Tout l’été, Vélo 101 célèbre les anniversaires : les 20 ans de l’Etape du Tour, la 50ème édition du Tour de l’Avenir, la 100ème édition du Tour de France, les 20 ans des Championnats du Monde de VTT à Métabief, la 30ème édition du Roc d’Azur…

Zbigniew, quel souvenir gardes-tu de tes Championnats du Monde 1993 ?
Métabief était une très jolie station, dans le massif du Mont d’Or. J’étais déjà dans la sélection l’année d’avant puisque j’ai été sacré champion du monde chez les Vétérans en 1992 à Bromont. C’est l’année où j’ai commencé le VTT. En 1993, j’étais champion de France Elites. Je marchais bien, j’étais régulièrement dans le Top 15 des Coupes du Monde. J’étais très motivé puisque c’était en France. À cette époque, le VTT était encore très confidentiel. Mais après ça, je suis même passé dans une émission avec Michel Drucker !

En tant que champion du monde sortant, étais-tu le favori, ou y avait-il un adversaire que tu redoutais ?
Je redoutais justement Riccardo de Bertolis qui arrivait de nulle part. Aux Championnats d’Europe en Suisse, il était passé devant moi alors qu’il était derrière moi en Coupe du Monde. On peut le dire maintenant, il y a certains produits qui marchaient bien à l’époque…On ne comprend pas sur le coup et avec le recul on se dit que ce n’est pas normal. Je n’ai jamais pris de produits dopants. Je faisais mon sport de façon honnête, je faisais mon sport pour moi même. D’une certaine façon, on se dit qu’on est des victimes face aux gens qui étaient « armés ».

Pourquoi as-tu couru chez les Vétérans alors que tu étais champion de France Elites ?
J’étais champion de France, mais ce qui comptait pour la fédération, c’était d’obtenir le plus de médailles possible. C’est pour cela que j’ai couru dans la catégorie des Vétérans, qui regroupait les plus de 35 ans. J’étais champion du monde l’année précédente dans cette catégorie. On s’est bien entendu avec Yvon Vauchez et la fédération. C’étaient plus que des entraîneurs, c’étaient des amis. Je n’étais pas le seul sélectionné, puisqu’Yves Berlioux, un ancien routier là aussi était présent.

Y a-t-il un événement qui t’a marqué ?
Ce qui me reste en mémoire, c’est ma deuxième place sur la course des Vétérans. L’Italien Riccardo de Bertolis avec qui je me bats vient de nulle part. Il était loin derrière moi en Coupe du Monde. Je voulais vraiment gagner pour entendre la Marseillaise en France, c’est quelque chose de particulier. J’étais vraiment motivé ! Je marchais au top, mais l’Italien était plus fort. J’étais toujours derrière lui à dix ou quinze secondes. Le 3ème, Yves Berlioux était à plus de neuf minutes. Mais j’étais quand même champion du monde pendant douze heures puisqu’il a été déclassé dans un premier temps.

Pourquoi ?
Un des commissaires a fait un rapport disant que l’Italien avait un assistant qui lui lavait le vélo. Mais toute aide extérieure était interdite. Il utilisait un pulvérisateur pour nettoyer son vélo en courant à côté de lui pendant la course. Cette année-là, la boue collait au vélo, c’était l’enfer, particulièrement pour les Juniors Filles. Elles terminaient en pleurant, elles ne pouvaient pas rouler dans ces conditions avec des vélos qui pesaient vingt kilos. Mes coéquipiers suisses arrêtaient eux aussi, car ils ne pouvaient pas rouler dans la boue.

Avais-tu une astuce pour contourner les problèmes liés à la boue ?
J’ai compris qu’il fallait rouler dans les flaques d’eau pour éliminer la boue et j’ai fait ça dès que je le pouvais. À un moment ou à un autre, j’aurai été obligé de m’arrêter pour nettoyer la boue qui s’enfonçait entre la roue et le cadre, et sur le dérailleur. Sinon, je portais le vélo là où la boue était trop collante ou je roulais à côté de la piste, dans l’herbe par exemple.

Peut-on dire que, avec ces conditions, c’est ta pire expérience sur le vélo ?
C’est vrai que c’était spécial, mais j’ai déjà connu des situations où ma roue était complètement bloquée. Je me souviens par exemple d’une course à Dijon où la boue était aussi très importante. On faisait 50 mètres et la roue était complètement bloquée. Qui plus est quand les vélos font plus de 20 kilos. On s’arrêtait, on nettoyait et on repartait.

Mis à part cette boue, que pensais-tu du circuit ?
Sec, le circuit était plutôt bon pour moi. Je n’étais pas un super technicien comme je venais de la route. Il aurait fallu utiliser de la force et j’y aurai été. Les conditions ont changé en cinq jours, c’est comme ça.

Quel souvenir gardes-tu de l’ambiance en équipe de France ?
L’équipe était super, c’était un peu la folie avec Nicolas Vouilloz, Christian Taillefer, Franck Roman, etc. Tout le monde était au même endroit. C’était convivial, on rigolait bien. Taillefer par exemple déconnait tout le temps. C’était leur façon de vivre. Je me souviens d’une fois où j’étais parti avec lui sur le télésiège. Il m’avait dit « viens, je vais t’apprendre comment on descend. » Pendant qu’on montait, il a vu Franck Roman qui, lui, descendait la piste. Christian l’appelle, lui dit de l’attendre. Il a jeté le vélo du télésiège, il a sauté sur un sapin pour le rejoindre ! Il y a une autre chose qui m’a marquée, c’est que Yvon Vauchez avait ramené un ostéopathe, un des meilleurs en France. Une fois l’examen passé, Christian Taillefer sort de la salle en disant : « il m’a trouvé au moins douze fractures ! » En tout cas, l’ambiance était super !

Ce devait être la même chose une fois les courses terminées…
Après ma course le vendredi, je n’ai pas fait trop la fête puisqu’on m’a demandé de courir en Suisse le dimanche pour le Gruyère Bike. On était 1000 ou 2000 au départ. À l’époque j’étais dans l’équipe numéro un en Suisse. Je suis revenu par Métabief, avant de rentrer chez moi. J’ai vu une marée humaine pour la fin de la descente. C’était noir de monde au moment où Nicolas Vouilloz était champion du monde Junior. C’était fou, on courrait comme on peut le faire au Tour de France.

Es-tu retourné à Métabief depuis 1993 ?
Comme je courrais en Suisse, je passais souvent près de Métabief, et j’achetais souvent du fromage là-bas. J’achète toujours du Mont d’Or, que j’ai découvert là-bas, à la station. Il y avait un magasin qui en vendait, pas très loin. Maintenant, j’ai un copain qui passe souvent par là et qui m’en ramène deux ou trois fois dans l’année.