François, le Courrier de l’Ouest annonce ce matin que l’organisation le dimanche 20 mars de Cholet-Pays de Loire 2016 est en péril, qu’en est-il ?
Aujourd’hui, nous ne sommes pas en mesure d’organiser Cholet-Pays de Loire 2016. Depuis trois ou quatre ans, il nous est difficile de boucler le budget. Bon an mal an nous sommes arrivés à le faire. Mais notre épreuve a lieu au mois de mars, et les subventions du Conseil régional, du Conseil général et de la Ville ne sont versées qu’en fin d’année, vers le mois d’octobre. Entretemps, il nous faut payer tous nos fournisseurs. Ça génère un déficit et des frais bancaires considérables. Dès lors notre trésorerie n’était pas bonne du tout. Nous avons demandé une aide temporaire de 5000 à 10000 euros à la municipalité de Cholet et à la Communauté d’Agglomération. Mais elle nous a été refusée. Dès lors, en l’état actuel des choses, nous ne pouvons pas organiser l’édition 2016.

Avec 166 000 euros, le budget de Cholet-Pays de Loire est l’un des plus faibles de la Coupe de France. Quelles en sont les sources de financement ?
Le budget est financé à 45 % par l’argent public, dans le détail 37000 euros pour la Ville de Cholet, 20000 pour la Région et 16000 pour le Conseil général. Le reste nous est apporté par des sponsors privés que nous allons chercher. J’ai toujours eu l’espoir d’un soubresaut des élus, d’une aide pour 2016 avant de se mettre autour d’une table pour 2017, mais rien de tout cela ne s’est passé.

Vous vous estimez lâché par la Ville de Cholet ?
Le 17 octobre, j’ai adressé un courrier au maire de Cholet Gilles Bourdouleix. Je lui ai indiqué qu’à ce jour nous n’étions pas en mesure d’organiser l’édition 2016 et j’ai sollicité une aide des élus choletais. Pour seule réponse un mois plus tard on nous a écrit : « nous prenons acte que Cholet-Pays de Loire n’aura pas lieu ». C’est tout. Le président de la Ligue Nationale de Cyclisme Marc Madiot est intervenu lui-même auprès du maire. Il ne pouvait imaginer Gilles Bourdouleix, un élu qui aime le vélo, qui est le beau-frère de Christian Prudhomme et qui souhaite accueillir le Tour de France à Cholet, renoncer à nous soutenir. Or il n’a eu aucune réponse lui non plus.

Aujourd’hui, il vous manque 10000 à 15000 euros pour boucler votre budget…
Mais quand vous n’êtes plus soutenu par la collectivité principale, c’est peine perdue. Nous avons imaginé début juillet un circuit qui nous permettrait de toucher les treize communes de la Communauté d’Agglomération du Choletais. A raison de 1000 euros par commune traversée, un tout petit peu plus pour la Ville de Cholet, nous aurions atteint nos 15000 euros. Tout le monde semblait favorable, et puis soudain plus rien. Plus d’échanges avec les élus. Ça n’a pas été suivi d’effet.

Pourtant, les retombées générées par Cholet-Pays de Loire ne sont pas anodines au début du printemps ?
Il est toujours difficile de mesurer les retombées, mais avec les 1000 participants de la cyclo du samedi, l’épreuve féminine et la Classic Loire-Atlantique organisée la veille de Cholet-Pays de Loire, les hôtels étaient complets dès le jeudi soir sur tout le Choletais. Nous faisions travailler les hôtels, les restaurants, les imprimeurs… Si c’est difficile à chiffrer, il est sûr qu’un tel événement a un poids économiquement. C’est pourquoi nous sommes surpris de n’avoir pas eu davantage d’écoute des élus.

Quid des sponsors privés ?
Nos sponsors actuels nous suivent, mais Cholet reste une petite ville dans laquelle il y a pléthores de sports entre le basket, le rugby, le foot et le hockey sur glace, que saupoudrent déjà les sponsors. Les gros sponsors sont attirés par ces disciplines qui leur offrent une visibilité à l’année, quand notre événement se dispute sur une journée. Nous sommes plus proches de l’événementiel que du sport. Cela nous empêche à Cholet de suivre le modèle de Roland Montenat, qui avec Adélie organise à Vitré la Route Adélie.

En marge de Cholet-Pays de Loire, vous deviez recevoir une étape de l’UCI Women’s WorldTour. C’est donc une double peine ?
L’épreuve féminine que nous organisons depuis 2004 a eu l’opportunité de rejoindre l’UCI Women’s WorldTour. Ça nous aurait peut-être permis de nous en sortir. Nous remplissions le cahier des charges de l’UCI, c’était pour nous la cerise sur le gâteau, et financièrement ça ne nous coûtait pas plus cher ! Nous étions prêts mais nous n’avons pas été soutenus du tout. Il y a de quoi être démoralisé quand vos propres élus s’affichent joyeusement sur le podium le soir de l’épreuve pour faire l’apologie du vélo devant un large public, et que le lendemain vous n’êtes plus soutenu quand il s’agit de parler argent.

Quel est votre état d’esprit aujourd’hui ?
Je suis amer et dégoûté. Mais on ne nous laisse pas le choix. Ça m’embête pour tous les bénévoles qui ont travaillé depuis près de quarante ans pour Cholet-Pays de Loire, ça m’embête pour nos partenaires. Mais nous n’avons rien à nous reprocher. Nous ne sommes que des bénévoles, nous prenons beaucoup de risques à tous les niveaux, et financièrement nous avions atteint une limite. Les membres du comité d’organisation, qui portent haut le fleuron de la Ville de Cholet, ont déploré que de l’autre côté aucun effort ne soit fait. Nous n’avons jamais baissé les bras mais depuis quinze jours la moitié de mon comité se demande à quoi bon se battre. Je ne suis pas en colère mais aujourd’hui je suis amer, déçu et démoralisé de voir s’arrêter ainsi tout ce que nous avions monté.

Vous êtes jusque fin décembre président de l’Amicale du Grand-Ouest des Organisateurs Cyclistes (AGOOC). Comment se présente l’avenir pour les autres organisations ?
Pour des épreuves organisées par des bénévoles comme nous, l’avenir est sombre. Je sais que d’autres de mes collègues ont des difficultés. Je ne le souhaite pas mais malheureusement d’autres épreuves s’arrêteront après nous. Nous allons vers cela. On sait aussi que notre disparition va causer du tort à la Classic Loire-Atlantique de Jean-Luc Chaillot. Avec une course au lieu de deux, les équipes Continentales Pros étrangères feront-elles le déplacement ? Ce n’est pas sûr. Pour continuer, des épreuves comme les nôtres devront trouver à se faire financer à presque 100 % par des partenaires privés.

Si l’édition 2016 de Cholet-Pays de Loire n’aura pas lieu, vous sentez-vous de réfléchir à une nouvelle formule en 2017 ?
Pourquoi pas. Si on a pris un bon coup sur la tête, j’ai toujours la flamme au fond de moi. Et j’estime encore une fois que nous n’avons rien à nous reprocher. On peut imaginer d’autres modes de financement, voire même imaginer de déplacer l’épreuve géographiquement. Je pense à l’Anjou et une agglomération comme celle d’Angers, qui hormis le Circuit de la Sarthe ne possède pas d’épreuve internationale. Je reste un passionné du vélo et de l’organisation.

Propos recueillis le 4 décembre 2015.