José, quand as-tu pris la décision de continuer ta carrière ?
Ce n’était pas une décision à prendre. C’est naturel. Ça continue. Je voudrais poursuivre jusqu’en 2016 à Rio. J’espère y arriver. J’ai encore la forme et le physique pour le faire. J’aurai plus d’expérience que les autres coureurs si j’y arrive. Pour l’instant je me sens bien. Le team a décidé de continuer deux ans de plus avec moi. L’idée, c’est d’arriver avec Merida jusqu’en 2016 et de finir ma carrière à 38 ans sur le VTT.

Tu voulais donc te projeter directement vers la prochaine olympiade contrairement à Gunn Rita Dahle qui repart pour deux ans. …
C’est un peu ça. Gunn Rita a déjà 40 ans. 42, ce sera déjà un beau record ! Chez les hommes, c’est un peu différent. On n’a pas eu de vrais exemples de pilotes qui continuent au top à 40 ans. Surtout que ces deux dernières années, le VTT a beaucoup changé. Les distances sont plus courtes. Les parcours sont plus techniques. Les jeunes ont toujours l’avantage, mais de plus en plus de coureurs continuent.

Le fait de devoir composer avec des parcours plus explosifs t’a-t-il poussé à te remettre en question ?
Oui bien sûr. Je n’ai pas eu de problèmes techniquement. J’avais un avantage à ce niveau et je l’ai encore. Mais j’ai dû beaucoup changer mon entraînement. Quand je commençais à courir les Coupes du Monde en 1997, elles duraient une heure de plus. Maintenant, c’est beaucoup plus rapide. Tout va plus vite ! Une petite erreur et tu es hors course. Avant si tu crevais, tu pouvais réparer toi-même et continuer la course. Maintenant, même avec l’aide technique, tu es hors course avec une crevaison. J’ai changé quelque chose pour continuer. J’ai mis pas mal de temps. Au début 2012, j’avais mal. Jusqu’en juin, je me suis préparé à fond pour revenir sur une course d’1h30. Les résultats se sont améliorés à la fin de la saison.

As-tu changé tes méthodes d’entraînement en ce sens ?
Avec mon entraîneur, on a fait un hiver totalement différent. Les six ou sept dernières années, je faisais du cyclo-cross. Cet hiver, je n’en ai pas fait. Peut-être parce que j’étais fatigué de la saison et du stress des Jeux, des compétitions, des voyages. Si je pense finir ma carrière en 2016, c’était l’année pour faire un vrai changement, pour oxygéner le corps pendant l’hiver. On a même changé le système d’entraînement. Je n’ai fait que de l’intensité cet hiver. Pas plus de trois heures d’entraînement. Pendant les six sept dernières années ma fréquence cardiaque maximale est descendue. Cet hiver, elle est remontée un peu. Mon maximum est de 193 pulsations par minutes comme il y a six ans alors que ces dernières années j’étais autour de 180-185. J’ai fait pas mal de randonnées et de ski cette année ce qui fait aussi monter le cœur. C’est un travail différent. Maintenant, je commence à travailler l’endurance. On a bien changé, j’espère que ça fera la différence.

Comment répartis-tu ton temps en hiver ?
Je ne fais pas que de la route. J’ai toujours fait beaucoup de VTT. Ces intensités, on les a faites avec le vélo de route bien sûr, mais aussi avec un vélo de cyclo-cross sur la route puis sur la route avec le VTT. Cela fait deux ou trois ans que je fais mes entraînements d’endurance avec le vélo de VTT avec des pneus un peu plus gonflés. C’est aussi devenu un classique de garder ses pédales et ses chaussures de VTT sur le vélo de route. Les chaussures de route sont plus légères et plus rigides, mais le principal est de s’habituer aux chaussures de VTT.

Travailles-tu avec un appareil de mesure ?
Chacun a son système. Au début, j’avais un SRM et j’ai changé pour un Powertap. Surtout pour la commodité, car pendant la saison on change beaucoup le vélo de route pour actualiser les données. Chez Powertap, on ne doit changer que la roue tandis que chez SRM on doit démonter le pédalier.

Le 29″ et le 27″5 ont dominé aux Jeux, est-ce un regret de ne pas avoir quitté le 26″ plus tôt ?
Non, ce n’est pas un regret. Ce n’est pas une question de roues, c’est une question de taille. Bien sûr, Jaroslav Kulhavy est très content avec le 29″ parce qu’avec le 26″, il avait la sensation d’être sur un vélo pour enfants. C’est sûr que pour moi le 26″ est meilleur. Quand on voit le podium olympique, c’est clair qu’il vaut mieux avoir un 29″. Mais le 27″5 est plus adapté aux coureurs d’1m70, 1m75 comme Nino Schurter ou moi.

Pour toi, le 27″5 est-il le meilleur compromis ?
En cross-country, oui. Pour un cross-country d’1h30, il faut de l’explosivité, du punch. Il faut être au maximum dès le départ, tout donner. Il n’y a rien à gérer. Pour cela, le 27″5 c’est bien. Par contre sur les courses de plus longues distances, je vais être sur un 29″. Pour les longues courses, c’est un vélo plus confortable, moins agressif, c’est stable. Pour les roues, c’est bien. On peut aller dans des endroits où on ne pouvait pas aller avant. Le 29″ passe mieux les obstacles.

Quand as-tu commencé les essais ?
On n’a pas encore testé le cadre carbone, juste les cadres aluminium. On a commencé en juin. J’ai reçu plusieurs cadres à la maison, plus courts, plus longs, etc. On voulait trouver une bonne géométrie, un bon compromis avec les roues. Quand les 29″ sont arrivées sur le marché, les constructeurs ont simplement ajouté plus d’espace pour la roue avant d’étudier un réel changement de cadre. Pour le 27″5, il faut faire la même chose. Même si la différence avec le 26″ n’est pas trop grande, on ne peut pas utiliser le même cadre. On a essayé avec différentes mesures. Une fois qu’on a trouvé la bonne, ils ont construit les cadres carbone. Je l’ai essayé à l’entraînement. Je me sens bien. Le poids est bien distribué.

Tu seras à l’Andalucia Bike Race et la Cape Epic, comment abordes-tu ces premiers rendez-vous ?
Je ne vais pas prendre des courses comme un entraînement. Une course est une course. Notre obligation en tant que coureurs professionnels est d’être à fond. Bien sûr, Rudi Van Houts comme moi, en tant que coureurs de cross-country, on doit gérer ce début de saison. Si on y pense l’Andalucia, c’est six jours, puis deux semaines plus tard vient la Cape Epic, il faut faire attention pour ne pas perdre d’explosivité. On a décidé d’en garder un peu sous la pédale sur l’Andalucia Bike Race pour tout donner sur la Cape Epic. Ça ne veut pas dire qu’on ira là-bas pour le général. Il faut bien gérer la saison. Deux courses comme cela en un mois, ça peut faire très mal pour la saison. Nous avons fait l’Andalucia l’année dernière avec Rudi, c’était une belle expérience. On peut bien s’amuser. C’est une course très exigeante sur le plan technique. Pas très long au niveau des distances avec un maximum de 90 kilomètres. Du coup, on peut tester quelque chose de nouveau en compétition.

La Coupe du Monde sera-t-elle ton objectif prioritaire ?
Cela fait longtemps que je veux le général de la Coupe du Monde. En 2001, j’ai failli la gagner, mais je la perds pour sept points. J’ai eu une belle concurrence avec Julien Absalon. J’ai longtemps terminé derrière lui, car il la gagnait avant qu’elle ne soit finie ! C’est un rêve pour moi, le général. Cette année, je n’y pense pas. Ça peut-être bien pour moi. Je vise trois courses. À Albastadt au siège du sponsor pour l’ouverture de la Coupe du Monde. À Vallnord, à la maison. La dernière fois qu’il y avait une manche organisée en Andorre, c’était il y a quatre ans. J’ai connu une mauvaise expérience, car j’ai dû abandonner. Je veux y retourner avec la forme. Et les Championnats du Monde à Pietermaritzburg. Parce que j’aime bien le parcours. Je me sens un peu comme à la maison. Et ça peut-être un bel hommage à Burry Stander en Afrique du Sud.

Ces championnats s’annoncent très particuliers…
Ça va être des moments intenses. Burry était proche de la Cape Epic, on va courir dans son pays, c’est le dernier vainqueur. À Pietermaritzburg, ça va être la folie. Je veux dire par là que même si ce n’était pas sa ville, les supporters étaient toujours proches de lui. Toujours là pour l’encourager. Il a été une véritable locomotive pour le VTT en Afrique du Sud. Il va nous manquer. Comme Iñaki Lejarreta. On a connu un hiver difficile. Ils seront encore dans les têtes au début de saison.

Comment trouves-tu le circuit ?
Le parcours a beaucoup changé. Il était très forestier au début. Une forêt sauvage tropicale, c’est devenu un bike parc. C’était un circuit très naturel au départ et c’est devenu un parcours exigeant avec des chantiers super, mais des moments critiques avec des sections de roche, et beaucoup de risques à prendre. Ils ont ajouté des éléments techniques, mais on nous a laissé cette option. Ils ont mis des alternatives.

Dirais-tu qu’il ressemble à celui des Jeux ?
Peut-être. Londres était un circuit avec la philosophie de Pietermaritzburg. Les roches de Londres étaient bien. Elles auraient pu être dangereuses s’il y avait eu plus de virages. Mais c’est la tendance : des parcours courts, avec des sections techniques, exigeants pour les coureurs et des montées vraiment raides. Un peu à l’image d’Houffalize qui a changé sa philosophie et qui est devenu un circuit vraiment spectaculaire.

Propos recueillis à Playa de Muro, le 10 février 2013.