Christian, le fait que tu sois descendeur ne t’empêchait pas d’être souvent au Roc d’Azur à tes heures glorieuses.
Même les descendeurs se devaient d’être au Roc d’Azur. Entre nous, on constituait les tandems. Chacun cherchait son copilote dans son coin. On faisait le Roc, mais c’était vraiment sans prétention de victoire ou quoi que ce soit. Ça nous arrivait de faire la fête la veille et de participer à la course le lendemain.

Vu le nombre de participations, tu dois bien avoir une anecdote ?
Je me rappelle d’une année où je devais le faire avec Stéphane Jany, mais il avait un peu trop fait la bamboula la veille, et malheureusement, un quart d’heure avant le départ, je n’avais toujours personne avec moi pour faire le tandem. J’ai trouvé un copain sur la base, je ne connaissais pas son niveau. Dans la première côte, j’ai vu que physiquement ça allait être difficile. Il est descendu du tandem et a commencé à pousser derrière. Finalement, il a lâché le tandem parce qu’il n’arrivait pas à suivre. En haut, j’ai vu qu’il n’arrivait pas et je suis parti seul. J’ai fait la quasi-totalité du Roc d’Azur, seul sur mon tandem. Je me suis éclaté malgré tout.

Tu as donc terminé seul ?
Olivier Legeay, qui roulait très bien à l’époque, avait eu un ennui mécanique. Il avait bâché pour rentrer à Ramatuelle. Il m’a vu, a déposé le vélo à un copain à lui et il est monté avec moi sur le tandem. On a fini le Roc à deux. Le VTT est un sport comme ça : on sait quand on part, mais il peut se passer 10 000 choses pendant la compétition. Ce sont forcément des souvenirs qui restent. Ce sont ces courses-là, celles où on connait des petits pépins, dont on se souvient forcément.

Le Roc d’Azur doit-il s’étendre dans le temps en s’ouvrant à d’autres disciplines, à l’instar de ce que fait la Sea Otter Classic ?
Le marché américain est très difficile pour les marques européennes. Leur marque marche sur leur pays. Le marché US est très spécial. Pour cette raison, le Roc a un potentiel plus important. Nous acceptons plus facilement les marques étrangères et notamment américaines. Au niveau des compétitions, ce serait un risque d’étendre le Roc d’Azur à une semaine, vu la conjoncture. Pour moi, le Roc doit rester concentré. Les exposants en ont plein les chaussettes rien que sur vendredi samedi dimanche. Ce n’est pas parce qu’il durera une semaine qu’il y aura plus de monde et que le salon marchera mieux. Sans parler des conditions météorologiques qui peuvent se détériorer. Autrement dit, pour moi, augmenter la durée du salon revient à augmenter les risques d’échecs. C’est comme un bon plat. Il vaut mieux rester légèrement sur sa faim en ayant apprécié plutôt que d’en avoir trop et ne plus prendre plaisir à manger et être gavé.

En revanche, le Roc s’étend géographiquement avec trois nouvelles épreuves l’an prochain.
Le Roc des Alpes, c’est du culot, mais ils ont les moyens de le faire. Les propriétaires du Roc auparavant n’auraient pas pu se permettre de faire ce que fait ASO : prendre des risques avec de potentiels échecs, de tester et de perdre. J’ai eu de très bons échos du Roc d’Alpes alors que La Clusaz représentait pour moi un risque. Je pense que d’autres stations en France étaient plus adaptées à accueillir un tel événement pour une seule raison : il est très difficile de sortir de La Clusaz en VTT, car c’est très raide. On ne peut pas dire que le coin soit adapté à un événement de ce style-là. Mais il y a eu un gros investissement d’une équipe-terrain qui a beaucoup travaillé en amont. Ils en ont pris conscience et ont travaillé en conséquence. Je n’étais pas aussi optimiste qu’eux. Car en plus la fenêtre météo est très risquée. Logiquement, ils auront plus d’échecs dans les Alpes que sur le Roc d’Azur de ce point de vue là.

Comment vois-tu le Roc d’Azur évoluer ?
Je pense que l’on est arrivé à saturation, il ne faut pas se leurrer. Le nombre de pratiquants est phénoménal. C’est vrai que lorsque ASO a repris le Roc d’Azur, on s’est posé des questions. En quoi allaient-ils le transformer ? Le virage n’est jamais évident à prendre, car les acteurs qui sont déjà présents avant une reprise ne font pas trop d’efforts pour contribuer. Et puis finalement ils ont très bien réussi le coup, bien négocié le virage. Ils ont réussi à greffer le triathlon l’an dernier et ça s’est très bien inscrit dans le programme. Avant le Roc d’Azur ne se déroulait que le week-end, désormais, c’est du jeudi au dimanche. Ça s’élargit, ça s’étoffe. Le mot Roc dans le milieu a de la valeur.