Pierrick, vous voilà de nouveau vainqueur à Pau, décidément c’est une ville qui vous réussit sur le Tour de France ?
Oui, mais le départ a été très difficile. Ça a roulé très vite avec 46 de moyenne la première heure. Le parcours était très vallonné, ça me convenait bien, mais sur un tel tracé il fallait un peu de réussite pour être dans l’échappée puis la jambe pour l’accompagner jusqu’au bout. Il y avait des coureurs malins dans le groupe, des coureurs qui roulent très vite, à qui il ne fallait pas laisser 10 mètres au risque de ne plus les revoir. La meilleure défense était l’attaque. Cette fois j’ai pris l’initiative, parfois j’en manque, mais aujourd’hui c’est moi qui l’ai fait.

Comment avez-vous réussi votre coup dans le final ?
Il faut rester concentré, c’est ce que j’ai fait toute la fin de course. Parfois, j’attends qui attaque, je regarde les autres. J’ai bien su répondre sur les premières attaques, et puis à 6,5 kilomètres de l’arrivée, je ne sais pas pourquoi, sans doute au feeling, j’ai attaqué en sentant que ce serait la bonne. J’ai senti tout de suite que ça partait. Christian Vande Velde est revenu. C’est un bon rouleur mais je savais qu’après la flamme rouge il ne passerait plus de relais. C’était à moi de rouler suffisamment vite pour bénéficier d’un sprint lancé et non arrêté.

Quelle était votre stratégie ?
La stratégie était d’arriver seul, car c’est plus facile ! Mais Christian Vande Velde m’a suivi et j’ai dû miser sur un sprint. Il avait sa part de chance aussi. Sur le Tour, il ne faut pas calculer ses coups de pédales. Je sais que j’ai parfois tendance à le faire. Ce n’est pas une petite course, c’est la plus belle au monde, aujourd’hui il fallait s’arracher. J’y ai cru jusqu’au bout. Je voulais emmener jusqu’à 200 mètres de l’arrivée et tout donner dans le sprint. C’est une journée incroyable. J’étais attendu ici et je gagne quand même, c’est formidable.

De vos quatre victoires dans le Tour, laquelle vous tient le plus à cœur ?
Chaque étape du Tour que j’ai gagnée a un symbole. La première parce que c’était la première avec mon ancienne équipe, Bouygues Telecom. La deuxième parce qu’on arrivait à Tarbes, pratiquement chez moi. La troisième parce que c’était l’étape mythique des Pyrénées avec Peyresourde, Aspin, Tourmalet et Aubisque, ça reste un grand souvenir. Aujourd’hui, c’est le retour après une année difficile en 2011. Finalement je me rends compte que cette année de souffrance m’a servi. Le Tour, je le trouve moins dur à présent. Quand on se bat et que rien ne vient, c’est difficile. Bien sûr le Tour c’est dur mais quand on a la santé on apprend à souffrir différemment.

Vous offrez à l’équipe FDJ-BigMat sa seconde victoire d’étape sur ce Tour, quel est le secret ?
Je ne pense pas qu’il y ait de secret, c’est une volonté. Chaque coureur qui vient sur le Tour de France est motivé par le Tour. Il y a 198 coureurs au départ, vingt-et-une étapes au total. Si on enlève les chronos, les étapes de haute montagne, celles pour les sprinteurs, il ne reste plus grand-chose pour des baroudeurs comme moi. Quand on arrive à gagner ce genre de course et qu’on est attendu, c’est vraiment formidable. Pour la FDJ-BigMat, ça a fonctionné dès le début. Avec la victoire de Thibaut Pinot en première semaine, on a eu moins de pression. Ça m’a sans doute servi.

Quel regard portez-vous justement sur la performance de Thibaut Pinot ?
Thibaut réalise quelque chose d’énorme à 22 ans. Il arrive sur son premier Tour, il gagne la première étape montagneuse, maintenant il est 10ème au général. Ces derniers jours on s’est mis autour de lui pour essayer de le protéger sur des étapes dangereuses qu’il n’apprécie pas trop. Je suis récompensé du travail que j’ai fait pour lui, maintenant on va se battre pour qu’il conserve sa place au général voire qu’il fasse mieux.

Propos recueillis à Pau le 16 juillet 2012.