Même s’il se souviendra longtemps de l’accueil qui lui a été fait aux Pays-Bas pour son troisième lancement au plat pays, c’est à son retour sur ses terres que le Giro retrouve son charme si pittoresque. Voilà donc la course rose chez elle, tout en bas de la botte italienne, qu’elle va entreprendre de remonter tout au long de la semaine par les Apennins, son épine dorsale, avant d’aller se nicher sur les hauteurs vertigineuses des Dolomites (en deuxième semaine) puis des Alpes (en troisième semaine). Mais on n’attendra pas les plus hauts massifs pour relever du mouvement dans une course qui, tout au long de cette première semaine, présentera des parcours savoureusement techniques, prompts à faire déjà bouger les lignes parmi les favoris.

Les premiers coups de pédales sous le soleil italien, de Catanzaro à Praia a Mare, sur un bout droit de 200 kilomètres tracé entre le littoral tyrrhénien à main gauche, les montagnes calabraises à main droite, avaient aujourd’hui un petit air de Milan-San Remo. La distance en moins. Du plat en apparence mais quelques difficultés bien musclées et un final jonché de petites bosses dont la dernière, à 8,7 kilomètres de l’arrivée, pouvait prétendre tenir le rôle d’un Poggio. Ce n’était à l’évidence pas le genre de terrain qu’allait affectionner Marcel Kittel (Etixx-Quick Step), lui qui s’est toujours défilé quand venait l’heure de la classicissima à laquelle il n’a encore jamais pris part. S’il a largement dominé les débats au cours des deux premières occasions qui se sont offertes à lui, au point qu’on ne lui trouve pas, pour l’heure, d’adversaire en cas d’arrivée massive, l’Allemand avait tout d’un Maillot Rose éphémère en cette reprise italienne.

Pourtant, toute la journée, Marcel Kittel aura tâché d’y croire. Il avait tenu bon la première fois que la course avait quitté le littoral pour s’en aller chercher le village perché de Bonifati (6,5 km à 5,9 %), et quand bien même il avait lâché prise – avec l’ensemble des sprinteurs, le vainqueur de Milan-San Remo Arnaud Démare (FDJ) compris – dans l’ascension de San Pietro (5,3 km à 6,8 %), il parvenait à rentrer au bas d’une descente technique. Mais tout restait alors à faire. Car l’échappée du matin menée depuis le kilomètre 15 par Nicola Boem (Bardiani-CSF), Matthias Brändle (IAM Cycling), Matej Mohoric (Lampre-Merida) et Joey Rosskopf (BMC Racing Team) avait capitulé dans la montée vers San Pietro à 50 kilomètres de l’arrivée. Et les obstacles à exploiter étaient encore en nombre suffisant pour provoquer une course de mouvement qui mettrait fin définitivement aux prétentions des sprinteurs.

Tom Dumoulin bien parti pour parader en rose une partie de la semaine.

Ce sont les Français Guillaume Bonnafond et Axel Domont (Ag2r La Mondiale) qui ouvraient les hostilités à 35 kilomètres de l’arrivée. Les deux complices profitaient d’un léger flottement pour porter ensemble leurs couleurs uniformes sur le devant de la scène. Mais leur action en suscitait d’autres jusqu’à la constitution, à 16 kilomètres de l’arrivée, d’un groupe de treize unités avec Conti et Ulissi (Lampre-Merida), Busato (Wilier Triestina-Southeast), Cunego (Nippo-Vini Fantini), De Marchi (BMC Racing Team), Domont (Ag2r La Mondiale), Kochetkov (Team Katusha), Lopez (Team Sky), McCarthy (Tinkoff), Pirazzi (Bardiani-CSF), Preidler (Giant-Alpecin), Serry (Etixx-Quick Step) et Wellens (Lotto-Soudal). Ces gars-là gardaient une demi-minute d’avance sur le peloton à l’entrée de Praia a Mare, au moment où la route s’engageait dans la dernière difficulté : une côte de 1800 mètres à 7,7 %.

C’était le parfait tremplin dont pouvait rêver Diego Ulissi. A 26 ans, le Toscan aux multiples victoires d’étapes (Tirano 2011, Viggiano et Montecopiolo 2014, Fiuggi 2015) était en passe de récidiver et d’offrir à l’Italie, au retour du Giro sur ses terres, sa première victoire sur cette 99ème édition. En costaud, Diego Ulissi se débarrassait de ses derniers compagnons de fugue, que le peloton – bientôt résumé à une petite trentaine d’hommes – reprenait un à un. Pour le paquet des favoris, il n’en restait qu’un à aller chercher en redescendant sur Praia a Mare. Mais même en point de mire sur le rivage thyrrénien, le porteur du dossard 100 ne coinçait pas. Fort d’une solide expérience et d’un gros physique, Diego Ulissi parvenait en vainqueur sur la ligne d’arrivée, quelques secondes seulement devant un peloton réglé par un certain Tom Dumoulin (Giant-Alpecin), qui n’avait pas échappé que le maillot rose auquel il avait goûté deux jours la semaine dernière allait à nouveau lui revenir.

Du mince peloton des favoris qui franchissait la ligne derrière Dumoulin, il n’en manquait aucun. Aucun sauf le dernier des deux Français dont on pouvait espérer un résultat au classement général. Quand Jean-Christophe Péraud (Ag2r La Mondiale) avait laissé ses illusions dimanche, sur une route des Pays-Bas, Alexandre Geniez (FDJ) était définitivement out. Touché au poignet dans une première chute dimanche, il était à son tour contraint à l’abandon sur un nouvel accrochage. Si ça commence mal pour les Français, il semble en tout cas que ce soit bien parti pour voir Tom Dumoulin parader en rose une partie de la semaine, peut-être même jusqu’au chrono dans le Chianti dimanche, s’il passe bien le premier sommet à Roccaraso jeudi. On verra alors jusqu’où le rouleur néerlandais porte ses ambitions au classement général, lui dont l’obsession se porte sur le chrono des Jeux.

Demain mercredi, la cinquième étape reliera Praia a Mare à Bénévent (233 km).

Classement 4ème étape :

1. Diego Ulissi (ITA, Lampre-Merida) les 200 km en 4h46’51 » (41,8 km/h)
2. Tom Dumoulin (PBS, Giant-Alpecin) à 5 sec.
3. Steven Kruijswijk (PBS, Team LottoNL-Jumbo) m.t.
4. Alejandro Valverde (ESP, Movistar Team) à 6 sec.
5. Gianluca Brambilla (ITA, Etixx-Quick Step) m.t.
6. Vincenzo Nibali (ITA, Astana) m.t.
7. Ilnur Zakarin (RUS, Team Katusha) m.t.
8. Matteo Busato (ITA, Wilier Triestina-Southeast) m.t.
9. Esteban Chaves (COL, Orica-GreenEdge) m.t.
10. Nicolas Roche (IRL, Team Sky) m.t.

Classement général :

1. Tom Dumoulin (PBS, Giant-Alpecin) en 14h00’09 »
2. Bob Jungels (LUX, Etixx-Quick Step) à 20 sec.
3. Diego Ulissi (ITA, Lampre-Merida) m.t.
4. Steven Kruijswijk (PBS, Team LottoNL-Jumbo) à 24 sec.
5. Georg Preidler (AUT, Giant-Alpecin) m.t.
6. Vincenzo Nibali (ITA, Astana) à 26 sec.
7. Alejandro Valverde (ESP, Movistar Team) à 31 sec.
8. Jakob Fuglsang (DAN, Astana) à 35 sec.
9. Nicolas Roche (IRL, Team Sky) à 37 sec.
10. Esteban Chaves (COL, Orica-GreenEdge) m.t.

Classement par points :

1. Marcel Kittel (ALL, Etixx-Quick Step) 106 pt
2. Maarten Tjallingii (PBS, Team LottoNL-Jumbo) 80 pt
3. Elia Viviani (ITA, Team Sky) 53 pt
4. Diego Ulissi (ITA, Lampre-Merida) 50 pt
5. Tom Dumoulin (PBS, Giant-Alpecin) 50 pt
6. Giacomo Berlato (ITA, Nippo-Vini Fantini) 44 pt
7. Giacomo Nizzolo (ITA, Trek-Segafredo) 43 pt
8. Arnaud Démare (FRA, FDJ) 43 pt
9. Sacha Modolo (ITA, Lampre-Merida) 31 pt
10. Kristian Sbaragli (ITA, Dimension Data) 29 pt

Classement de la montagne :

1. Damiano Cunego (ITA, Nippo-Vini Fantini) 7 pt
2. Nicola Boem (ITA, Bardiani-CSF) 7 pt
3. Maarten Tjallingii (PBS, Team LottoNL-Jumbo) 5 pt
4. Stefano Pirazzi (ITA, Bardiani-CSF) 4 pt
5. Joey Rosskopf (USA, BMC Racing Team) 4 pt
6. Omar Fraile (ESP, Dimension Data) 3 pt
7. Georg Preidler (AUT, Giant-Alpecin) 2 pt
8. Matej Mohoric (SLO, Lampre-Merida) 2 pt
9. Julen Amerzqueta (ESP, Wilier Triestina-Southeast) 2 pt
10. Giacomo Berlato (ITA, Nippo-Vini Fantini) 2 pt

Classement des jeunes :

1. Bob Jungels (LUX, Etixx-Quick Step) en 14h00’29 »
2. Davide Formolo (ITA, Cannondale) à 37 sec.
3. Sebastian Henao (COL, Team Sky) à 1’14 »
4. Stefan Küng (SUI, BMC Racing Team) à 1’22 »
5. Carlos Verona (ESP, Etixx-Quick Step) à 1’23 »
6. Valerio Conti (ITA, Lampre-Merida) à 1’39 »
7. Merhawi Kudus (ERY, Dimension Data) à 2’13 »
8. Jay McCarthy (AUS, Tinkoff) à 2’40 »
9. Ian Boswell (USA, Team Sky) à 2’54 »
10. Tobias Ludvigsson (SUE, Giant-Alpecin) à 2’56 »

Classement par équipes :

1. Astana (KAZ) en 42h01’56 »
2. Etixx-Quick Step (BEL) à 13 sec.
3. Team Sky (GBR) à 34 sec.
4. Team Katusha (RUS) à 36 sec.
5. Cannondale (USA) à 40 sec.
6. Giant-Alpecin (ALL) à 54 sec.
7. Movistar Team (ESP) à 1’07 »
8. Tinkoff (RUS) à 1’41 »
9. Bardiani-CSF (ITA) à 1’56 »
10. Team LottoNL-Jumbo (PBS) à 1’59 »