean-Christophe est dans les dix premiers au classement général ce qui est excellent. Alors on va travailler au mieux pour lui. En plus le chrono de samedi lui va bien, je pense que l’on peut avoir une totale confiance en lui. Pour l’instant c’est vraiment très satisfaisant au niveau du général.

Et pendant ce temps là, Nicolas Roche fait preuve d’un sacré tempérament …
Oui, il a perdu toutes ses illusions pour le classement général, c’est certain. Mais par contre, ce qui est sûr, également, c’est qu’il n’a vraiment pas perdu le moral. Au lendemain du Plateau de Beille où il a perdu beaucoup de temps, c’était un peu difficile pour lui mais il a vite retrouvé le moral.

Vous n’êtes donc pas surpris qu’il passe à l’attaque maintenant ?
Je ne suis pas du tout surpris, non. Nicolas, c’est un garçon qui peut faire un Top 10 ou un Top 15 au classement général d’un Grand Tour. Mais c’est aussi un garçon qui peut gagner des étapes et de très belles étapes ! Il avait déjà attaqué mercredi dans l’ascension de Montgenèvre et il a attaqué de nouveau vers le Col du Galibier. Il a un très gros moral.

Vous pensez justement que réagir comme ça cela peut lui servir pour plus tard ?
Oui, forcément, passer à l’attaque quand on a perdu autant de temps et que l’on voit ses objectifs au classement général s’échapper, cela renforce. Prendre une telle claque et réagir comme cela par la suite, cela ne peut que le renforcer. Il a retrouvé de bonnes jambes, dans le futur, il saura que les jambes peuvent revenir après une très mauvaise journée et ça l’aidera à gérer ces journées sans. Il y a beaucoup de positif dans son comportement sur les étapes de mercredi et jeudi, évidemment.

Pour parler du classement par équipes, quel est votre objectif désormais ?
Le classement par équipes, c’est un peu rageant. Car on est actuellement deuxième derrière Garmin-Cervélo or ils ont 10′ d’avance et ces minutes là, ils les ont gagné en partant dans des échappées alors que nous, nous sommes là où nous sommes en étant resté avec les favoris, nous n’avons pas bénéficié de telles circonstances. Mais c’est forcément bien joué de leur part. Maintenant, je pense que c’est quasiment impossible de revenir sur eux car on a pu voir que Danielson et Hesjedal étaient très forts en montagne. Un podium, ce sera déjà pas mal d’autant plus qu’il y a les Leopard-Trek juste derrière nous.

Cela passera par un bon chrono de votre part ?
Oui, je pense qu’il va falloir que je fasse un bon chrono samedi car je peux être le troisième homme pris en compte ce jour là. Tous les jours, on a quatre coureurs désignés pour faire ce classement. On en choisi toujours quatre au cas où un des trois premiers de l’équipe ait une défaillance ou un problème mécanique par exemple, au dernier moment, on assure le coup.

Place à l’Alpe d’Huez maintenant, comment gérer une étape aussi courte que celle-là ?
Je pensais que nous partions directement au pied du Télégraphe. Mais là, ça va aller finalement car nous avons 15 kilomètres avant. Ces kilomètres là en plus du départ fictif permettront de bien s’échauffer. Par contre, il ne va pas falloir trop manger. je pense qu’il faut finalement gérer cette étape comme un contre-la-montre. C’est un peu ça finalement, un contre-la-montre de 100 kilomètres.

Avez-vous déjà connu des étapes aussi courtes sur un Grand Tour ?
Non, jamais. Mis à part les Champs-Elysées, bien sûr. Sur Paris-Nice, par contre, tous les ans, on a une étape similaire, la dernière qui arrive sur Nice. Quoi qu’il en soit, je pense que ce genre d’étape doit convenir à Jean-Christophe Péraud, il risque d’être très fort vers l’Alpe d’Huez car c’est un garçon qui vient du VTT. Danielson est un garçon qui pourrait réaliser une belle performance également, il est un peu comme Jean-Christophe, très léger, ce genre de coureur qui réussit sur une étape aussi courte et difficile.

Mais Jean-Christophe Péraud a l’air très fatigué en cette fin de Tour …
Je pense que Jean-Christophe Péraud est encore vraiment bien. Il se plaint toujours ! (Il rit). Il est toujours très fatigué si on l’écoute mais c’est son aire. Il est toujours comme ça. Depuis le début de la saison, c’est toujours pareil mais il n’est pas plus fatigué ou pas plus mal que les autres. On arrive en fin de Tour, tout le monde est fatigué, tout le monde veut rentrer chez soi. Il va bien s’en sortir, je ne me fais pas trop de soucis.

Comment envisagez vous cette étape?
Je pense que les 15 premiers kilomètres vont être très rapides. Si ce n’est pas le cas, je pense qu’un coureur comme Rojas devrait pouvoir basculer en bonne position au sommet du Galibier et ainsi aller chercher quelques points pour le maillot vert. A vrai dire, on ne sait pas trop comment tout cela va se passer, on part un peu dans l’inconnu avec cette étape. Ce qui est sûr c’est que si une échappée sort, on ne devrait y retrouver que de très bons coureurs, car cela devrait partir dans le premier col. Après, des coureurs comme les Schleck ont tout intérpet à attendre l’Alpe d’Huez pour attaquer.

Propos recueillis le 21 juillet 2011.