C’est un peloton incomplet, orphelin déjà de Dan Martin et Koldo Fernandez, les deux malheureux coureurs qui ont laissé une clavicule dans les rues humides de Belfast hier soir, qui quitte ce matin la capitale de l’Irlande du Nord pour une virée de 219 kilomètres au nord-est de l’île. Un peloton chaudement vêtu aussi pour braver des conditions atmosphériques pluvieuses qu’on accorde volontiers au charme irlandais. Des nuages bas gorgés de pluie constituent une voûte au-dessus de la course rose, laissant présager une première étape en ligne plus périlleuse que ne le présume son profil. Gare aux chutes qui ne manqueront pas de causer des frayeurs sans avoir trop de conséquences néanmoins. Gare aussi à un éventuel coup de bordure lorsque le peloton mettra en route sur la côte d’Atrim au retour vers Belfast en fin d’après-midi.

Pour s’en prémunir, il est décidé d’accorder un bon de sortie à la première échappée. Elle ne tarde pas à se manifester. Kilomètre 3, quatre hommes saisissent l’opportunité. Alors que la pluie accompagne déjà l’épreuve – elle ne lui offrira que de rares accalmies – le Belge Sander Armee (Lotto-Belisol), l’Italien Andrea Fedi (Neri Sottoli-Yellow Fluo), le Colombien Jeffry Romero (Colombia) et le Néerlandais Maarten Tjallingii (Belkin) se rejoignent devant pour former la première échappée. Une échappée au long cours facilitée par la réaction pacifique du peloton, qui lui accorde une demi-douzaine de minutes sans broncher, prenant soin de limiter les risques sur les routes mouillées de l’Irlande du Nord.

Les dangers inhérents aux premières étapes des Grands Tours et accentués aujourd’hui par cette pluie quasi incessante empêchent les coureurs de lever le nez du guidon. Dommage car sous le ciel embrumé se dessinent des paysages méconnus de la planète cycliste et tout à fait remarquables. D’un côté les sommets verdoyants se perdent dans les nuages bas. De l’autre la mer agitée façonne les côtes, à l’image de cette étonnante Chaussée des Géants (Giant’s Causeway en anglais), un pavage de colonnes verticales qui reste l’œuvre de ce que la nature sait faire de plus extraordinaire. Pour le peloton, le passage à proximité de ce site inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO marque le point de retour vers Belfast et le début progressif d’une chasse qui ne sera surtout lancée que dans la dernière heure de course.

Marcel Kittel rejoint le cercle fermé des coureurs parvenus à s’imposer sur les trois Grands Tours.

Tout peut arriver sur la côte d’Antrim, mais rien ne s’y passera finalement. L’accélération du peloton est progressive et le vent pas suffisamment incommodant pour encourager un coup de bordure. Malgré la nervosité ambiante, les coureurs se montreront même parfaitement disciplinés. On n’observera pas de chute massive sur les routes glissantes qu’un rayon de soleil viendra faire reluire dans les derniers kilomètres, au moment où la course fera son entrée dans Belfast. A cet instant, Maarten Tjallingii est le dernier rescapé de l’échappée du jour. Le Néerlandais, non content d’avoir raflé le premier maillot bleu du classement de la montagne en contestant à ses adversaires les points mis en jeu en haut des deux premières bosses de cette édition, insiste seul dans les 7 derniers kilomètres. Il se rendra à 3500 mètres du but.

Ce sont les sprinteurs, comme convenu, qui vont donc s’expliquer pour la victoire d’étape… voire pour le maillot rose. Avec 10, 6 et 4 secondes offertes aux trois premiers coureurs à franchir la ligne, seul Alessandro Petacchi, 2ème à 5 secondes des Orica-GreenEdge hier avec son équipe Omega Pharma-Quick Step, peut mathématiquement rafler le maillot rose porté par le Canadien Svein Tuft. Mais le vétéran du peloton ne s’y risquera pas aujourd’hui. Il reculera même de 3 secondes, la faute à une cassure. Néanmoins le maillot rose doit changer d’épaules. Le sprinteur Michael Matthews (Orica-GreenEdge), vainqueur avec ses coéquipiers hier soir, s’apprête en effet à conclure cette étape au 8ème rang, dans la première partie du peloton, ce qui lui permet de prendre possession à son tour du maillot de leader.

La victoire d’étape, elle, va concerner Nacer Bouhanni (FDJ.fr) et Marcel Kittel (Giant-Shimano), qui sortent roue dans roue de l’ultime virage à 300 mètres de la ligne d’arrivée. N’ayant d’autre choix que de lancer le sprint, Nacer Bouhanni s’exécute. L’ancien champion de France, qui court après un premier succès d’étape sur un Grand Tour, réalise un très beau rush mais ne peut pas lutter face à la puissance dégagée par Marcel Kittel. L’Allemand revient à pleine vitesse sur le Vosgien pour le dépasser sans mal et s’en aller gagner sa première étape sur le Tour d’Italie, auquel il participe pour la première fois. Déjà vainqueur de quatre étapes du Tour de France et d’une étape du Tour d’Espagne par le passé, Marcel Kittel rejoint le cercle fermé des coureurs parvenus à s’imposer sur les trois Grands Tours.

Demain dimanche, la troisième étape offrira une nouvelle occasion aux sprinteurs entre Armagh et Dublin (187 km).

Classement 2ème étape :

1. Marcel Kittel (ALL, Giant-Shimano) les 219 km en 5h13’12 » (42,0 km/h)
2. Nacer Bouhanni (FRA, FDJ.fr) m.t.
3. Giacomo Nizzolo (ITA, Trek Factory Racing) m.t.
4. Elia Viviani (ITA, Cannondale) m.t.
5. Roberto Ferrari (ITA, Lampre-Merida) m.t.
6. Manuel Belletti (ITA, Androni Giocattoli) m.t.
7. Ben Swift (GBR, Team Sky) m.t.
8. Michael Matthews (AUS, Orica-GreenEdge) m.t.
9. Davide Appollonio (ITA, Ag2r La Mondiale) m.t.
10. Tyler Farrar (USA, Garmin-Sharp) m.t.

Classement général :

1. Michael Matthews (AUS, Orica-GreenEdge) en 5h37’54 »
2. Luke Durbridge (AUS, Orica-GreenEdge) à 3 sec.
3. Ivan Santaromita (ITA, Orica-GreenEdge) m.t.
4. Svein Tuft (CAN, Orica-GreenEdge) m.t.
5. Pieter Weening (PBS, Orica-GreenEdge) m.t.
6. Cameron Meyer (AUS, Orica-GreenEdge) m.t.
7. Rigoberto Uran (COL, Omega Pharma-Quick Step) à 8 sec.
8. Gianluca Brambilla (ITA, Omega Pharma-Quick Step) m.t.
9. Pieter Serry (BEL, Omega Pharma-Quick Step) m.t.
10. Alessandro Petacchi (ITA, Omega Pharma-Quick Step) m.t.

Classement par points :

1. Marcel Kittel (ALL, Giant-Shimano) 50 pt
2. Nacer Bouhanni (FRA, FDJ.fr) 40 pt
3. Giacomo Nizzolo (ITA, Trek Factory Racing) 34 pt
4. Roberto Ferrari (ITA, Lampre-Merida) 32 pt
5. Elia Viviani (ITA, Cannondale) 28 pt
6. Ben Swift (GBR, Team Sky) 26 pt
7. Manuel Belletti (ITA, Androni Giocattoli) 22 pt
8. Andrea Fedi (ITA, Neri Sottoli-Yellow Fluo) 20 pt
9. Michael Matthews (AUS, Orica-GreenEdge) 18 pt
10. Davide Appollonio (ITA, Ag2r La Mondial) 16 pt

Classement de la montagne :

1. Maarten Tjallingii (PBS, Belkin) 6 pt
2. Andrea Fedi (ITA, Neri Sottoli-Yellow Fluo) 3 pt
3. Jeffry Romero (COL, Colombia) 2 pt

Classement des jeunes :

1. Michael Matthews (AUS, Orica-GreenEdge) en 5h37’54 »
2. Luke Durbridge (AUS, Orica-GreenEdge) à 3 sec.
3. Julien Vermote (BEL, Omega Pharma-Quick Step) à 8 sec.
4. Yannick Eijssen (BEL, BMC Racing Team) à 12 sec.
5. Pawel Poljanski (POL, Tinkoff-Saxo) à 26 sec.
6. Rafal Majka (POL, Tinkoff-Saxo) m.t.
7. Jay McCarthy (AUS, Tinkoff-Saxo) m.t.
8. Christopher-Juul Jensen (DAN, Tinkoff-Saxo) m.t.
9. Sebastian Henao (COL, Team Sky) à 38 sec.
10. Salvatore Puccio (ITA, Team Sky) m.t.

Classement par équipes :

1. Orica-GreenEdge (AUS) en 16h04’24 »
2. Omega Pharma-Quick Step (BEL) à 8 sec.
3. BMC Racing Team (USA) à 10 sec.
4. Tinkoff-Saxo (DAN) à 26 sec.
5. Team Sky (GBR) à 32 sec.
6. Astana (KAZ) à 41 sec.
7. Cannondale (ITA) à 53 sec.
8. Giant-Shimano (PBS) à 56 sec.
9. Belkin (PBS) à 58 sec.
10. Movistar Team (ESP) m.t.