C’était un vieux rêve. Régulièrement escaladé par le Tour d’Espagne puisqu’idéalement placé aux portes de Madrid, le Puerto de Navacerrada recelait une ascension encore plus spectaculaire, celle menant à la Bola del Mundo. Drôle d’appellation pour ce col, de son vrai nom Alto de Guarramillas, et qui a été rebaptisé du nom d’un programme télévisé au moment de l’installation en son sommet de trois antennes. Ce sommet, l’organisation de la Vuelta rêvait de l’atteindre un jour. La Bola del Mundo prolonge en fait la montée du Puerto de Navacerrada via une route en béton extrêmement pentue : 3,2 kilomètres à 12,1 %. En présentant ce col inédit en toute fin de programme, les Espagnols réalisaient enfin leur vieux rêve, lequel en entraînait un autre, celui de voir la Bola del Mundo tenir son rôle de juge de paix et livrer le nom du lauréat de la Vuelta.

Pour sa première apparition sur le parcours du Tour d’Espagne, le col perché à 2247 mètres d’altitude va effectivement jouer un rôle déterminant. On sait désormais que le Tour d’Espagne va se jouer entre Vincenzo Nibali (Liquigas-Doimo) et Ezequiel Mosquera (Xacobeo-Galicia). Ce sont 50 secondes qui séparent les deux duellistes au départ de San Martin de Valdeiglesias, or plusieurs éléments prônent en faveur d’un somptueux final. D’abord il y a des secondes de bonification à aller chercher à l’arrivée donc la possibilité pour Mosquera de renverser Nibali sans avoir à lui reprendre 50 secondes sur le terrain. Ensuite l’Espagnol a toujours précédé l’Italien dans les arrivées en altitude, même s’il ne lui a jamais repris plus de 19 secondes. Enfin ce sont à des favoris décomplexés que l’on a affaire dans ce Tour d’Espagne. Il est donc clair qu’ils se dépouilleront une dernière fois aujourd’hui, sans relâche jusqu’à la ligne d’arrivée.

Autour de cet affrontement final, il y a d’autres enjeux ! David Moncoutié (Cofidis) joue son entrée dans l’Histoire de la Vuelta. Pour la troisième fois de suite, il s’apprête à ramener à Madrid le maillot de meilleur grimpeur. Vigilant d’un bout à l’autre de cette étape de 172,1 kilomètres, le Lotois va parvenir à préserver son bien. Il sera le premier, demain, à remporter trois fois le classement de la montagne du Tour d’Espagne. C’était son objectif de l’année et il est accompli, chapeau ! En toile de fond également se dispute le classement par équipes entre le Team Katusha et la Caisse d’Epargne, qui placent chacun des hommes dans l’échappée de dix-huit coureurs qui se construit après 17 kilomètres avec Arroyo, Bakelandts, Cesar-Veloso, Cheula, Cuesta, Gallopin, Gilbert, Gusev, Hondo, Hoste, Jérôme, Kadri, Oroz, Péraud, Plaza, Siutsou, Tschopp et Toribio.

Ezequiel Mosquera et Vincenzo Nibali s’engagent ensemble sur la route bétonnée.

Il n’y aura pourtant pas de places pour les attaquants matinaux aujourd’hui. Les bonifications mises en jeu à l’arrivée ayant beaucoup trop d’importance, le peloton n’accorde pas plus de 4’50 » au large groupe de tête. Si Mosquera se présente au sommet en vainqueur et que Nibali ne termine pas aux deux places suivantes, 30 secondes doivent lui suffire pour remporter la Vuelta. Alors son équipe Xacobeo-Galicia œuvre derrière les hommes de tête, qui vont finalement être rejoints les uns après les autres dans la longue ascension de la Bola del Mundo. Tout concorde pour que la course se termine en apothéose. Et il va bel et bien y avoir de l’engagement sur les dernières pentes du Tour d’Espagne. La bataille royale est déclenchée à 4500 mètres du but par Frank Schleck (Team Saxo Bank). Ezequiel Mosquera répond, Vincenzo Nibali dans sa roue. Et c’est parti pour 4 derniers kilomètres palpitants… et très indécis !

Ezequiel Mosquera prend donc ses responsabilités. Son attaque à 3,8 kilomètres du but prend davantage la forme d’une grosse accélération à laquelle n’essaie même pas de réagir Vincenzo Nibali, plus concentré sur son propre coup de pédale, qu’il veut avant tout régulier et sans à-coups. Sans s’affoler, le porteur du Maillot Rouge rentre ainsi à la pédale sur son challenger avant que les deux ne s’engagent sur les sentes bétonnées qui achèveront de les départager. Ces deux-là sont donc bien les meilleurs de la Vuelta, mais dans des styles radicalement opposés. Mosquera a l’allure aérienne du grimpeur en danseuse, Nibali roule assis, affaissé sur son guidon, dans un style beaucoup plus heurté. Et voilà que l’Espagnol reprend du terrain, à la régulière, porté par la foule. Dans son dos, l’Italien lutte mais ne perd pas de vue son rival.

Les 2800 derniers mètres d’ascension se déroulent ainsi dans cette configuration, Mosquera s’arrachant pour reprendre seconde après seconde à son adversaire. On commence à jongler avec les chiffres, à décompter le temps que l’Espagnol doit encore aller chercher, mais Nibali lui offre à distance une sacrée résistance. Bien que Mosquera parvienne à faire grimper son avance à 18 secondes, il fléchit dans le final tandis que Nibali lâche ses dernières forces pour progressivement boucher le trou. Et finalement, le Maillot Rouge vient recoller à la roue arrière de Mosquera à 100 mètres de la ligne d’arrivée, que le Galicien franchit en vainqueur épuisé devant Vincenzo Nibali, auteur d’un retour éblouissant qui le rend digne d’inscrire demain soir son nom au palmarès du Tour d’Espagne. Car cette fois c’est dit, c’est lui qui remportera la 75ème édition de la Vuelta demain soir, devant Ezequiel Mosquera et Peter Velits.

Demain dimanche, la vingt-et-unième étape du Tour d’Espagne se déroulera San Sebastian de los Reyes et Madrid (85 km).
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Classement 20ème étape :

1. Ezequiel Mosquera (ESP, Xacobeo-Galicia) les 172,1 km en 4h45’28 »
2. Vincenzo Nibali (ITA, Liquigas-Doimo) à 1 sec.
3. Joaquin Rodriguez (ESP, Team Katusha) à 23 sec.
4. Frank Schleck (LUX, Team Saxo Bank) à 35 sec.
5. Xavier Tondo (ESP, Cervélo TestTeam) à 39 sec.
6. Nicolas Roche (IRL, Ag2r La Mondiale) à 42 sec.
7. Mikel Nieve (ESP, Euskaltel-Euskadi) à 50 sec.
8. Peter Velits (SVQ, Team HTC-Columbia) à 52 sec.
9. Christophe Le Mével (FRA, FDJ) à 55 sec.
10. Rémy Di Gregorio (FRA, FDJ) à 1’00 »
Classement complet

Classement général :

1. Vincenzo Nibali (ITA, Liquigas-Doimo) en 85h16’05 »
2. Ezequiel Mosquera (ESP, Xacobeo-Galicia) à 41 sec.
3. Peter Velits (SVQ, Team HTC-Columbia) à 3’02 »
4. Joaquin Rodriguez (ESP, Team Katusha) à 4’20 »
5. Frank Schleck (LUX, Team Saxo Bank) à 4’43 »
6. Xavier Tondo (ESP, Cervélo TestTeam) à 4’52 »
7. Nicolas Roche (IRL, Ag2r La Mondiale) à 5’03 »
8. Carlos Sastre (ESP, Cervélo TestTeam) à 6’06 »
9. Tom Danielson (USA, Garmin-Transitions) à 6’09 »
10. Luis-Leon Sanchez (ESP, Caisse d’Epargne) à 7’35 »
Classement complet

Classement par points :

1. Mark Cavendish (GBR, Team HTC-Columbia) 136 pt
2. Tyler Farrar (USA, Garmin-Transitions) 124 pt
3. Vincenzo Nibali (ITA, Liquigas-Doimo) 119 pt
4. Joaquin Rodriguez (ESP, Team Katusha) 110 pt
5. Philippe Gilbert (BEL, Omega Pharma-Lotto) 104 pt
6. Ezequiel Mosquera (ESP, Xacobeo-Galicia) 97 pt
7. Peter Velits (SVQ, Team HTC-Columbia) 88 pt
8. David Moncoutié (FRA, Cofidis) 72 pt
9. Nicolas Roche (IRL, Ag2r La Mondiale) 63 pt
10. Frank Schleck (LUX, Team Saxo Bank) 62 pt

Classement de la montagne :

1. David Moncoutié (FRA, Cofidis) 51 pt
2. Serafin Martinez (ESP, Xacobeo-Galicia) 43 pt
3. Ezequiel Mosquera (ESP, Xacobeo-Galicia) 36 pt
4. Joaquin Rodriguez (ESP, Team Katusha) 29 pt
5. Vincenzo Nibali (ITA, Liquigas-Doimo) 26 pt
6. Luis-Leon Sanchez (ESP, Caisse d’Epargne) 25 pt
7. Gonzalo Rabuñal (ESP, Xacobeo-Galicia) 25 pt
8. Mikel Nieve (ESP, Euskaltel-Euskadi) 21 pt
9. Johann Tschopp (SUI, Bbox Bouygues Telecom) 18 pt
10. Frank Schleck (LUX, Team Saxo Bank) 17 pt

Classement par équipes :

1. Team Katusha (RUS) en 255h40’44 »
2. Caisse d’Epargne (ESP) à 29 sec.
3. Xacobeo-Galicia (ESP) à 12’13 »
4. Cervélo TestTeam (SUI) à 17’39 »
5. Ag2r La Mondiale (FRA) à 35’35 »
6. Liquigas-Doimo (ITA) à 57’05 »
7. Omega Pharma-Lotto (BEL) à 1h07’41 »
8. Euskaltel-Euskadi (ESP) à 1h11’34 »
9. FDJ (FRA) à 1h13’06 »
10. Team Saxo Bank (DAN) à 1h17’38 »