Les classiques pour puncheurs ont une fâcheuse tendance à connaître des scénarios formatés avec des favoris attendant la dernière difficulté pour porter l’estocade. L’édition 2014 de Liège-Bastogne-Liège, sans faire injure à son vainqueur Simon Gerrans, ne rentrera pas dans l’histoire même s’il s’agissait de la 100ème édition du fait d’une course d’attente que l’Australien a su conclure en faisant parler ses qualités. Il y avait fort à parier que la Clasica San Sebastian, avec un parcours légèrement remanié connaîtrait un sort similaire. L’Alto de Jaizkibel (8 km à 5,8 %) et de l’Arkale (2,7 km à 6,3 %) ont été repoussé trop loin de l’arrivée pour qu’ils ne pèsent sur une course où tout se décantera dans la dernière difficulté introduite cette année le Bordako Tontorra (2,5 km à 9%) qui comprend des passages à plus de 20 %.

Oui, sur une classique de 219 kilomètres, seuls les 10 derniers auront eu une influence directe sur la course. Preuve d’une certaine timidité des baroudeurs, un seul homme constitue l’échappée matinale traditionnellement vouée à l’échec. Amets Txurruka (Caja Rural-Seguros RGA) est certes un attaquant de toujours, mais il n’aurait sans doute pas signé s’il savait dans quelle galère il allait être envoyé en attaquant de bon matin. L’Espagnol ne rencontre aucune aide et s’offre une petite balade qui a des airs de calvaire sur ces routes du Pays Basque qu’il connaît si bien. L’avantage que lui laisse le peloton flirtant avec les dix minutes est une broutille devant l’ampleur de la tâche qui se présente au plus combatif du Tour de France 2007. Logiquement, après une longue escapade en solitaire, il est repris à 60 kilomètres de l’arrivée, dans la dernière escalade de l’Alto de Jaizkibel.

Autrefois décisive, cette difficulté va davantage peser dans les jambes que sur la course. Elle va montrer qui va perdre cette classique avant de montrer qui pourra la gagner. Philippe Gilbert (BMC Racing Team) et Peter Sagan (Cannondale) ont abandonné, Simon Gerrans (Orica-GreenEdge) recule dangereusement. Voilà pour les enseignements sur les favoris qui restent encore au chaud. En revanche, le temps est venu pour les outsiders de se montrer. Jan Bakelants (Omega Pharma-Quick Step), Alessandro De Marchi (Cannondale), David Lopez (Team Sky), Alberto Losada (Team Katusha), Matteo Montaguti (Ag2r La Mondiale), Laurens Ten Dam (Belkin) et Giovanni Visconti (Movistar Team) auraient d’ailleurs pu piéger les favoris s’ils n’avaient pas été placés à l’avant comme des pions dans cette grande partie d’échecs.

Cette tentative qui n’a jamais véritablement inquiété le peloton permet à la grande bataille entre favoris d’éclater un peu plus tard. Comme prévu, celle-ci a lieu dans le Bordako Tontorra à moins de dix kilomètres de l’arrivée. Le Russe Alexandr Kolobnev déclenche les hostilités et prépare le terrain pour son leader Joaquim Rodriguez (Team Katusha). Le Catalan, fidèle à ses habitudes, sort de sa boîte sur les rampes les plus difficiles de cette nouvelle difficulté où son rapport poids-puissance fait des merveilles. Ils ne sont pas beaucoup à pouvoir tenir son rythme, mis à part Alejandro Valverde (Movistar Team) avec qui il franchit le sommet, et Bauke Mollema (Belkin), Mikel Nieve (Team Sky) et Adam Yates (Orica-GreenEdge) qui recollent dans la longue descente qui mène à la baie de Saint-Sébastien à la faveur d’une mésentente entre les meilleurs ennemis du cyclisme espagnol.

Avec sa pointe de vitesse, le Murcian est le mieux placé pour enlever une seconde Clasica San Sebastian après 2008. Mais à l’image de ce qu’il avait fait à plusieurs reprises sur le Tour de France, il va surprendre ses adversaires dans la dernière descente. La chute d’Adam Yates crée une cassure au sein du groupe. Ces quelques mètres d’avance se transforment rapidement en hectomètres et en bas de la descente, Alejandro Valverde possède une dizaine de secondes d’avance. Il conserve cet avantage sur les trois derniers kilomètres plats comme la main qui permettent de rallier la ligne d’arrivée. La Clasica San Sebastian sert souvent de lot de consolation aux déçus du Tour de France. Cette réputation se confirme aujourd’hui pour l’Espagnol, 4ème de la Grande Boucle après avoir vécu une dernière semaine délicate dans les Pyrénées.

Classement :

1. Alejandro Valverde (ESP, Movistar Team)
2. Bauke Mollema (PBS, Belkin) à 14 sec.
3. Joaquim Rodriguez (ESP, Team Katusha) m.t.
4. Mikel Nieve (ESP, Team Sky) m.t.
5. Tony Gallopin (FRA, Lotto-Belisol) à 26 sec.
6. Jelle Vanendert (BEL, Lotto-Belisol) m.t.
7. Haimar Zubeldia (ESP, Trek Factory Racing) m.t.
8. Greg Van Avermaet (BEL, BMC Racing Team) à 40 sec.
9. Giovanni Visconti (ITA, Movistar Team) m.t.
10. Zdenek Stybar (TCH, Omega Pharma-Quick Step) m.t.