C’est un véritable monument du vélo tricolore, un passage incontournable de cette rubrique des 101 qui font le cyclisme français. Collectionnant et multipliant les titres, les médailles et les bouquets, il a durablement écrit l’histoire du sport. Légende absolue de sa discipline, il est parvenu par ses incessables exploits à lui apporter une renommée médiatique nationale, dans un pays qui voit surtout la Petite Reine durant la Grande Boucle. Leader hégémonique au milieu des années 2000, il fut l’homme de tous les records, le pilote qui permis au VTT d’entrer dans une autre dimension. En effet, dans le monde olympique français, si le judo a son Teddy Riner et le biathlon son Martin Fourcade, le cross-county eu bien longtemps son Julien Absalon. Portrait.

Son parcours :

Parfois, une vie, un destin, ne tiennent à rien. Une rencontre, un moment, un évènement, c’est tout. En quelques secondes, on peut se voir illuminé d’une lumière inédite, pour trouver soudainement sa voie grâce à l’apparition de cette lueur. Le train de l’existence peut être amené à connaître ce sursaut qui bouleverse l’aiguillage et le mène vers des horizons qui auraient dû rester inexploités. Pour le meilleur et pour le pire. Pour Julien Absalon, une vulgaire balade à vélo en forêt avec un voisin lui fit prendre le chemin des sommets, ceux d’un sport dont il connaissait à peine l’existence à 15 ans, et qu’il marquera pourtant de son empreinte 10 ans plus tard. En une belle journée de l’année 1995, Julien Absalon et le cross-county voyaient leurs routes se croiser, pour ne plus jamais se quitter, et construire même ensemble le parcours d’un crack absolu de la discipline.

En effet, dès cette saison, le vosgien délaisse le judo pour enfourcher une bicyclette. La réussite est immédiate, saisissante, ahurissante. Se découvrant peu un peu un don d’une rareté extrême, le natif de Remiremont escalade l’échelle de la hiérarchie comme il dévale désormais les collines de sa région. En quelques mois, il se retrouve propulsé aux championnats de France cadets, sans même posséder un vélo adapté à un tel niveau de compétition. A cette période, une seconde personne vient catalyser son ascension insatiable : Gérard Brocks, simple conseiller technique du comité de cyclisme de Lorraine, recèle dans le jeune adolescent des capacités hors-normes, ne demandant qu’à être exploitées, et le place sous son aile. Julien Absalon ne la quittera pas jusqu’à la fin de sa carrière.

Surclassant ses concurrents chez les cadets, le vosgien est envoyé chez les juniors, où il ne met que deux saisons à dominer la catégorie et à terrasser ses adversaires. Champion de France, d’Europe et du Monde la même année, il rejoint dès lors le rang des espoirs. Sous les maillots de Scott International puis de Bianchi, il atteint à nouveau les sommets de la compétition au bout de deux ans. Auteur du triptyque championnats de France – championnats d’Europe – championnats du Monde deux ans d’affilée en 2001 et 2002, il accède naturellement à l’élite de la discipline.

Cette fois, le vosgien ne se laisse même pas de temps d’adaptation. Sur la lancée de ses multiples sacres en Espoirs, il domine le classement général de la Coupe du Monde, en remportant notamment la prestigieuse manche du Mont Saint Anne. Champion de France élite devant Miguel Martinez et Jean-Christophe Péraud, il s’empare d’un maillot qu’il accapare jusqu’au terme de son immense carrière, telle une seconde peau.

En 2004, la France entière se découvre un nouveau champion. Celui-ci lève le doigt au ciel sur la dernière ligne droite de l’exigeant parcours des JO d’Athènes, en hommage à un grand supporter et surtout à un père disparu deux ans plus tôt. En se voyant sacré dans la patrie créatrice de l’évènement, Julien Absalon s’inscrivait de ce fait dans la lignée des héros antiques, deux millénaires plus tard. Emerveillé par la dimension prise par sa performance, il se lie d’amour avec l’esprit olympique, qu’il tiendra à embrasser à nouveau quatre ans plus tard à Pékin.

D’une certaine manière, les Jeux Olympiques ont couronné la carrière du vosgien. Ses deux titres ont marqué le début et la fin de son hégémonie. Baptême et funérailles de cette période de grâce, ils ont symbolisé le règne d’un pilote hors-norme sur une discipline dont il avait fait son jardin. Entre eux, le natif de Remiremont a survolé, broyé, réduit à néant toute concurrence. D’Athènes à Pékin, le vosgien a glané pas moins de 3 championnats du monde sur 4, 3 Coupes du Monde sur 5 et 4 titres de champion de France sur 4. Une récolte d’une réussite indécente, qui l’a tout droit propulsé au panthéon de son sport, lui, l’olympien affirmé.

Dans cette parabole qu’est la carrière de Julien Absalon, Pékin a ainsi marqué le début de la chute. Progressivement, les sacres ont été moins fréquents et les performances moins régulières. Les titres ont été remplacés par des podiums, les podiums par des places d’honneur. Si sa souveraineté hexagonale est restée incontestée, sa suprématie mondiale s’est peu à peu érodée. L’avènement du jeune et talentueux Nino Schurter, le prive dès 2009 du championnat du monde, puis en 2010 de la Coupe du Monde. Les destins des deux hommes semblent alors inversés : si le suisse ne cesse son ascension avec l’or à Londres, le français voit lui son déclin s’accentuer.

Les années 2014 à 2016 paraissent alors être celles de la résistance avant l’irrémédiable chute. Après une année 2014 qu’il aura éclaboussé de son talent et de sa force, réussissant alors l’incroyable prouesse de remporter durant la même saison les championnats du Monde, d’Europe, de France ainsi que la Coupe du Monde, Julien Absalon s’érige à nouveau sur les toits du monde et de l’Europe en 2016, marquant là avec fracas les derniers coups d’éclats d’une brillante carrière.Julien Absalon sous la maillot de BMC en 2016Julien Absalon sous la maillot de BMC en 2016

2017 et 2018 marquant la plongée accablante d’un champion empêtré dans ses multiples allergies au pollen, le vosgien met un terme à sa carrière après une anecdotique 85e place en Coupe du Monde. Après avoir débuté par un classement de 63e en 1999 puis raflé à sept reprises le titre de champion du monde, le français symbolise ainsi le retour de la parabole à l’altitude 0. L’incroyable vol de sa carrière vient alors d’atteindre son point de chute.

Son statut aujourd’hui :

Aujourd’hui reconverti dans le VTT à Assistance Electrique, Julien Absalon continue de tutoyer les sommets. Second du championnat de France 2019, troisième des championnats du Monde cette même année, le vosgien n’a pas perdu son âme de compétiteur hors-normes.

En parallèle, il développe sa propre formation de VTT, le Team Absolute Absalon, qui connaîtra en 2020 sa deuxième saison d’existence. Après la cinquième place de Jordan Sarrou au classement général de la dernière Coupe du Monde, le vosgien espère se rapprocher du podium l’année prochaine grâce à l’arrivée de Titouan Carod et du suisse Filippo Colombo dans les rangs élites.Le Team Absolute Absalon en 2019Le Team Absolute Absalon en 2019

Additionnez cela aux attentes placées en sa compagne, la championne du monde Pauline Ferrand-Prevot, pour la saison à venir, et 2020 s’annonce propice à faire briller la famille Absalon au sens large du terme !

Jean-Guillaume Langrognet