José-Antonio, depuis quand n’a-t-on pas abordé les Jeux Olympiques avec toi dans une interview ?
Depuis les rangs Juniors ! Je crois que depuis que je cours dans l’élite, tous les ans j’ai le droit à la question. Depuis deux ans c’est « maintenant que tu as gagné les Championnats du Monde, penses-tu aux Jeux Olympiques ? » C’est une question récurrente. C’est normal, la course olympique est un enjeu majeur. Mais il ne faut pas oublier qu’il y a d’autres courses très importantes aussi. La course olympique reste une course normale. Ce n’est que l’impact médiatique qui est plus grand.

On ne dérogera pas à la règle, parlons des Jeux ! Comment se passe la sélection en Espagne ?
En ce moment, nous avons trois places pour les Jeux Olympiques. Ces deux dernières années, nous avons essayé de donner le meilleur pour obtenir ce quota de trois places et nous y sommes parvenus. Un nouveau challenge commence cette année : la classification pour les coureurs individuels. Nous sommes six à prétendre à une place : Iñaki Lejarreta, Ruben Ruzafa, Carlos Coloma, Sergio Mantecon, Ivan Alvarez et moi. A nous de nous départager pendant les premières courses. Les deux ou trois premières Coupes du Monde seront déterminantes. Au classement UCI, je suis le mieux placé mais pour l’instant je n’ai pas encore officiellement mon ticket pour Londres.

Si tu devais établir cette sélection autour de toi, qui prendrais-tu ?
C’est difficile ! Ces deux dernières années les Espagnols sont montés d’un niveau. J’étais toujours là devant, et derrière il y avait toujours Coloma ou Mantecon. Si ce n’étaient pas eux c’étaient Lejarreta ou Ruzafa. Cette année, avec les JO, la motivation de chacun a décuplé. Faire une Coupe du Monde l’année des JO n’est pas la même chose que la faire deux ans avant. L’année olympique, le niveau ne monte pas pour les dix meilleurs pilotes, mais il monte pour les dix suivants.

Le choix des deux coéquipiers qui viendront avec toi aura-t-il une influence sur toi ?
Non, je n’ai aucun problème avec les autres pilotes. Nous avons de bons rapports. Pour moi c’est important d’avoir deux mecs qui ont un bon esprit, une belle motivation, et qui vont aux JO avec une mentalité positive, qui ne grogneront pas s’il pleut en Angleterre ou s’il y a des cailloux sur le circuit. C’est du VTT ! Il y a des années que les Espagnols ont adopté cette mentalité positive. Nous n’allons plus sur les courses pour être placés mais pour être acteurs.

Les six sélectionnables en équipe d’Espagne sont des valeurs sûres, mais comment se porte la relève du VTT espagnol ?
Ce n’est pas facile, surtout si on se compare à la Suisse. Nous avons tout de même une belle génération derrière moi. Ruben Ruzafa est le plus jeune. J’ai 34 ans, je vais peut-être encore courir cinq ans, mais les autres n’en feront pas quinze de plus. Le jour où j’arrêterai la relève sera assurée une ou deux années de plus. C’est une période difficile chez les Juniors et les Espoirs mais il suffit de l’arrivée d’un mec pour pousser sa génération. Il faut attendre.

Les jeunes espagnols sont-ils plus attirés par la route que par le VTT ?
Je ne crois pas. Presque tous les garçons commencent à faire du vélo avec un VTT. Quand ils commencent à rouler fort, beaucoup changent pour la route. Ils voient qu’ils n’ont pas la technique en VTT, mais je pense néanmoins que ça change aujourd’hui. La route est de plus en plus dangereuse, avec les voitures, les parents préfèrent emmener leurs enfants dans des écoles de VTT.

Les victoires d’Alberto Contador font quand même plus rêver les jeunes qu’une discipline, le VTT, seulement mise en valeur au moment des Jeux Olympiques ?
Traditionnellement, le cyclisme sur route a toujours davantage fasciné. Les jeunes regardaient toujours Bahamontès, Delgado, Indurain… Ces dix dernières années, nous avons eu de grands champions en Espagne avec Freire, Valverde, Contador… Certes certains ont eu des problèmes avec le dopage mais un jeune garçon voit simplement un mec gagner, il ne comprend le reste que plus tard. Les jeunes rêvent toujours avec le cyclisme, mais de plus en plus avec les nouvelles disciplines : le street, le dirt, le BMX… Ce sont des sports qui bougent, qui sont plus à l’image des jeunes que le Tour de France.

Quelles informations as-tu sur le parcours des Jeux Olympiques quant au matériel à utiliser ?
Je pense qu’il faudra utiliser un 29″ sur la course olympique. Je n’ai pas vu le parcours mais d’après ce que j’ai vu sur Internet, les graphiques, c’est un parcours qui va vite, pas roulant mais avec beaucoup de vitesse, vallonné, avec peu de relances. Avec un 29″, ça peut aller mieux. Après Houffalize, nous aurons la possibilité de voir le parcours olympique. Nous irons en reconnaissance avec tous nos vélos : le 26″ et le 26″ tout suspendu, le 29″ et le 29″ tout suspendu ! Ça donnera des indications mais le parcours pourra encore bouger d’ici au mois d’août.

Tu avais fini 4ème à Sydney, 2ème à Athènes et loin à Pékin, vas-tu modifier ton approche des Jeux ?
Non, pas tellement. Chaque année, j’essaie de changer un peu avec mon entraîneur, sans quoi ton physique reste toujours au même niveau. Il faut faire des variations. Au niveau diététique, je fais attention mais sans gros changements. Je me suis acheté une Vespa pour faire du derrière moto pour gagner en vitesse. Ce sont de petits ajustements.

Dans ta préparation, tu as signé une petite performance en cyclo-cross également, 20ème aux Championnats du Monde de Coxyde…
L’année dernière j’avais fait 20ème aussi. Mon meilleur résultat reste celui de 2007, 17ème. C’est toujours pareil pour moi : je pars en dernière position puis je dois remonter tout le monde. Dans le sable, j’ai cherché les vagues en vain mais il n’y avait qu’une plage ! C’était spécial avec le vélo de cyclo-cross. En VTT aussi il nous arrive d’avoir à franchir du sable, mais les pneus sont plus larges. Et je ne suis pas habitué à mettre 1.3 de pression. Sur l’asphalte, la jante touchait par terre, mais ça roulait super bien dans le sable. C’était une expérience positive.

Propos recueillis à Playa de Muro le 11 février 2012.