Des températures négatives et une heure de sommeil en moins ? Il en faut plus aux supporters flamands pour ne pas assister à cette course mythique, à cet événement attendu par tout un peuple pendant 365 jours : le Tour des Flandres. De bon matin, la grande place de Bruges dominée par son beffroi majestueux accueille les plus fervents amateurs. On ne compte pas le nombre de drapeaux jaunes ornés du Lion des Flandres, drapeaux distribués dans les rues de la Venise du Nord pour ajouter un peu de folklore à une course qui n’en manque pourtant pas. Une fois que le départ est donné, c’est la cohue. Les spectateurs se précipitent vers les voitures pour se placer sur le tracé. Pourquoi ? « Parce que c’est le Tour des Flandres » nous lance un jeune supporter qui porte le drapeau sur ses épaules. Tout simplement. Nul doute qu’il se postera sur les endroits stratégiques du parcours pour apercevoir les champions plusieurs fois pendant la course.

Erik a délaissé la stratégie pour une valeur sûre : l’arrivée. Pour lui, venir sur la ligne d’Audenarde est un acte militant. « Sans vocation politique », tient-il à préciser même s’il souhaite voir une Flandre indépendante du reste de la Belgique. Il fait partie de l’association Vlaanderen Vlagt qui vise à « faire la promotion de la Flandre en montrant ce drapeau ». De Louisville aux États-Unis pour les Mondiaux de cyclo-cross cette année à Geelong en 2010, les adhérents sillonnent le globe, toujours accompagnés de leur étendard qu’ils brandissent fièrement sur les événements cyclistes. Mais le Tour des Flandres est bien sûr à part et ressemble à une fête nationale dans la partie néerlandophone de la Belgique. « Pour nous c’est l’événement de l’année parce que c’est le Tour de la Flandre. Nous avons beaucoup de gens qui nous donnent de l’argent pour que nous fassions cette promotion. Mais pas la Région Flamande, car on ne veut rien donner en échange. » C’est pourquoi il agitera son drapeau jaune avec le « Vlaamse Leeuw », mais sans le noir et le rouge qui accompagnent l’emblème de la Belgique. Il avoue d’ailleurs sans concession se sentir davantage Flamand que Belge. Il ne sera pas le seul. Aucun drapeau tricolore n’est agité quand Fabian Cancellara se présente dans la dernière ligne droite dimanche dernier…

Bien sûr, les rues d’Audenarde sont moins bruyantes après l’annonce de l’abandon de Tom Boonen, mais, comme le dit la chanson, « the show must go on ». « Nous ne sommes pas seulement supporters de Tom Bonnen, nous supportons tous les Flandriens et surtout nous faisons la fête », explique Jurgen avec sa perruque orange sur la tête. Il n’est pas le seul à s’être déguisé. Des agents secrets perchés sur des échasses croisent des cyclistes d’antan participant à une course sur vélo d’appartement. Preuve que toute la Flandre vit au rythme du folklore pendant vingt-quatre heures.

Mais internationalisation du cyclisme oblige, on vient du monde entier pour assister au Ronde et faire partie de la fête. Sven affiche un drapeau norvégien plus discret que ceux que l’on voit sur la ligne d’arrivée. De passage à Paris, il a profité d’un calendrier favorable pour se rendre à Audenarde et supporter son poulain : Alexander Kristoff. Les histoires comme celles-là sont multiples et toutes singulières. Quoique faire près de 10 000 kilomètres pour assister aux classiques reste exceptionnel ! Kozue et Makina sont Japonaises et arborent fièrement leur drapeau. Elles ont fait le déplacement en Europe pour l’occasion. Présentes à Gand-Wevelgem, elles le seront encore à Roubaix. Pour Fumiyuki Beppu ? « Oui, bien sûr », lance Makina, bonnet Ronde Van Vlaanderen vissé sur la tête. « Nous venons deux à trois fois par an en Europe pour suivre les courses. Pour le Tour de France bien sûr. Nous sommes déjà allées sur le Tourmalet et nous serons présentes cet été. » Cette fois-ci pour brandir le drapeau nippon sur la plus grande course au monde.