Julie, qu’est-ce qui a fait la différence dans la course au titre olympique ?
La concentration. Sur un parcours comme celui-là, il ne fallait rien lâcher, être toujours lucide. J’étais dans mon truc, très concentrée, je n’ai pas fait d’erreurs et ça a joué. Avant chaque portion technique, je me mettais devant. C’est ce que je voulais car on peut très vite être gênée en cas de chute devant soi. J’ai constaté que je pouvais fournir ces efforts sans m’épuiser.

La technique prévalait sur le physique ?
Sur ce parcours, il y avait effectivement des qualités techniques à avoir. Sans perdre trop de jus, il ne fallait pas aller à la faute, être fluide. J’ai même changé mes choix pendant ma course. Normalement, je sautais les deux dalles dans le plus long pierrier, mais j’ai vu que ça glissait un peu trop. J’ai préféré gérer en optant pour un autre choix qu’en reco.

Qui craignais-tu le plus ?
Je pensais à Catharine Pendrel et à Annie Last, mais ça a été une course d’usure. Il ne fallait pas partir trop vite. Après, quand je les ai vues lâcher, c’était le moment d’y aller. Il restait trois tours. On pouvait très vite aller à la faute donc rien n’était joué tant qu’on n’avait pas franchi la ligne d’arrivée. Je n’ai jamais trop pensé à la victoire. Dès le début je me suis mise dans le bain. Je savais qu’on partait pour une heure et demie de course. J’étais dans ma bulle dès l’échauffement. Je n’ai ensuite plus changé d’état d’esprit.

Ressentais-tu une pression particulière du fait de rouler aux côtés d’Annie Last, la favorite locale ?
C’est vrai que ça criait fort avec l’Anglaise. Il y avait du bruit, mais il fallait faire abstraction de tout cela pour ne se concentrer que sur les personnes qu’il était nécessaire d’entendre, je parle du staff de l’équipe de France. Même s’il y avait beaucoup de monde, je ne voyais et n’entendais que ceux que je voulais.

Quand as-tu eu la conviction que tu allais gagner ?
Quand je suis entrée sur le start loop à la fin. Cette médaille olympique, c’est magique, une récompense aussi. J’ai fait des efforts cette année, et on ne décroche pas une médaille d’or par hasard. Je suis heureuse car je l’ai méritée. Le VTT, j’en fais pour mon plaisir, même à haut niveau. J’arrive à prendre du temps pour moi, c’est comme ça que je fonctionne. Je n’arriverais pas à avancer avec des restrictions, mais je sais être pro.

As-tu pensé que ça ne passerait pas à un moment donné ?
Une seule fois peut-être, sur un pierrier. J’allais peut-être un peu trop vite, mais j’ai aussi été déstabilisée avec le vent. J’en ai pris conscience aussitôt, si bien que je suis allée moins vite à cet endroit aux tours suivants.

Tu avais fait le choix d’un plateau unique de 36 dents…
Oui, c’est quelque chose que j’avais validée sur les dernières reconnaissances en avril. Je voyais bien que c’était un braquet convenable pour ce parcours. J’ai roulé avec chez moi. C’était bien de ne pas avoir à s’occuper du plateau aujourd’hui. J’ai fait un bon choix.

Le parcours des JO avait fait débat à sa découverte, qu’en dis-tu aujourd’hui ?
Il y a un an au test event, ça avait fait bizarre de se retrouver sur un parcours comme celui-là, tout artificiel. J’aime bien quand il y a de la racine, que ça ressemble un peu à chez moi, mais au final c’était vraiment un beau parcours. Je me suis fait plaisir, c’était très ludique. C’est clair qu’on ne trouve pas ce genre de parcours sur des Coupes du Monde, mais il fallait faire avec, s’adapter, et j’ai bien aimé.

Cette date, vous l’aviez programmée depuis longtemps…
J’ai fait des choix dans ma saison pour être en forme aujourd’hui. J’ai fait l’impasse sur plusieurs Coupes du Monde. Je voulais mettre toutes les chances de mon côté pour être là aujourd’hui. Nous avons fait les bons choix avec mon entraîneur Benoît Gloux et j’en suis heureuse. C’est vraiment le meilleur entraîneur. Et un ami.

A 23 ans, jusqu’où vous voyez-vous aller ?
Je ne sais pas. Je prends les choses comme elles viennent, au jour le jour. Je suis jeune, c’est sûr, mais le VTT est tellement dur qu’il faut persévérer, continuer à s’entraîner dur. On verra les saisons suivantes mais d’ores et déjà je ne me prends pas la tête.

Par où va passer la suite de ta saison ?
Il y a le Championnat du Monde en septembre, mais je ne sais pas encore comment je vais l’aborder, on verra comment tout ça va se passer, comment le retour dans ma Bretagne va se dérouler. Je savoure ! C’est une grande fierté pour le VTT féminin. Ce titre olympique, c’est beau, et j’espère que ça va donner envie à d’autres jeunes filles de faire du VTT.

Où va aller la médaille d’or que tu portes autour du cou ?
Elle va rentrer en Bretagne, dans mon petit chez-moi, et je vais l’admirer pendant un bon bout de temps.

Seras-tu sur le circuit demain pour encourager les garçons ?
Je l’espère bien, oui. J’ai confiance dans le trio de l’équipe de France. Julien Absalon a tout fait pour être là demain. Il a plus d’expérience que moi, j’ai d’ailleurs su profiter de son expérience aujourd’hui, et il est capable de faire le hat-trick.

Propos recueillis à Londres le 11 août 2012.