A moins de trois semaines du départ du Tour de France, les dirigeants des quatre équipes françaises retenues pour la Grande Boucle entrent dans une phase décisive. Ces prochains jours, il leur faudra édifier l’équipe qu’ils enverront combattre sur les routes du Tour en juillet. Entre choix logiques, choix stratégiques ou choix du cœur, chacun des quatre hauts responsables des équipes nationales nous ont confié leur approche de la sélection. A tour de rôle, Jean-René Bernaudeau (Bbox Bouygues Telecom), Francis Van Londersele (Cofidis), Marc Madiot (Française des Jeux) et Vincent Lavenu (Ag2r La Mondiale) nous expliquent cette semaine sur quels critères ils vont s’appuyer pour dégager de leur effectif les neuf coureurs qui seront du voyage en juillet. Aujourd’hui, c’est au tour de Marc Madiot de nous expliquer sa façon de procéder.

Marc, la sélection d’une équipe pour le Tour de France, est-ce beaucoup de réflexion ?
Ca dépend des années. Des fois, on a du mal à trouver le neuvième coureur de l’équipe qui ira disputer le Tour de France. Et parfois on en a dix ou onze qui sont des candidats sérieux à la sélection, alors il faut en enlever. A vrai dire, les deux cas de figure sont compliqués.

Quel profil aura la sélection 2010 ?
Je ne sais pas encore de quoi sera faite notre équipe. Tout du moins je ne vais pas vous le dire en tout cas (il sourit) !

Que privilégiez-vous dans un effectif de Tour de France ?
Les pays et régions traversées par la course n’ont aucune influence sur le choix des coureurs retenus pour faire le Tour. C’est surtout l’état de forme de mes garçons qui m’importe à un petit mois du Tour de France. Après, j’ai envie de dire que la sélection se fait naturellement.

Entre vos valeurs sûres et les coureurs dans l’expectative, quelle est la proportion ?
Il n’y a pas de proportion.

A quel moment du Tour avez-vous la conviction que le choix a été judicieux ?
Ca, on ne le sait qu’à Paris. Jusqu’au terme du Tour de France, il va toujours y avoir possibilité, pour chacun des coureurs, de faire la perf qui va faire oublier les mauvais passages. La fin de Tour peut sauver un parcours médiocre. Donc ça, on le sait à Paris.

Sélectionner, c’est forcément faire des déçus, comment gérez-vous les coureurs non retenus pour le Tour de France ?
Ca fait partie du jeu. Il n’y a pas deux cas qui se ressemblent. Ca dépend à quel stade de leur carrière se trouvent les garçons, ça dépend de leur niveau. Passé, présent ou supposé futur… Il n’y a pas deux coureurs qui se ressemblent dans ce genre de situation. Il y en a qui le vivent plus ou moins bien. C’est comme ça.

Trouvez-vous que le classement par équipes soit suffisamment mis en valeur sur le Tour et est-ce un élément déterminant dans la sélection de votre effectif ?
Le classement par équipes, on s’y intéresse, surtout quand on sent qu’on est capable de jouer tout près des meilleurs. L’an dernier, on a fini 6ème du classement par équipes. Ca a été un bon niveau d’équipe et si on pouvait refaire la même chose cette année ce serait bien.

Sur le Tour, comment sont réparties les chambres entre les coureurs ?
Ca dépend des années. On a tout fait, on a tout essayé, et je ne suis pas sûr qu’il y ait une meilleure formule qu’une autre. En fait, tout dépend des individus qu’on a. Il n’y a pas de règle. Je crois que ce sont plus les caractères des uns qui se marient avec ceux des autres. Après, vous avez les problèmes de langue. C’est mieux de mettre deux anglo-saxons dans la même chambre, ne serait-ce que pour regarder la télé dans la chambre ! Ce sont des détails mais c’est plus sympathique. Je n’accorde pas une importance extrême à ce genre de truc. On essaie cependant de mettre un ancien avec un plus jeune pour son expérience du Tour. Et puis certains sont optimistes, d’autres pessimistes, donc mieux vaut éviter de mettre deux pessimistes ensemble. Ce sont des trucs comme ça… Tout dépend avec qui on part. Là encore il ne faut pas se mettre des règles trop strictes ou on risque de se planter.

Les laissez-vous faire leurs propres choix ?
Par le passé, j’ai eu Frédéric Guesdon et Christophe Mengin qui faisaient systématiquement chambre ensemble et il n’a jamais été question de remettre ce point en cause. Ils avaient un équilibre dans la chambre. Comme je dis, je ne veux pas avoir à me fixer de règles. Après, on sent ou on ne sent pas des choses. Il y a des affinités et il ne faut pas aller contre, ce serait dommage. Pas la peine de mettre ensemble des coureurs qui n’ont pas les mêmes caractères, les mêmes goûts…

Quand sera donnée la sélection des neuf pour le Tour de France ?
Au soir des Championnats de France si tout est limpide ou le lendemain midi si ça nécessite un peu plus de réflexion.

Propos recueillis à Monteux le 9 juin 2010.