Vincent, tu es à la fois journaliste et pilote, comment arrives-tu à gérer toutes ces activités ?
Je trouve que ce sont des activités assez complémentaires. Ce qui est difficile à gérer, c’est la surcharge de travail. Par définition, essayer un vélo prend du temps. La limite est là. Plus on essaie un vélo, plus les sensations seront affinées. Le rendu sera meilleur que si on doit l’essayer rapidement parce que dix autres attendent. C’est ce que j’évite. J’essaie de combiner au mieux, d’alterner. Je ne mélange jamais un VTT le matin et un vélo de route l’après-midi, parce que ça court-circuite un peu les sensations qu’on peut avoir. Je ne commence jamais un vélo si je n’ai pas terminé celui d’avant.

Profites-tu de tes tests pour affiner ton entraînement ?
On n’est plus vraiment dans la logique de l’entraînement parce qu’il faut souvent s’arrêter, faire des réglages, essayer de trouver d’autres combinaisons pour comprendre d’où vient ceci ou cela. Ca permet malgré tout de rouler de manière conséquente. Quand je peux faire un exercice de puissance, de vélocité ou d’intervalle, je le fais volontiers.

Parce qu’on parle de sport, 2009 a été une belle année pour toi ?
Oui, sur une course surtout, la Transvésubienne. Ca a été une bonne surprise. Je m’étais dit que de finir dans les dix ne me décevrait pas. Dans les cinq, je serais très content. J’ai carrément fini troisième, c’était génial. Au-delà de la course, j’ai tellement adoré rouler sur ce parcours que la performance a été pleinement liée au plaisir.

A 35 ans, qu’est-ce qu’on ressent quand on termine troisième d’une épreuve comme la Transvésubienne, devant les jeunes ?
J’ai une autre approche. Quand je m’inscris pour une course, quand je prends un départ, c’est pour essayer de faire le mieux possible. Maintenant je relativise un peu. Je prends comme ça vient en essayant de me préparer au mieux. Mais il n’y a pas grand-chose à faire ensuite face à de petits jeunes tels que ceux qu’on voit arriver à la Mégavalanche de la Réunion par exemple. C’est une nouvelle génération de vététistes hyper complète et très polyvalente, aussi à l’aise sur un vélo d’enduro que de cross-country. C’est dans l’ordre des choses. J’ai eu mon moment aussi et je continue d’en profiter d’une autre manière.

Justement, qu’est-ce qui a pu faire la différence sur une telle course : la résistance physique, la technique, l’expérience ?
C’est un peu les trois. Ce qui m’a aidé, c’est de connaître parfaitement le terrain et de pouvoir gérer au mieux. C’est sûr que c’est long, c’est technique, il faut ménager le vélo et faire les bons choix techniques en amont. C’est un ensemble de considérations physiques, techniques, physiologiques. Après, si on a un peu de chance et qu’on a bien programmé notre entraînement, il faut être au mieux ce jour-là.

Tu es un pilote complet capable de faire du cross-country, de la descente…
J’aime le vélo sous toutes ses formes et j’ai la possibilité de toucher à tout donc de garder le contact avec des disciplines exotiques. C’est génial ! Après, mon niveau est ce qu’il est mais ça me convient et ça me permet de toucher à toutes les facettes du VTT.

De toutes ces pratiques, laquelle préfères-tu ?
J’aime autant sauter des bosses sur un champ de bosses que faire du cross-country. Après, ça dépend du lieu, de la forme, du plaisir qu’on prend à rouler. C’est plus lié à cela qu’à une pratique particulière. Quand on voit aujourd’hui ce qu’on est capable de faire avec un vélo d’enduro, avec un débattement situé entre 120 et 140 millimètres, c’est génial. Tu peux tout te permettre !

En tant que pilote, quel regard portes-tu sur les journalistes VTT ?
C’est toujours délicat de parler d’une personne, d’un sport. Il faut faire attention. J’ai tendance à avoir du mal avec les personnes qui sont trop directives dans leur façon de juger.

Et en tant que journaliste, quel regard portes-tu sur les pilotes VTT ?
Je ne me penche pas forcément sur les pilotes VTT. Je les connais, je les côtoie, mais ce n’est pas le domaine que je creuse le plus. Je me rends compte aujourd’hui que les pilotes sont de plus en plus complets. Pour être devant, même en cross-country, il faut être très fort descendeur, et pour être devant en descente il faut être très fort en physique. Un bon pilote VTT doit être bon partout.

Si tu n’avais pas fait de VTT, qu’aurais-tu fait ?
En fait, j’ai fait du vélo parce que je ne pouvais pas faire de moto. Je m’y suis mis assez simplement. Avant cela, j’ai fait sept ans de tennis mais mon prof de l’époque m’a suggéré de faire autre chose parce que c’était un carnage !

Quels sont tes projets cette année ?
Ce sont un peu les mêmes que l’année dernière. Prendre le plus de plaisir possible sur une Transvésubienne. Essayer de faire mon boulot du mieux possible avec une conscience professionnelle. Même si je suis passionné et que la notion de plaisir intervient, je ne perds pas des yeux que c’est une grosse responsabilité. La notion de respect tant des constructeurs que des lecteurs est essentielle. Je souhaite continuer dans la même voie.

Propos recueillis par Jean-Eric Lacotte à Chypre.