Laurent, que s’est-il passé pour Sylvain Chavanel dans le contre-la-montre des Jeux Olympiques ?
Ce n’était pas sa meilleure journée. Ses premiers coups de pédales jusqu’au premier pointage ont montré qu’il n’était pas aussi fort que sur le Tour de France. Après 8 kilomètres de course, il était 11ème à 22 secondes du temps de référence. C’était déjà mal embarqué pour une médaille. Ensuite, on n’a pas très bien compris. Il s’est arrêté au 20ème kilomètre en nous indiquant qu’il avait un problème avec son vélo et qu’il fallait qu’il en change.

Qu’y avait-il ?
On a fait le point après l’arrivée. Et effectivement une pièce avait cassé au niveau de l’axe de la roue arrière. Elle touchait des deux côtés du cadre. Forcément, pour pédaler, ça a dû pas mal le gêner. Il n’avait pas besoin de ça. En plus, Christopher Froome venait de le passer avant qu’il ne change de vélo. Là il a pris un gros coup au moral, plus rien n’allait et c’est devenu la catastrophe jusqu’à la ligne. Ça a été très long pour aller jusqu’au bout.

29ème, c’est une grosse déception quand on pouvait penser le Top 5 à sa portée…
C’est ce qu’il avait fait ces derniers temps, mais à l’évidence il n’était pas aussi fort à Londres qu’au Dauphiné et sur le Tour, où il avait terminé 5ème des contre-la-montre. Il a quitté le Tour pour se soigner puis affirmé que ses sensations étaient bonnes. C’est décevant.

Sylvain Chavanel avait pris la bonne échappée samedi, c’était pourtant un signe encourageant ?
Moi je fais confiance au coureur. Quand il me dit qu’il est bien et qu’il a de bonnes jambes, je ne vois pas pourquoi je devrais penser le contraire. Aujourd’hui, c’est le chrono qui parle. Je ne fais qu’analyser et interpréter les performances, et autant dire que cette fois il n’était pas du tout dans l’allure.

Est-ce à dire que vous regrettez sa sélection ?
Non, non, aucunement. Qui d’autre pouvait prétendre à cette place sur le contre-la-montre que Chavanel ? C’est dommage qu’il n’ait pas changé de vélo plus vite, ça lui aurait permis de se relancer plus tôt dans la course, mais de toute façon il n’y a pas trop de regrets à avoir pour ce qui est de sa performance. Sa place de 11 au premier pointage, sans incident, aurait certainement été la même à l’arrivée. Entre la 8ème et la 12ème place, c’était à peu près son niveau aujourd’hui.

Les regrets, c’est sur la course en ligne que vous les formulez ?
Oui car nous aurions pu espérer un meilleur résultat. Nous n’avons pas été très chanceux, Alexandre Vinokourov a été très en réussite, les Britannique très malchanceux. C’est le lot des courses d’un jour. Plus que des regrets, ça a été une déception. Et après le chrono elle l’est davantage car le résultat est vraiment mauvais.

Avec quatre coureurs « disponibles » samedi, puisqu’on rappelle que Mickaël Bourgain a logiquement bâché après le départ, y avait-il quelque chose de mieux à faire ?
Le sprinteur, on l’avait. S’il y avait eu un quatrième homme, ça aurait été un homme d’attaque pour nous représenter devant. Ça aurait été Thomas Voeckler. Et un Voeckler en forme, il aurait été dans le groupe de tête. Après, qu’aurait-il pu faire, ça reste aléatoire.

Qu’est-ce qui a manqué à l’équipe de France pour être davantage à la hauteur ?
Je suis le sélectionneur, donc sur le devant de la scène quand celui qui pédale est déjà reparti chez lui. C’est mon rôle et je l’assume. Ce qu’il faut savoir c’est qu’on met nos coureurs dans les meilleures dispositions pour qu’ils fassent ce qu’ils ont de mieux à faire. Une fois que la course est lancée, on n’a plus moyen d’intervenir. Les consignes ont été passées comme il faut. Après, est-ce que les jambes n’ont pas permis de faire mieux, est-ce qu’il a manqué d’inspiration, on peut tout imaginer. Mais je ne peux pas être tenu responsable de tout ce qui s’est passé, ce serait injuste.

La bonne note, c’est que les jeunes ont répondu présent ?
Je pense en effet qu’il y a une belle génération qui arrive. Les filles en sont l’exemple. Elles ont eu de meilleurs résultats que les hommes et c’est d’ailleurs très bien pour elles. Et puis de jeunes coureurs français vont progressivement pousser les anciens vers la sortie et prendre leur place. On est justement dans cette période de passation de pouvoir, ça se fera progressivement.

Pour les Championnats du Monde ?
Jusqu’ici je suis resté concentré sur les Jeux et on n’a pas encore réfléchi à tout ça. Mais peut-être.

Propos recueillis à Londres le 1er août 2012.