Que le chemin est long, encore, jusqu’à Paris ! Sans doute plus assez pour faire chanceler un Maillot Jaune qui ne manque pas de solidité, mais pour le suiveur en quête d’action, les quatre jours qui restent jusqu’à la capitale risquent de faire définitivement passer le feuilleton de juillet pour le programme recommandé pour faire la sieste. Il ne s’agit pas de tirer de manière gratuite et bien entendu trop facile sur les acteurs du Tour de France, mais le constat établi depuis plusieurs jours semble immuable. Et on commence à craindre que le massif alpin ne soit pas à même de le contester. Chris Froome (Team Sky), sans s’afficher impérial, paraît inacessible. Ses prestigieux équipiers, surtout, en font une forteresse imprenable. De vrais remparts à l’assaut desquels se heurtent tous les statagèmes. Et qui finissent par user les organismes d’adversaires physiquement diminués. Le Tour, à ce rythme, est plié.

Puisque la grêle tombée sur Arcalis avait refroidi les ardeurs avant que le vent qui décoiffait le Ventoux n’y sème la panique, on pouvait supposer que la canicule qui frappait les Alpes suisses allait embraser la troisième arrivée en altitude du Tour (la quatrième et dernière sera pour vendredi) ! Au lieu de quoi on n’a pas vu grand-chose de plus que les dix-sept jours déjà écoulés depuis le Mont-Saint-Michel. Au moment où l’on reprenait la route pour quatre étapes alpestres toutes aussi savoureuses les unes que les autres, dessinées autour d’un mont Blanc qui n’en perdra pas une miette, une étape intégralement suisse se présentait entre Berne et le barrage de Finhaut-Emosson (184,5 km). Un final encore inexploré par la Grande Boucle, mais déjà emprunté par le Dauphiné il y a deux ans. Ce qui n’a pas forcément laissé un souvenir mémorable à Chris Froome, qui y avait perdu le maillot jaune au lendemain d’une chute en lâchant du terrain à ses principaux adversaires, au premier rang desquels Alberto Contador.

L’Espagnol, blessé dans la Manche, n’est plus du peloton du Tour depuis dix jours déjà, et on se demande bien ce que ce type d’étape aurait insufflé à son audace admirable. Avant de prendre le roi, il convenait de trouver un moyen de faire tomber les fous et les cavaliers qui l’entouraient. Mais personne n’aura trouvé la clé. Si le décor, jusqu’à Martigny-Combe, kilomètre 153, ne s’y prêtait guère, une action pouvait être entreprise dans le col de la Forclaz (13 km à 7,9 %) à l’entame des 30 derniers kilomètres. Mais l’équipe Astana, comme dimanche dans le Grand Colombier, ne trouvait pas mieux que de se substituer au train des Sky. Lesquels Henao, Nieve et Poels faisaient de la patinette dans les roues de Nibali et Rosa, qui finissaient par sauter au pied de la montée finale vers Finhaut-Emosson (10,4 km à 8,4 %) pour laisser la main aux Sky. Suffisamment préservés pour rouler sur tout ce qui bouge.

Romain Bardet désormais 5ème peut encore croire le podium accessible.

Fabio Aru (Astana) n’était pas en mesure de justifier le travail de ses gregarii. Alors c’est encore le vieux Alejandro Valverde (Movistar Team) qui tentait d’initier le mouvement à 5 kilomètres du but… pour en subir presque instantanément le contrecoup. Distancé, l’Espagnol allait finalement lâcher 2’02 » de plus à Chris Froome… et sa place de 5 au général à Romain Bardet (Ag2r La Mondiale), qui continue de gravir les échelons au rythme des défaillances de ses adversaires. Et l’Auvergnat peut encore croire le podium accessible – il en est à 1’22 » –, alors que Bauke Mollema (Trek-Segafredo) 2ème comme Nairo Quintana (Movistar Team) 4ème lui ont concédé du terrain dans le dernier kilomètre d’ascension : 29 secondes pour le Néerlandais (qui rend 40 secondes de plus à Froome), 17 pour le Colombien qui, sauf lendemain de journée de repos difficile, n’est définitivement pas dans un grand Tour. Du moins pas celui qui le verra gagner.

En approchant du barrage, c’est une fois encore Richie Porte (BMC Racing Team) qui aura été le plus efficient, faisant imploser le sélect peloton Maillot Jaune à 2 kilomètres du but pour ne tolérer que le retour de Chris Froome. Le Britannique, en bon gérant, se sera bien gardé d’écraser la concurrence dans cette première étape alpestre, se contentant sur la ligne de gains modestes mais amplement satisfaisants : 8 secondes sur Adam Yates (Orica-BikeExchange), solide 3ème du classement général, 11 secondes sur Romain Bardet, 19 secondes sur Fabio Aru, 28 secondes sur Nairo Quintana et donc 40 secondes sur Bauke Mollema. Des différences qui, dès demain dans le chrono ascendant reliant Sallanches à Megève sur 17 kilomètres (via les côtes de Domancy et des Chozeaux), devraient encore s’accroître.

Si le Tour touche progressivement à sa fin, il ne saurait faire oublier que treize équipes, ce matin, étaient encore sans victoire d’étape. C’était tout l’enjeu d’une échappée lancée au kilomètre 75 par Clement et Pantano (IAM Cycling), Kangert et Lutsenko (Astana), Majka et Sagan (Tinkoff), Durasek (Lampre-Merida), Feillu (Fortuneo-Vital Concept), Gallopin (Lotto-Soudal), Morabito (FDJ), Pozzovivo (Ag2r La Mondiale), Van Avermaet (BMC Racing Team), Voeckler (Direct Energie) et Zakarin (Team Katusha). Et on n’aura pas été loin de revoir les mêmes que dans le Jura dimanche dernier, quand Majka et Pantano se mirent à faire la descente de la Forclaz pour attaquer la montée finale en tête. C’était sans compter une réaction d’Ilnur Zakarin au pied de la dernière escalade. Avant que le Russe ne lâche ses deux adversaires sur une accélération à 6 kilomètres d’un sommet qu’il rejoignait en vainqueur.

Demain jeudi, 17 kilomètres chronométrés attendent les coureurs entre Sallanches et Megève.

Classement 17ème étape :

1. Ilnur Zakarin (RUS, Team Katusha) les 184,5 km en 4h36’33 » (40,0 km/h)
2. Jarlinson Pantano (COL, IAM Cycling) à 55 sec.
3. Rafal Majka (POL, Tinkoff) à 1’26 »
4. Kristijan Durasek (CRO, Lampre-Merida) à 1’32 »
5. Brice Feillu (FRA, Fortuneo-Vital Concept) à 2’33 »
6. Thomas Voeckler (FRA, Direct Energie) à 2’46 »
7. Domenico Pozzovivo (ITA, Ag2r La Mondiale) à 2’50 »
8. Stef Clement (PBS, IAM Cycling) à 2’57 »
9. Steve Morabito (SUI, FDJ) à 4’38 »
10. Richie Porte (AUS, BMC Racing Team) à 7’59 »

Classement général :

1. Chris Froome (GBR, Team Sky) en 77h25’10 »
2. Bauke Mollema (PBS, Trek-Segafredo) à 2’27 »
3. Adam Yates (GBR, Orica-BikeExchange) à 2’53 »
4. Nairo Quintana (COL, Movistar Team) à 3’27 »
5. Romain Bardet (FRA, Ag2r La Mondiale) à 4’15 »
6. Richie Porte (AUS, BMC Racing Team) à 4’27 »
7. Alejandro Valverde (ESP, Movistar Team) à 5’19 »
8. Fabio Aru (ITA, Astana) à 5’35 »
9. Daniel Martin (IRL, Etixx-Quick Step) à 5’50 »
10. Louis Meintjes (AFS, Lampre-Merida) à 6’07 »

Classement par points :

1. Peter Sagan (SVQ, Tinkoff) 425 pt
2. Marcel Kittel (ALL, Etixx-Quick Step) 228 pt
3. Bryan Coquard (FRA, Direct Energie) 156 pt
4. Alexander Kristoff (NOR, Team Katusha) 152 pt
5. Michael Matthews (AUS, Orica-BikeExchange) 143 pt
6. Greg Van Avermaet (BEL, BMC Racing Team) 136 pt
7. André Greipel (ALL, Lotto-Soudal) 128 pt
8. Rafal Majka (POL, Tinkoff) 114 pt
9. Thomas De Gendt (BEL, Lotto-Soudal) 106 pt
10. Daniel Navarro (ESP, Cofidis) 105 pt

Classement de la montagne :

1. Rafal Majka (POL, Tinkoff) 173 pt
2. Thomas De Gendt (BEL, Lotto-Soudal) 90 pt
3. Ilnur Zakarin (RUS, Team Katusha) 78 pt
4. Daniel Navarro (ESP, Cofidis) 69 pt
5. Jarlinson Pantano (COL, IAM Cycling) 63 pt
6. Serge Pauwels (BEL, Dimension Data) 62 pt
7. Tom Dumoulin (PBS, Giant-Alpecin) 58 pt
8. Stef Clement (PBS, IAM Cycling) 53 pt
9. Rui Costa (POR, Lampre-Merida) 50 pt
10. Kristijan Durasek (CRO, Lampre-Merida) 36 pt

Classement des jeunes :

1. Adam Yates (GBR, Orica-GreenEdge) en 77h28’03 »
2. Louis Meintjes (AFS, Lampre-Merida) à 3’14 »
3. Warren Barguil (FRA, Giant-Alpecin) à 30’12 »
4. Emanuel Buchmann (ALL, Bora-Argon 18) à 33’06 »
5. Wilco Kelderman (PBS, Team LottoNL-Jumbo) à 1h03’46 »
6. Julian Alaphilippe (FRA, Etixx-Quick Step) à 1h35’15 »
7. Eduardo Sepulveda (ARG, Fortuneo-Vital Concept) à 1h41’57 »
8. Patrick Konrad (AUT, Bora-Argon 18) à 1h53’19 »
9. Jan Polanc (SLO, Lampre-Merida) à 1h55’45 »
10. Alexey Lutsenko (KAZ, Astana) à 2h12’20 »

Prix de la combativité :

1. Jarlinson Pantano (COL, IAM Cycling)

Classement par équipes :

1. Movistar Team (ESP) en 232h22’54 »
2. Team Sky (GBR) à 2’20 »
3. BMC Racing Team (USA) à 14’48 »
4. Ag2r La Mondiale (FRA) à 38’31 »
5. Astana (KAZ) à 39’38 »
6. Trek-Segafredo (USA) à 1h11’17 »
7. Tinkoff (RUS) à 1h20’45 »
8. Team Katusha (RUS) à 1h31’02 »
9. IAM Cycling (SUI) à 1h32’42 »
10. FDJ (FRA) à 1h43’34 »