Olivier Gaudry est responsable technique chez Michelin. Il en est le responsable de la recherche et développement pour les pneumatiques VTT depuis huit ans. Il a d’abord travaillé dans des entreprises de l’automobile avant de faire une candidature spontanée auprès de l’entreprise, car pratiquant le vélo, laquelle a été acceptée. Il a ensuite intégré l’entreprise en passant par l’école du pneu, une formation spécifique de six mois, avant d’intégrer l’équipe de recherche et développement VTT.

Olivier, pouvez-vous nous expliquer les différentes étapes techniques de la réalisation d’un pneu ?
Le point de départ, c’est un cahier des charges, qui vient souvent du marketing et doit répondre aux attentes des vététistes. Dans l’esprit de simplification, notre première étape pour la gamme Wild a été de définir les terrains qui nécessitaient des sculptures spécifiques et dédiées. Nous avons défini trois types de terrains : roulant, mixte et extrême. Il en a découlé trois structures, respectivement Racer, Griper et Rocker. Nous avons ensuite adapté les sections des pneus aux pratiques cross-country et enduro.

Sur quelle base partez-vous à partir de la demande du marketing ?
On reçoit une demande du marketing, que nous devons traduire en terme de performance : adhérence, résistance à la crevaison, résistance aux agressions. Des partenaires internes travaillent sur les matériaux, sur les tissus. Je leur refournis des cahiers des charges pour qu’ils puissent travailler en fonction d’une référence. Je redispatche les cahiers des charges sous forme technique.

Plusieurs entités travaillent donc sur un même pneu ?
Tout à fait. Nous travaillons en plateau avec un regroupement des activités marketing, développement et communication. A côté, des groupes supports sont multi lignes produits et travaillent pour différents produits : poids lourd, tourisme, agricole, génie civil, moto et vélo.

Quelles gommes sont utilisées sur ces nouveaux pneus ?
Nous avons trois types de gommes adaptées à la structure et à la pratique. Pour le cross-country, la structure Racer est dotée de petits pains. Leur taille est telle que si nous mettions un matériau trop souple, le rendement en serait affecté. Nous avons donc rigidifié la gomme pour garder les caractéristiques d’adhérence et de grip. La dureté est de 63 shore pour le cross-country roulant, 61 pour le mixte et 59 pour le Rocker. Toute la gamme enduro est à 59 shore. Nous sommes homogènes sur cette gamme.

Comment sont définis les designs des pneumatiques ?
Toujours trois types de designs. Le Racer a de petits pains et donne une impression de dynamisme. C’est un pneu très directif, roulant, assimilable à une flèche. Sa profondeur de structure n’est pas très importante, du fait qu’on roulera sur des terrains secs. On cherche à avoir un maximum de contact avec le sol. Pour le terrain mixte, sur des terrains à la fois roulants et boueux, il faut trouver le juste milieu avec des pains carrés, une constance dans la prise d’angle et une constance latérale. Pour les terrains extrêmes, le design est vraiment orienté en ce sens avec de gros pains. La surface entre le sommet et la base du pain est assez importante pour qu’il soit tenu sur de fortes sollicitations. Dans le même esprit, beaucoup de crampons à l’épaule pour une bonne adhérence latérale et un sillon central dépourvu de sculpture pour apporter de la directivité.

Pouvez-nous parler du logiciel CATIA, utilisé par Michelin et issu de l’aéronautique ?
C’est un logiciel utilisé dans le monde industriel, que ce soit l’aéronautique ou l’automobile. Il sert à définir des éléments en trois dimensions. Nous utilisons cette base pour l’agrémenter aux calculs d’éléments composites.

Comment effectuez-vous les tests d’usure et de résistance ?
L’objectif, dans un cahier des charges, est de fixer une référence. Nous avons ensuite des retours du terrain dont nous nous servons pour faire évoluer nos produits. Quand on développe un pneu, on fait d’abord des tests internes, sécuritaires, par lesquels le pneu doit passer. Ensuite, on s’adresse à des testeurs qui ont une pratique très engagée. Ce sont eux qui nous donneront leur avis sur les performances du pneu. La troisième étape, c’est le placement sur des bases de roulage en essayant de toucher le plus de terrains géographiques possible.

Qui réalise ces tests subjectifs ?
Ce sont essentiellement les teams, comme le Team Santa Cruz en France ou le Team Giant aux Etats-Unis.

En cross-country, les pneus semblent encore aujourd’hui un peu lourds, pourquoi ?
C’est une volonté de notre part. On revient avec l’objectif de servir les attentes d’une majorité de pratiquants. Nous travaillons étape par étape, avec la volonté d’être présents dans la durée. Chaque année, nous présenterons une nouveauté à l’Eurobike. Nous espérons réaliser ainsi un bon retour et satisfaire tous les vététistes, qu’ils puissent bien s’amuser avec nos produits.

Michelin proposera également des services sur son site Internet…
Pour être sûrs que le vététiste sera satisfait de nos produits et montera le bon pneumatique sur son VTT, nous allons mettre en place une application web courant février, qui permettra à travers diverses questions d’avoir une préconisation Michelin en terme de monte pneumatique pour le vététiste. Pour tous renseignements, le site est là. Comme sur la question du réglage de la pression des pneus, qui est assez pointue. Des consignes Michelin seront disponibles sur le site et chez le distributeur.

Propos recueillis par Jean-Eric Lacotte à Chypre.