Yvon, vous sortez d’un Tour de France marqué par la victoire d’étape d’Alejandro Valverde, mais aussi par la déception Juan-José Cobo. Comment jugez-vous cette contre-performance ?
Juanjo, on le connaît un peu et on sait qu’il ne faut pas lui mettre la pression. Il faut le laisser venir gentiment. On a vu quand même dans la dernière semaine de Tour qu’il commençait à pointer son bout du nez en allant dans certaines échappées. Mais je dirai que c’est de bon augure pour la Vuelta, et qu’à la Vuelta on risque d’en parler un peu plus.

De l’intérieur, comment avez-vous vécu ce Tour de France que l’on a dit un peu morose du fait de la mainmise du Team Sky ?
De l’intérieur, c’est sûr que Froome et Wiggins ont montré qu’ils étaient les plus forts. Mais après on a vu aussi que dans le top 10 ça se battait pour conserver leurs places, c’était important pour eux. Quand on voit que l’on ne peut pas rivaliser pour la gagne, on essaie de garder sa 3ème,4ème ou 5ème place voire même sa 10ème. C’était un scénario plutôt classique qui aurait pu être chamboulé si on avait eu un Froome ou un Wiggins défaillant.  Mais ça n’a pas été le cas.

Quelles sont les bonnes surprises de ce Tour de France pour vous ?
En tant que français c’est évident que Thibaut Pinot est une excellente surprise. Personne ne le voyait terminer dans le top 10. Et puis il montre qu’il pourra faire bien mieux à l’avenir. Sinon après il n’y a pas eu beaucoup de surprises. La victoire de Wiggins était prévue, et il a tenu son rang. La petite déception c’est forcément Cadel Evans. Mais bon on ne peut pas lui retirer le mérite, il a tenté. S’il avait suivi il serait peut être allé chercher le podium.

Si on se projette un an dans le futur, comment anticipez-vous la 100ème édition du Tour de France ?
Déjà, l’an prochain on aura des coureurs qui arriveront encore un peu plus à maturité. On a vu que Rui Costa a beaucoup gagné en maturité cette année. Alejandro Valverde a besoin d’engranger de la compétition. Donc on attendra beaucoup de ces deux garçons, ainsi que des jeunes coureurs que l’on verra peut-être sur le Tour. Je pense à Nairo Quintana notamment. On adaptera aussi l’équipe en fonction du parcours proposé.

Nairo-Alexander Quintana est annoncé comme un futur très grand du cyclisme. Est-il possible de le voir au départ du Tour 2013 ?
C’est possible car il risque d’être au départ de la Vuelta cette année. Donc s’il fait la Vuelta, il peut faire le Tour l’an prochain. C’est un garçon intelligent, on peut le voir au départ du Tour mais tout dépendra du parcours proposé. C’est un jeune grimpeur, on ne peut pas le mettre sur le Tour s’il n’y a pas d’étapes très dures qui arrivent au sommet.

Justement, pour redynamiser un peu la Grande Boucle, on évoque l’idée de restaurer des bonifications aux arrivées ou bien aux sommets des cols. Etes-vous favorable à une telle proposition ?
On a vu qu’au final ça ne change pas chose… Bonifs ou pas bonifs… En haut des cols ou pas en haut des cols… Je pense qu’il faut trouver le meilleur compromis possible pour faire en sorte que les grimpeurs puissent s’exprimer. Mais il en faut pour tout le monde. Les sprinteurs aussi doivent pouvoir s’exprimer. Cette année, ASO a préparé un parcours avec moins d’arrivées au sommet mais il y avait moyen de faire la course. C’est assez équilibré et ça le restera l’année prochaine.

Autre mesure que nous vous proposons : réduire le nombre de coureurs par équipes. Huit par exemple au lieu de neuf. Votre avis là-dessus ?
Oui et qu’est-ce que l’on fait après pour défendre un maillot ? On va encore parler de coalitions entre les équipes… Ce sont des choses dont il faut parler entre les organisateurs concernés et toutes les équipes pour voir ce qu’il en ressort. Mais pour moi 9 coureurs c’est bien. Réduire le peloton en croyant que ce sera moins dangereux ce n’est pas vrai.

Afin de rendre les étapes plus nerveuses et mouvementées on parle de réduire le kilométrage des étapes de montagne notamment. Quel est votre sentiment sur ça ?
Après je pense qu’une longue étape de montagne il faut en avoir une de temps en temps. Ca fait aussi partie de l’histoire. On peut avoir un vainqueur comme on en avait auparavant avec par exemple un Thierry Marie qui partait de loin. C’est aussi joli que de voir une arrivée au sprint ! Un garçon qui va faire 200 km tout seul c’est beau ! Donc il faut forcément une étape longue. Mais en avoir plusieurs je ne pense pas que cela serve à grand-chose en terme de spectacle. On voit que sur des étapes de 150 km on a des fois davantage de spectacle que sur celles de 200 km.

Propos recueillis à Paris le 22 juillet 2012.