On n’insulte pas comme ça l’intelligence des meilleurs coureurs du monde, que d’aucuns avaient présumé s’être faits berner lundi par les trois attaquants qui avaient échappé d’emblée à leur vigilance. S’il leur aura fallu cinq jours pour effacer des tablettes les noms de Paterski, Rolland et De Clercq, les véritables favoris du Tour de Catalogne ont donc fini par avoir la peau de ceux qui s’étaient permis de défier leur autorité. Paterski trop tendre avait rendu le maillot blanc dès les premières difficultés mercredi, Rolland dans une forme trop précaire a été refroidi par les premiers grands cols de la saison. Ne reste plus qu’à déraciner le tenace Bart De Clercq (Lotto-Soudal), leader du classement général après l’étape-reine, ce qui ne signifie en rien que le plus dur est fait, compte tenu de l’orgueil qui anime les champions qui le talonnent.

On a vu hier comment Tejay Van Garderen (BMC Racing Team) s’en est allé rebondir à la Molina vingt-quatre heures après une malheureuse chute qui a condamné ses ambitions de bien faire au classement général. Et si l’attention se concentre désormais autour de Richie Porte (Team Sky) et ceux qui le suivent directement au classement général, il en est un autre qui a le couteau entre les dents : Alejandro Valverde (Movistar Team). Mercredi, l’Espagnol n’avait pas été invité à la réception de première classe donnée à l’avant par ceux qui occupent précisément les places de choix au classement général. Un accrochage dans l’Alt de Santa Pellaia l’avait écarté trop vite d’une course que ses adversaires se sont empressés d’enflammer aux premières positions. Son acharnement à rentrer sur les leaders lui a permis de limiter les dégâts, 19 secondes à Gérone, mais il en faut plus pour contenter Alejandro Valverde et satisfaire son orgueil.

Entre Alp et Valls (197 km), en descendant des montagnes catalanes, le franchissement de l’Alt de Lilla (4,1 km à 4,8 %) à 10 kilomètres de l’arrivée n’a échappé à personne. Mais une action d’envergure sur cette large montée à trois voies serait téléphonée. En route vers la province de Tarragone, il est un élément qui saute aux yeux de tous… ou presque : le vent. Une première fois, l’alerte retentit à une cinquantaine de kilomètres de l’arrivée, lorsque le peloton hausse l’allure pour rattraper les trois coureurs échappés depuis le kilomètre 50 : Yohan Bagot (Cofidis), Jan Polanc (Lampre-Merida) et Calvin Watson (Trek Factory Racing). Cet avertissement, les favoris le prennent très au sérieux. Ils se massent aussitôt à l’avant du peloton, qui se fractionne soudain au moment où Alejandro Valverde choisi d’appuyer un relais.

A 40 kilomètres de l’arrivée, les meilleurs sont précipités à l’avant. Ils sont au nombre de seize : Aru, Cataldo et Tiralongo (Astana), Atapuma, Theuns et Van Garderen (BMC Racing Team), Lopez, Porte et Roche (Team Sky), Fernandez et Valverde (Movistar Team), Contador (Tinkoff-Saxo), Kelderman (Team LottoNL-Jumbo), Pozzovivo (Ag2r La Mondiale), Uran (Etixx-Quick Step) et Valls (Lampre-Merida). Ni Daniel Martin (Cannondale-Garmin), qui s’était montré trop gourmand en début d’étape en allant chercher une seconde de bonification, ni le porteur du maillot blanc Bart De Clercq, un Flamand à qui les grands favoris font l’affront de donner une leçon en matière de placement sur ce coup de bordure, ne figurent dans le groupe qui s’en va tambour battant chercher la ligne d’arrivée à Valls et les bonifications qui iront aux trois premiers, assurément capitales dans un classement général encore très resserré.

C’est tout juste si l’Alt de Lilla ralentit la progression des hommes de tête, pourtant débarrassés pour de bon d’un retour de leurs poursuivants. Seul un homme va venir rompre le rythme. Et c’est encore Alejandro Valverde ! A un premier démarrage sur les hauteurs de la bosse à 11 kilomètres du but, le Murcian ajoute une accélération décisive à 2 kilomètres de l’arrivée. Décidément intenable, le champion espagnol s’en va gagner sa seconde étape catalane cette semaine. Et si Richie Porte, présent dans le groupe qui lui concède 5 secondes sur la ligne (plus 10 de bonification), hérite du maillot blanc de leader, rien n’est encore fait avant l’étape de Montjuïc dimanche, que l’Australien abordera avec un mince avantage : 5 secondes sur Pozzovivo, 7 sur Contador, 16 sur Valverde revenu dans le jeu, 18 sur Uran.

Demain samedi, ce sont davantage les finisseurs que l’on attendra entre Cervera et Port Aventura (197,7 km).

Classement 5ème étape :

1. Alejandro Valverde (ESP, Movistar Team) les 197 km en 4h25’52 » (44,5 km/h)
2. Rigoberto Uran (COL, Etixx-Quick Step) à 5 sec.
3. Paolo Tiralongo (ITA, Astana) m.t.
4. Richie Porte (AUS, Team Sky) m.t.
5. Fabio Aru (ITA, Astana) m.t.
6. Domenico Pozzovivo (ITA, Ag2r La Mondiale) m.t.
7. Alberto Contador (ESP, Tinkoff-Saxo) m.t.
8. David Lopez (ESP, Team Sky) à 12 sec.
9. Darwin Atapuma (COL, BMC Racing Team) m.t.
10. Tejay Van Garderen (USA, BMC Racing Team) m.t.

Classement général :

1. Richie Porte (AUS, Team Sky) en 22h58’20 »
2. Domenico Pozzovivo (ITA, Ag2r La Mondiale) à 5 sec.
3. Alberto Contador (ESP, Tinkoff-Saxo) à 7 sec.
4. Alejandro Valverde (ESP, Movistar Team) à 16 sec.
5. Rigoberto Uran (COL, Etixx-Quick Step) à 18 sec.
6. Fabio Aru (ITA, Astana) à 27 sec.
7. Darwin Atapuma (COL, BMC Racing Team) à 33 sec.
8. Rafael Valls (ESP, Lampre-Merida) à 43 sec.
9. Wilco Kelderman (PBS, Team LottoNL-Jumbo) à 1’09 »
10. Daniel Martin (IRL, Cannondale-Garmin) à 1’35 »