Une classique quotidienne, voilà donc à quoi se résume le Tour d’Italie, qui par l’intensité de ses affrontements et son incertitude ambiante tient en haleine le tifoso, même lorsque le profil d’une étape ne s’y prête pas particulièrement. Qui aurait imaginé, alors que les attentions se portaient trop précipitamment sur le marathon chronométré de Valdobbiadene samedi, que la deuxième semaine de course expulserait d’emblée Richie Porte (Team Sky) du Top 10, l’écartant pour un temps de la zone de danger. Aux 47 secondes concédées par l’Australien après sa crevaison de l’avant survenue au plus sale moment, à 5 kilomètres de Forli, se sont ajoutées tard dans la soirée, et après des débats animés, les deux minutes de pénalité réglementaires en pareille circonstance puisque Porte a été dépanné par un coureur adverse.

L’Australien, qui bénéficie d’un traitement de faveur – c’est peu de l’écrire – dès sa descente de vélo, faisant bande à part dans son luxueux motor-home pour échapper à d’hypothétiques bactéries et au raffut des hôtels, a donc fini par se retrouver bien seul sur la route. Et c’est tout le Team Sky qui a semblé désemparé face à une situation d’urgence. Il n’y a pourtant pas de raison de polémiquer, surtout pas quant à la décision du jury des commissaires, qui n’a fait que respecter à la lettre un règlement qui autorise les coureurs d’équipes adverses à se rendre de menus services mais les défend de s’échanger du matériel. La solidarité nationale de l’ancien Maillot Rose Simon Clarke (Orica-GreenEdge) envers Richie Porte, qui implorait une nouvelle roue avant tandis que ses coéquipiers faisaient marche arrière, si elle est louable, n’aura pu être tolérée. Ce matin, Richie Porte repart de Forli avec 3’09 » de retard sur Alberto Contador.

Pas d’abattement du côté du leader de Sky, mais pour l’heure la menace de concéder le maillot rose s’éloigne pour Alberto Contador tandis que se précise le duel dont l’Italie rêve pour Fabio Aru. Dans ce climat, il faut encore s’attendre à du mouvement alors que la course rose fait une halte en Emilie-Romage aujourd’hui à l’occasion d’une brève étape Forli-Imola (153 km) en partie dessinée en circuit aux abords du mythique circuit automobile d’Imola. Inutile d’y attendre un Ferrari ou autre sprinteur de la même cylindrée, le tracé en montagnes russes favorise davantage un costaud du genre Ilnur Zakarin (Team Katusha), le jeune vainqueur du Tour de Romandie arrivé passablement émoussé au départ de son premier Grand Tour après un copieux printemps qui l’a vu au préalable prendre la 9ème place du Tour du Pays Basque.

Rigoberto Uran glisse loudement, Alberto Contador plante sa banderille.

Ilnur Zakarin est de ceux qui forment une échappée savoureuse dès le Passio del Trebbio, première difficulté qui se dresse après une vingtaine de kilomètres menés tambour battant. Avec lui sont présents Carlos Betancur et Matteo Montaguti (Ag2r La Mondiale), Ruben Fernandez et Beñat Intxausti (Movistar Team), Ryder Hesjedal (Cannondale-Garmin), Steven Kruijswijk (Team LottoNL-Jumbo), Franco Pellizotti (Androni-Sidermec), Diego Rosa (Astana) et Marek Rutkiewicz (CCC Sprandi Polkowice). Derrière, avant que la pluie ne fasse son apparition, on voit déjà des coureurs partout. Ça sent la bonne pour les dix de tête tandis que les équipes BMC Racing Team – pour Philippe Gilbert – et Orica-GreenEdge – pour Simon Gerrans – finissent par renoncer l’une après l’autre à boucher le trou malgré un retour à 50 secondes à Imola.

La pluie qui tombe abondamment par moments invite à la prudence sur le circuit d’arrivée (trois boucles de 15,4 kilomètres), qui emprunte une partie de l’autodrome et transite par le Tre Monti (4,4 km à 4,2 %). On a vite fait d’aller à la faute, ce que Rigoberto Uran (Etixx-Quick Step) va expérimenter en glissant lourdement juste avant l’entame du dernier tour sur l’asphalte humide d’Imola. Le Colombien rentrera à temps, le côté gauche bien esquinté, mais sa mésaventure pousse à la sagesse. Or voilà bien une attitude qu’Alberto Contador ne daigne pas adopter. Tandis que le peloton en finit avec l’ultime ascension de Tre Monti, 7 kilomètres avant le terme de l’étape, le Maillot Rose se dresse sur les pédales pour planter sa toute première banderille à 200 mètres du haut. Surpris, ni Aru ni Porte ne réagissent au démarrage de Contador, mais l’Espagnol n’a pas fait l’écart et il renonce à insister dans la descente humide.

Ilnur Zakarin, lui, s’est posé moins de questions. Un tour plus tôt, à 23 kilomètres de l’arrivée, le Russe au coup de pédale très « Froomey » a mis à profit la même escalade de Tre Monti pour se défaire des costauds qui l’accompagnaient encore depuis le matin. S’il est hors du coup au classement général, repoussé à plus de quarante minutes, le Russe de 25 ans a suffisamment de ressources pour s’en aller chercher une victoire d’étape au Tour d’Italie dans la foulée de son inattendu succès final dans le Tour de Romandie. Les favoris du Giro, qui nous auront encore donné quelques émotions autour du circuit romagnol d’Imola, sans que les positions ne soient corrigées ce soir, se présentent sur le tarmac une minute plus tard.

Demain jeudi, la douzième étape promet encore de la bagarre entre Imola et Vicenza (190 km).

Classement 11ème étape :

1. Ilnur Zakarin (RUS, Team Katusha) les 153 km en 3h55’08 » (39,0 km/h)
2. Carlos Betancur (COL, Ag2r La Mondiale) à 53 sec.
3. Franco Pellizotti (ITA, Androni Sidermec) m.t.
4. Benat Intxausti (ESP, Movistar Team) m.t.
5. Diego Rosa (ITA, Astana) m.t.
6. Steven Kruijswijk (PBS, Team LottoNL-Jumbo) m.t.
7. Ryder Hesjedal (CAN, Cannondale-Garmin)  m.t.
8. Maciej Paterski (POL, CCC Sprandi Polkowice) à 58 sec.
9. Philippe Gilbert (BEL, BMC Racing Team) m.t.
10. Juan-José Lobato (ESP, Movistar Team) à 1’02 »

Classement général :

1. Alberto Contador (ESP, Tinkoff-Saxo) en 46h54’19 »
2. Fabio Aru (ITA, Astana) à 3 sec.
3. Mikel Landa (ESP, Astana) à 46 sec.
4. Dario Cataldo (ITA, Astana) à 1’16 »
5. Roman Kreuziger (TCH, Tinkoff-Saxo) à 1’46 »
6. Rigoberto Uran (COL, Etixx-Quick Step) à 2’10 »
7. Giovanni Visconti (ITA, Movistar Team) à 2’12 »
8. Damiano Caruso (ITA, BMC Racing Team) à 2’20 »
9. Andrey Amador (CRC, Movistar Team) à 2’24 »
10. Leopold Konig (TCH, Team Sky) à 2’30 »

Classement par points :

1. Nicola Boem (ITA, Bardiani-CSF) 101 pt
2. André Greipel (ALL, Lotto-Soudal) 85 pt
3. Elia Viviani (ITA, Team Sky) 84 pt
4. Giacomo Nizzolo (ITA, Trek Factory Racing) 71 pt
5. Marco Bandiera (ITA, Androni-Sidermec) 60 pt
6. Diego Ulissi (ITA, Lampre-Merida) 50 pt
7. Matteo Busto (ITA, Southeast) 47 pt
8. Alessandro Malaguti (ITA, Nippo-Vini Fantini) 47 pt
9. Juan-José Lobato (ESP, Movistar Team) 41 pt
10. Sacha Modolo (ITA, Lampre-Merida) 41 pt

Classement de la montagne :

1. Beñat Intxausti (ESP, Movistar Team) 52 pt
2. Simon Geschke (ALL, Giant-Alpecin) 50 pt
3. Steven Kruijswijk (PBS, Team LottoNL-Jumbo) 43 pt
4. Carlos Betancur (COL, Ag2r La Mondiale) 41 pt
5. Paolo Tiralongo (ITA, Astana) 23 pt
6. Mikel Landa (ESP, Astana) 19 pt
7. Pavel Kochetkov (RUS, Team Katusha) 15 pt
8. Jan Polanc (SLO, Lampre-Merida) 15 pt
9. Tom-Jelte Slagter (PBS, Cannondale-Garmin) 15 pt
10. Fabio Aru (ITA, Astana) 15 pt

Classement des jeunes :

1. Fabio Aru (ITA, Astana) en 46h54’22 »
2. Davide Formolo (ITA, Cannondale-Garmin) à 2’58 »
3. Esteban Chaves (COL, Orica-GreenEdge) à 27’57 »
4. Jan Polanc (SLO, Lampre-Merida) à 38’28 »
5. Francesco-Manuel Bongiorno (ITA, Bardiani-CSF) à 40’57 »
6. Kenny Elissonde (FRA, FDJ) à 49’21 »
7. Fabio Felline (ITA, Trek Factory Racing) à 58’57 »
8. Michael Matthews (AUS, Orica-GreenEdge) à 1h03’44 »
9. Jesus Herrada (ESP, Movistar Team) à 1h04’06 »
10. Sebastian Henao (COL, Team Sky) à 1h06’27 »

Classement par équipes :

1. Astana (KAZ) en 140h04’02 »
2. BMC Racing Team (USA) à 6’17 »
3. Team Sky (GBR) à 6’31 »
4. Movistar Team (ESP) à 7’11 »
5. Cannondale-Garmin (USA) à 23’28 »
6. Tinkoff-Saxo (RUS) à 25’16 »
7. Lotto-Soudal (BEL) à 52’56 »
8. Team Katusha (RUS) à 59’12 »
9. Bardiani-CSF (ITA) à 1h27’41 »
10. Lampre-Merida (ITA) à 1h33’03 »