« Aujourd’hui, ce n’est pas le Tour de France, c’est Paris-Roubaix. » Il suffit d’une phrase, une seule, à Geoff Brown, mécanicien en chef de l’équipe Garmin-Sharp, pour résumer l’approche qui sera faite par toutes les équipes de la cinquième étape du Tour de France. Ypres-Arenberg : neuf secteurs pavés, 15,4 kilomètres de chemins de torture répartis dans les 50 derniers kilomètres. Trois jours après un petit Liège-Bastogne-Liège dans le Yorkshire, c’est l’Enfer du Nord qui s’invite sur le Tour de France.

On ne s’engage pas dans les secteurs pavés à l’improviste. Encore moins sans avoir apporté les ajustements nécessaires aux machines qui devront, en harmonie avec les corps, supporter les soubresauts infernaux des voies cahoteuses. Dès l’arrivée du peloton hier à Lille, les mécanos se sont mis à l’ouvrage pour transformer les vélos en bêtes à combattre l’enfer. Les formations les mieux équipées ont carrément rapatrié le matériel destiné aux classiques. « Nous avons fait venir des Colnago CX Zero du service-course, informe le mécanicien du Team Europcar Mickaël Pichon. Nous serons aujourd’hui en configuration Paris-Roubaix, avec des sections 28 s’il fait mauvais, et des doubles commandes de freins, au guidon, comme en cyclo-cross. »

Le Scott Addict conçu pour les classiques flandriennes fera également son retour à la fois chez Orica-GreenEdge et IAM Cycling. « On passe en mode Roubaix avec des boyaux de 27 et une fouche avant 3 millimètres plus haute pour le passage du boyau et l’évacuation de la boue, annonce Christian Blanchard de IAM Cycling. L’Addict est renforcé au niveau du pédalier et plus souple sur les pavés. Il est moins raide et renvoit moins d’ondes négatives ! » Le mécanicien de l’équipe Orica-GreenEdge Fausto Oppici, lui, préconise des boyaux spéciaux de 28 de section avec double guidoline voire gel absorbant sur le guidon.

Autre spécificité de cette journée spéciale sur les routes du Tour de France, le retour pour un grand nombre d’équipes aux groupes mécaniques, quand désormais tout le peloton ou presque est passé au dérailleur électrique. « Ce retour au dérailleur traditionnel permettra d’éviter que les batteries ne souffrent avec les secousses engendrées par les pavés, estime Bruno Rivière, mécanicien d’Ag2r La Mondiale. Nous allons en outre écarter davantage les freins car d’une section de boyau de 24 nous allons passer en 27. » Même dispositif chez BMC où l’on passera de 25 à 28 sur des jantes de 50 millimètres, « et naturellement avec moins de pression », ajoute Jean-Marc Vandenberghe.

Reste que sur les pavés de l’Enfer tous ne seront pas logés à la même enseigne. Du fait d’un budget moindre que celui d’une grosse structure, l’équipe Bretagne-Séché Environnement conserva ses Kemo quotidiens, comme elle l’avait fait au printemps sur la reine des classiques. « Seules les roues et les boyaux seront différents, précise Nicolas Deshaies. Nous passerons sur des 27 de section avec double guidoline pour l’absorption des chocs, en fonction de la requête des coureurs. »