Ludovic, on t’a récemment aperçu en spectateur sur le cyclo-cross de Miramas, comment te remets-tu de ta lourde chute à VTT cet été, qui t’a coûté quatre vertèbres fracturées, une entorse à l’épaule gauche et un tassement des lombaires ?
J’étais content d’être présent sur une grosse course en cyclo-cross. En spectateur, certes, mais j’espère maintenant revenir au plus vite à la compétition. Je ne suis pas médecin mais j’estime avoir récupéré 80/85 % de mes sensations. J’ai encore beaucoup de mal à tourner la tête à droite et à gauche dans les forts pourcentages. Mais ça va de mieux en mieux au niveau des douleurs sur le vélo. Les médecins sont confiants et je les écoute énormément.

As-tu repris ta base foncière normalement ?
Normalement, non, mais j’ai beaucoup repris le vélo de route, car c’est la seule chose que je suis autorisé à faire pour l’instant. J’ai fait un peu de VTT samedi mais c’était la première fois depuis très longtemps. Bizarrement, sur le vélo, je n’ai pas trop mal. Les médecins m’ont expliqué que lorsque j’ai les mains posées sur le guidon, je divise le poids de mon corps par deux au niveau du dos. J’ai donc beaucoup moins mal sur un vélo que debout ou assis. Ca me rassure.

En VTT, il y a beaucoup plus de secousses que sur la route, ça risque d’être une autre paire de manches ?
J’ai roulé deux heures samedi. Par précaution je n’ai pas passé les marches ou les gros sauts mais on a quand même fait des descentes caillouteuses et je n’ai pas eu mal. C’était agréable et j’ai pris beaucoup de plaisir. Je suis autorisé à le faire mais les médecins ont peur d’une chute, même bénigne, qui pourrait tout recasser. Ils m’ont réclamé de la patience car l’hiver est encore long et je vais les écouter avec attention.

Tu devrais donc pouvoir attaquer la saison 2011 normalement ?
Oui. Peut-être pas avec le même entraînement parce que je suis cyclo-crossman l’hiver et que je suis en train de rater complètement la saison de cyclo-cross. Après, ce sera peut-être un mal pour un bien. Ca fait quinze ans que je fais ça et j’ai tendance à coincer de plus en plus en fin de saison, ce qui me fait débuter la saison de VTT un peu fatigué. Ce ne sera pas le cas en 2011 donc on croise les doigts.

Il y aura davantage de petits nouveaux dans le team New Cycling, ton rôle de capitaine de route va-t-il être plus appuyé ?
Je vais tout faire pour les aider, après ce sera aussi à eux de faire leur carrière. Je suis à l’écoute de ce qu’ils vont dire. Je serai là pour les conseiller au mieux, pour répondre franchement à toutes leurs questions dans tous les domaines. Je discute beaucoup avec Marc Colom depuis deux/trois ans. Ca faisait un moment qu’il cherchait à nous rejoindre et je suis très content qu’il soit là. Je ne connais pas encore assez Guillaume Vinit mais il me plaît par rapport à son tempérament et son aspect technique. Je pense que Jean-Yves Delale a réussi à faire une belle équipe qui va aller loin.

Les circuits de VTT prennent de plus en plus l’apparence des circuits de cyclo-cross, comment peux-tu transmettre ton gros passé de cyclo-crossman aux vététistes ?
Je leur dis déjà qu’il faut aimer ce qu’on fait. J’aime le cyclo-cross pour cet aspect-là : c’est plus court, plus dynamique, plus intense et plus passionnant pour les coureurs et les spectateurs. On voit rarement un coureur largement dominer les autres en cyclo-cross, ce que fait en revanche Julien Absalon en VTT. Même si j’ai beaucoup d’estime pour lui, je trouve qu’il casse toutes les courses depuis plusieurs années. Médiatiquement les circuits de VTT sont invendables : il y a trop d’écarts, c’est trop long, les caméras ne peuvent pas suivre et un commentateur a vite fait le tour. Je ne serais pas contre de raccourcir le temps et les circuits en VTT. Je rêve de voir un départ de Championnat de France avec cinq pilotes susceptibles de gagner.

Pour défendre Julien Absalon, c’est aussi à la concurrence de progresser et de s’en rapprocher…
C’est un peu ce qu’il s’est passé cette année mais les parcours ont beaucoup changé, plus roulants. Et puis Julien est comme moi, il vieillit un peu et une génération de coureurs talentueux arrive. Des Nino Schurter, des Burry Stander… Ca crée une super émulation. Mais je n’ai rien contre Julien, c’est un très grand champion, je veux juste promotionner au maximum mon sport pour qu’il ne soit pas relégué en arrière-plan. Pour l’instant c’est une discipline difficile. Seuls les vingt meilleurs du monde arrivent à en vivre, difficilement, et pour passer à l’étape au-dessus il va falloir que le VTT soit beaucoup plus médiatique.

Un gros match se préfigure en 2011 entre le team BH-SR Suntour et le Team GT. Comment situes-tu New Cycling au milieu de ce match ?
Ca va être la bagarre ! Si l’on regarde les performances de nos pilotes 2011 cette année, Marc Colom a terminé 4ème du Championnat de France, Pierre-Geoffroy Plantet 5ème. Guillaume Vinit s’est un peu loupé mais je pense qu’il n’était pas dans une structure qui l’ait compris. Nous allons être là pour le mettre en confiance. Ces trois coureurs-là ont la capacité d’être dans le Top 5 du Championnat de France, donc aux portes d’une sélection en équipe de France pour les Championnats du Monde voire les Jeux Olympiques.

Comment interviens-tu au niveau technique chez New Cycling ?
Nous avons notamment adapté le vélo par rapport au cyclo-cross, avec notamment un tube horizontal aplati pour les portages au cyclo-cross et qui donnait davantage de rigidité à l’avant du vélo. Nous l’avons reconduit sur le VTT. C’est aussi une belle image pour la société car les autres ne le font pas. On a trouvé ça beau et nous l’avons décliné sur toutes les gammes : route, VTT, cyclo-cross.

Quelle serait pour toi une saison 2011 réussie ?
A titre personnel j’espère pouvoir faire une belle saison 2011 après avoir fortement galéré en 2010. Je n’ai pas envie de prouver à tout le monde que c’était l’année de trop, malgré mes 37 ans. J’ai toujours dit que j’arrêterais ma carrière le jour où je ne prendrais plus de plaisir, or je prends encore beaucoup de plaisir sur le vélo. Les résultats sont importants mais je suis très fier de ma carrière. J’ai encore des défis à réaliser en tête, me prouver des choses, peut-être un jour sur un Championnat de France pas trop dur et pas forcément en altitude…

Et au niveau du team ?
Je vais me donner à 100 % pour les mettre dans les meilleures disponibilités. Certains avaient peur que je sois trop implanté dans l’équipe et avaient un peu peur de venir. Vu les résultats de Pierre-Geoffroy Plantet cette année, on voit bien que je ne suis pas là pour écraser mais bel et bien pour les conseiller. Quand Pierre-Geo se classe aux limites du Top 20 en Coupe du Monde, je suis aussi content que si c’était moi. Je fais tout pour que les gars se sentent bien dans cette équipe et prennent leur place.

Propos recueillis à Malaucène le 27 novembre 2010.