Toute la semaine, Vélo 101 décrypte les enjeux de la 113ème édition de Paris-Roubaix.

Invincible. Alexander Kristoff (Team Katusha) est actuellement dans la forme de sa vie. Avec onze victoires depuis le début de l’année, dont six en l’espace de dix jours. Le Norvégien aborde Paris-Roubaix en pleine confiance, mais aussi avec une énorme pancarte de favori dans le dos. La puissance qu’il a affichée dans les monts pavés du Tour des Flandres pour s’imposer à Audenarde doit être d’autant plus dévastatrice sur les secteurs plats de l’Enfer du Nord. Conscient du statut de grandissime favori qui est le sien, le Scandinave a tenté de se délester de la pression à la suite de sa victoire au GP de l’Escaut.

« Je ne me vois pas comme le grand favori étant donné que je ne m’y suis jamais très bien comporté par le passé (NDLR : 9ème en 2013 au mieux), avance Alexander Kristoff. Je n’ai jamais rejoint le vélodrome dans le groupe de tête et j’ai toujours plus de mal à passer des secteurs pavés plats. » Habile, mais la malchance dont a été victime le vainqueur du Tour des Flandres sur l’Enfer du Nord n’y est sans doute pas étrangère. Victime de deux crevaisons avant la Trouée d’Arenberg, le Norvégien avait abandonné sur chute l’an dernier. Et avant l’édition 2013, le sprinteur de Katusha n’était qu’un anonyme parmi tant d’autres. Seule l’édition 2013 peut donc être source d’indications. Alexander Kristoff avait réglé le sprint d’un premier peloton, 50 secondes derrière le vainqueur, Fabian Cancellara. Pas si loin de la gagne, donc.

Les Flandriennes qui se cherchaient encore un favori la semaine dernière ont trouvé leur roi. Pourtant, ils sont nombreux à vouloir prétendre à régner sur l’Enfer dimanche. A commencer par un homme qui possède un profil similaire à Alexander Kristoff : John Degenkolb (Giant-Alpecin). Sans l’attaque de Niki Terpstra (Etixx-Quick Step) sur l’asphalte à la sortie du dernier secteur, l’Allemand se serait présenté pour la victoire sur le vélodrome l’an dernier, mais avait mis un point d’honneur à régler le sprint pour la 2ème place. Seulement 7ème du Tour des Flandres, le vainqueur de Milan-San Remo s’était dit « satisfait de sa performance », estimant qu’elle lui « donnait confiance pour Roubaix ».

Quid des spécialistes ?

Dans le registre des purs flandriens, nombreux sont les outsiders à vouloir faire échouer les deux sprinteurs. Le plus sérieux d’entre eux n’est autre que le vainqueur sortant Niki Terpstra (Etixx-Quick Step), arrivé avec Kristoff à Audenarde. 3ème du Tour des Flandres dimanche, Greg Van Avermaet (BMC Racing Team) se verrait bien jouer les troubles-fête. « On prévoit un Paris-Roubaix sec, ce qui serait une bonne chose pour moi, affirme le natif de Lokeren. J’ai bien récupéré du Tour des Flandres. Ma forme est là. J’ai toujours souffert dans les derniers kilomètres à Roubaix. C’est une course spéciale où les gros moteurs et les gars plutôt lourds peuvent aller loin. » Si Van Avermaet se réjouit de voir le département du Nord baigné par un franc soleil depuis mardi, Lars Boom (Astana) aurait préféré des conditions plus humides.

Vainqueur sur le Tour à Arenberg sous une pluie diluvienne, le Néerlandais avait tiré profit des qualités qui sont les siennes pour remporter une étape mémorable. « La pratique du cyclo-cross m’a beaucoup avantagé pour remporter cette étape, explique-t-il. J’ai tiré de cette discipline la technique de pilotage du vélo qui me permet de bien rouler en terrain boueux. Un Paris-Roubaix mouillé serait également à mon avantage car j’ai plus de confiance que la plupart des autres coureurs dans ces conditions. Il faut un peu de chance, que je n’ai pas eue jusqu’à présent dans Paris-Roubaix. »

C’est cette chance qui a également manqué à Sep Vanmarcke (Team LottoNL-Jumbo) la semaine dernière sur un Tour des Flandres manqué. Souvent en réussite, le Belge est toujours présent sur les rendez-vous depuis 2012, mais n’a décroché qu’une victoire au Circuit Het Nieuwsblad et de nombreuses places d’honneur. « Le Tour des Flandres ne s’est pas passé comme je l’aurais voulu, note le coureur flamand. J’aurais aimé signer un meilleur résultat. Je dois me rattraper par rapport à dimanche dernier. Je viendrai à Roubaix désireux de bien faire. Il s’agit de ma dernière chance. Je veux répondre sur le vélo et faire tout ce qu’il faudra pour signer un bon résultat. »

Bradley Wiggins, un cas à part ?

De dernière chance, il est surtout question pour Bradley Wiggins (Team Sky) qui terminera son expérience chez Sky dimanche avant de se préparer sur la piste pour les Jeux Olympiques l’an prochain. Le Britannique est une énigme et a bien caché son jeu jusqu’ici. Sa victoire aux Trois Jours de La Panne avait rassuré sur sa condition, mais l’ancien vainqueur du Tour de France est apparu perturbé dimanche dernier. Après une chute au pied de la première escalade du Vieux Quaremont, Bradley Wiggins n’était jamais réapparu aux premières positions du peloton, mais a tout de même terminé à plus de 9 minutes d’Alexander Kristoff. Après une telle performance, tout autre coureur aurait été d’office exclu pour la victoire. Mais l’Anglais a toujours été imprévisible. On le voit mal, qui plus est, terminer sur une mauvaise note sa carrière sur route.

« Gagner Paris-Roubaix serait à mes yeux plus fort que ma victoire au Tour de France, a affirmé le Londonien. Je ne dis pas que ma victoire au Tour n’était pas énorme. Ça l’était. Je pense juste que je l’apprécierais d’autant plus qu’il s’agit d’une course d’un jour de plus de six heures. Roubaix a toujours été un conte de fée. Quand on termine et que l’on a fait une bonne course, on oublie à quel point cela a été dur. »