Si Paris-Roubaix est un Enfer, le Diable est clairement identifié. Vainqueur sortant, lauréat du Tour des Flandres dimanche dernier, et déclaré imbattable, Fabian Cancellara (Trek Factory Racing) se retrouve dans la même posture indélicate de l’an dernier. Celle d’homme à (a)battre. De favori numéro un. Les outsiders ne manquent pourtant pas et la menace peut venir de deux directions. De Sep Vanmarcke (Belkin) d’abord, mais surtout du bloc Omega Pharma-Quick Step qui dispose de plusieurs hommes capables de faire tomber le Suisse. Aujourd’hui dans le Nord, le ciel est couvert et ira même jusqu’à verser quelques gouttes sur la Trouée d’Arenberg en début de matinée sur les coups de 9h. Malgré tout, les 51,1 kilomètres de pavés éparpillés sur les 257 au total seront secs et poussiéreux, terrain idéal pour un Paris-Roubaix haletant.

Pour son premier Paris-Roubaix l’an dernier, Clément Koretzky (Bretagne-Séché Environnement) avait choisi d’appréhender ces secteurs si spécifiques en abordant ces chemins d’un autre temps à l’avant. Force est de constater que le Provençal en veut encore ! Le jeune homme de 23 ans va poursuivre son apprentissage en compagnie de David Boucher (FDJ.fr), Kenny De Haes (Lotto-Belisol), Tim De Troyer (Wanty-Groupe Gobert), Benoît Jarrier (Bretagne-Séché Environnement), Michal Kolar (Tinkoff-Saxo), John Murphy (Unitedhealthcare) et Andreas Schillinger (Team NetApp-Endura). Partis après 32 kilomètres, les huit hommes vont augmenter leur avantage avant d’entamer le premier secteur pavé à Troisvilles après une centaine de kilomètres. Les 8’05 » qu’ils disposent alors ne feront dès lors que diminuer.

Pourtant, la course des favoris peine à se mettre en route. Elle n’aura même pas le temps de commencer pour l’un des outsiders les plus cités. Alexander Kristoff (Team Katusha) voit ses espoirs anéantis dans la Trouée d’Arenberg. Le premier moment fort de Paris-Roubaix est abordé avec 4’40 » d’avance par les hommes de tête qui perdront un à un des éléments. Que ce soit sur crevaison avec De Haes, Koretzky et Murphy, ou par un passage à niveau fermé avec David Boucher. Si la sélection s’est opérée à l’arrière à Wallers, les choses sérieuses commencent dans les secteurs de Tilloy à Sars-et-Rosières, à un peu plus de 65 kilomètres de l’arrivée. Malchanceux avec de nombreuses crevaisons d’Arnaud Démare, l’équipe FDJ.fr retrouve le sourire avec Matthieu Ladagnous qui provoque la sélection d’un groupe d’outsiders dans lequel figurent entre autres Damien Gaudin (Ag2r La Mondiale) et l’épatant Yannick Martinez (Team Europcar).

Coup de force de Tom Boonen et regroupement avant le Carrefour de l’Arbre

Sans faire injure au Béarnais, les grandes explications sont lancées dans le secteur pavé suivant dans lequel Tom Boonen (Omega Pharma-Quick Step) se dévoile. Le champion flamand veut faire taire les critiques qui n’ont pas manqué après son Tour des Flandres manqué. L’ancien champion du monde surprend son monde en rejoignant le petit groupe qui s’était détaché. Ses accélérations répétées sur les secteurs pavés provoquent une sélection naturelle mais permettent surtout de tenir à bonne distance le peloton où tous les favoris sont encore bien au chaud. Boonen, déterminé, n’abdique pas et force l’allure quand tout semble perdu. L’équipe de Fabian Cancellara est alors dans l’obligation de réagir, mais la garde du Suisse est amoindrie. Du coup, c’est la formation Belkin qui tente de combler l’écart oscillant autour des 25 secondes.

En dépit de quelques escarmouches, les favoris n’embrayent pas. Peter Sagan (Cannondale) en profite pour alors revenir sur le groupe Boonen. Souvent à contretemps, le vainqueur du GP E3 n’a pourtant pas été épargné par la malchance, victime d’ennuis mécaniques à plusieurs endroits stratégiques. Il décide alors de ne plus subir la course et attaque presque aussitôt en solitaire juste avant le secteur de Camphin-en-Pévèle. Derrière le Slovaque, le regroupement général longtemps probable intervient enfin. Il reste alors 20 kilomètres et tout est à refaire. Les favoris ne resteront pourtant pas bien longtemps ensemble, puisque tout éclate à nouveau dans le Carrefour de l’Arbre. Les costauds se nomment alors Cancellara, Vanmarcke, comme on pouvait s’y attendre, mais aussi John Degenkolb (Giant-Shimano) et Zdenek Stybar (Omega Pharma-Quick Step). Un groupe d’outsiders parvient cependant à opérer la jonction à 15 kilomètres de l’arrivée. Ils sont alors onze à pouvoir jouer la gagne. Du jamais vu depuis de longues années !

Dans ce groupe, la supériorité numérique de la formation Omega Pharma-Quick Step n’aura surpris personne. Avec trois hommes dans le groupe de costauds, la tactique des hommes de Patrick Lefevere est limpide : attaquer à tour de rôle. Finalement, la première sera la bonne pour Niki Terpstra au sortir du dernier secteur pavé à Hem. Comme il l’avait fait en ouverture de la campagne sur A Travers la Flandre, le Néerlandais tire les marrons du feu en fin tacticien. L’écart est rapidement creusé sur un groupe où les favoris se neutralisent. L’ancien pistard file alors vers le vélodrome de Roubaix. Alors que ses poursuivants entrent dans l’enceinte, lui a déjà bouclé plus d’un demi-tour. Terpstra venge alors une formation défaite une semaine plus tôt au Tour des Flandres et devient le premier Néerlandais lauréat depuis Servais Knaven en 2001.

Classement :

1. Niki Terpstra (PBS, Omega Pharma Quick Step) les 257 km en 6h09’01 » (41,8 km/h)
2. John Degenkolb (ALL, Giant-Shimano) à 20 sec.
3. Fabian Cancellara (SUI, Trek Factory Racing) m.t.
4. Sep Vanmarcke (BEL, Belkin) m.t.
5. Zdenek Stybar (TCH, Omega Pharma-Quick Step) m.t.
6. Peter Sagan (SVQ, Cannondale) m.t.
7. Geraint Thomas (GBR, Team Sky) m.t.
8. Sebastian Langeveld (PBS, Garmin-Sharp) m.t.
9. Bradley Wiggins (GBR, Team Sky) m.t.
10. Tom Boonen (BEL, Omega Pharma-Quick Step) m.t.