En ce dimanche pascal, il n’y a pas quatorze, mais trente-quatre stations sur le chemin de croix des participants à l’Amstel Gold Race. Trente-quatre, comme le nombre d’ascensions répertoriées sur la première étape du triptyque ardennais. Mais cette grosse trentaine de raidards n’est pas la seule difficulté d’une des courses les plus nerveuses de l’année. Et pour cause, les organisateurs s’amusent à tournicoter pendant plus de 250 kilomètres dans la région du Limbourg, entre Maastricht et Valkenburg. Routes sinueuses, rétrécissements de chaussées et ilots directionnels sont au menu des coureurs pour qui la délivrance intervient sur la ligne, située 1800 mètres après la dernière escalade du Cauberg, comme ce fut le cas lors des Championnats du Monde 2012, remportés par Philippe Gilbert (BMC Racing Team).

Pourtant, le Belge n’est pas le seul dans le peloton à avoir été sacré ici même il y a dix-huit mois. En fait, ils sont trois à avoir coupé la ligne avec un grand sourire sur les lèvres. Si le Wallon attend la dernière ascension du Cauberg pour sortir de sa coquille, Alexey Lutsenko (Astana) et Matej Mohoric (Cannondale), respectivement sacrés chez les Espoirs et les Juniors aux Championnats du Monde 2012, se dévoilent dès les premiers kilomètres. Les deux jeunes prodiges sont accompagnés de Nicola Boem (Bardiani-CSF), Manuel Belletti (Androni Giocattoli), Pirmin Lang (IAM Cycling), Pim Ligthart (Lotto-Belisol), Christophe Riblon (Ag2r La Mondiale), Rory Sutherland (Tinkoff-Saxo), Preben Van Hecke (Topsport Vlaanderen-Baloise), et James Van Landschoot (Wanty-Groupe Gobert) sur les routes du Limbourg.

Sur une course aussi longue, les favoris peuvent se permettre d’accorder une avance substantielle à ces dix hommes partis après deux kilomètres, même si certains comme Christophe Riblon peuvent faire figure d’outsiders à la grosse cote. Leur avance dépassera même la barre symbolique des dix minutes, mais le peloton contrôle. Les équipes de ceux que l’on attend sur le Cauberg (exception faite des Katusha qui ont perdu Joaquim Rodriguez, victime d’une chute en début de course) mettent en route et réduisent l’écart. Quand la course entre dans sa phase décisive, à cinquante kilomètres de l’arrivée, on ne donne pas cher des chances de ces fuyards qui ne possèdent plus que trois minutes d’avance en abordant le Gulperberg, première des neuf difficultés à grimper une fois la barre des 200 kilomètres franchie.

Thomas Voeckler tente, Christophe Riblon résiste, Philippe Gilbert est invincible

Malgré tout, les hommes de tête livrent une résistance éblouissante. Le peloton mettra du temps à revenir sur les talons des deux derniers rescapés, dont Chrisophe Riblon, mais toute son attention est longtemps focalisée sur un autre Français. Il y a douze mois, Thomas Voeckler (Team Europcar) voyait son printemps se terminer dans un fossé néerlandais avec la clavicule en vrac. C’est donc avec un esprit revanchard que l’Alsacien revient sur l’épreuve limbourgeoise avec la ferme intention de peser sur la course. L’ancien porteur du maillot jaune sur le Tour de France débloque la situation au sommet du Kruisberg à 39 kilomètres de l’arrivée en plaçant un démarrage que seule une poignée de coureurs pourra suivre parmi lesquels, Greg Van Avermaet (BMC Racing Team) et Jakob Fuglsang (Astana).

Pourtant bien garni et intéressant tactiquement avec des équipiers pour les principaux favoris, ce groupe ne prendra jamais le large, au grand dam de Thomas Voeckler, mais mettra pourtant du temps à être revu par le peloton. Le paquet réduit à une quarantaine d’unités a ce groupe d’outsiders en ligne de mire dans l’avant-dernière escalade du Cauberg à une grosse quinzaine de kilomètres de la ligne. A ce stade de la course, Christophe Riblon et Preben Van Hecke sont encore à l’avant. Les deux hommes, harassés par une échappée de plus de 230 kilomètres, s’accrochent à un mince espoir de victoire avec 1’30 » d’avance au dernier passage sur la ligne. Rejoints par Van Avermaet et Fuglsang, ils finissent par s’incliner à 7 kilomètres de l’arrivée. Tout est à refaire et les favoris peuvent s’expliquer dans le Cauberg.

Philippe Gilbert peut alors se frotter les mains. Le Wallon applique la même stratégie qui lui avait permis d’acquérir le titre mondial en 2012. Dans le rôle du dynamiteur, Greg Van Avermaet est seulement remplacé par Samuel Sanchez qui provoque la sélection au pied. Simon Gerrans (Orica-GreenEdge), Michal Kwiatkowski (Omega Pharma-Quick Step) et Alejandro Valverde (Movistar Team) sont les seuls à résister. Mais lorsque Philippe Gilbert met la deuxième couche, ces trois-là doivent céder devant la suprématie du coureur de BMC. Le Belge attaque à son endroit favori dans le Cauberg et creuse immédiatement l’écart. Les 1800 mètres qui ont été rajoutés après le sommet n’y changent rien. L’ancien champion du monde réitère son exploit de septembre 2012 et remporte l’Amstel Gold Race pour la troisième fois de sa carrière après 2010 et 2011.

Classement :

1. Philippe Gilbert (BEL, BMC Racing Team) en 6h25’57 »
2. Jelle Vanendert (BEL, Lotto-Belisol) à 5 sec.
3. Simon Gerrans (AUS, Orica-GreenEdge) à 6 sec.
4. Alejandro Valverde (ESP, Movistar Team) m.t.
5. Michal Kwiatkowski (POL, Omega Pharma-Quick Step) m.t.
6. Simon Geschke (ALL, Giant-Shimano) à 10 sec.
7. Bauke Mollema (PBS, Belkin) m.t.
8. Enrico Gasparotto (ITA, Astana) m.t.
9. Daniel Moreno (ESP, Team Katusha) m.t.
10. Yukiya Arashiro (JAP, Team Europcar) à 12 sec.