C’est la course de toute une vie. La course qui peut illuminer le palmarès de tout vététiste. Plus encore qu’un titre de champion du monde, le sacre olympique représente la victoire ultime et vous fait rentrer dans la cour des plus grands pilotes de tous les temps. Une catégorie dans laquelle Julien Absalon est confortablement installé. Double vainqueur olympique en 2004 et 2008, le français a l’occasion de s’imposer comme le plus grand vététiste de l’histoire pour un bon bout de temps. Le Vosgien domine la discipline depuis 2004 même si cette année il est bousculé par un certain Nino Schurter (Suisse) qui a remporté 4 des 7 manches de la coupe du monde. Aussi, Absalon a été perturbé par une chute, bien que sans gravité, sur le circuit de Val-d’Isère, il y a maintenant 2 semaines. Depuis, il s’est rassuré en remportant le GP Belgacom le week-end dernier. Alors aujourd’hui, quand il s’élance en 1ère ligne à 14h30, c’est pour la gagne, pour cet insensé triplé olympique.

Comme prévu, le départ est ultra-rapide et ultra-impressionnant. C’est un véritable sprint auquel se livrent les 50 participants. Et déjà, Nino Schurter est en tête. Aidé par son équipier chez Scott-Swisspower et compatriote Florian Vogel, il étire le peloton d’une manière considérable. Julien Absalon est dans le coup, vers la 8ème position. Mais après 3 kilomètres seulement, alors que le peloton de tête aborde un talus en pierre, il perd l’équilibre et bascule sur le côté gauche du tracé. La chute est légère et Absalon regagne rapidement ses places perdues. Le problème est plus sérieux quand, tout à coup, le champion français se met à rétrograder dangereusement et à effectuer ses ascensions au ralenti. Au terme du premier tour, il est 27ème à 57 secondes des leaders. Il ne faut pas longtemps pour accepter l’inacceptable, Julien Absalon ne sera pas à nouveau médaillé olympique.

L’idée de ne pas voir le champion de France sur le podium olympique est dure à avaler, mais pire encore est l’image d’un Julien Absalon, sac sur le dos, en train de sortir du circuit. Après tout juste 1 tour et demi de course, Absalon abandonne. Au micro de France Télévision, il explique avoir été victime d’une crevaison, peut-être même une crevaison lente avant le départ de la course. « J’ai dû effectuer une centaine de tours sur ce circuit, et c’est la 1ère fois que je crève. Après avoir fait tant de sacrifices pour ça, c’est dur… » Les lunettes ne peuvent cacher l’immense tristesse et frustration qui submerge le champion. 24 heures après le sacre de Julie Bresset qui s’exprimait au même micro, le contraste est saisissant, et bouleversant. Alors que son transfert vers la BMC Mountain Bike Team vient d’être annoncé, Absalon ne veut pas encore penser à l’avenir : « Je suis juste pressé de rentrer chez moi. »

Marco-Aurélio Fontana s’accroche comme une sangsue à Jaroslav Kulhavy et Nino Schurter.

Pendant ce temps, un trio fait mainmise sur la course. Nino Schurter, Jaroslav Kulhavy (République Tchèque) et Marco-Aurélio Fontana (Italie) font le trou. Il n’est pas étonnant de retrouver ces 3 hommes à l’avant. Schurter est le grand favori du jour, Kulhavy a survolé la saison 2011, et Fontana fait preuve d’une régularité exemplaire cette année. L’italien est toutefois le seul à ne pas prendre de relais en tête de la course. Au 3ème tour, après un petit moment de flottement dans le trio de tête, 2 hommes parviennent à les rejoindre : Burry Stander (Afrique du Sud) et l’inoxydable José Antonio Hermida (Espagne), médaillé d’argent à Athènes. Et 20 secondes derrière, c’est Stéphane Tempier, le 2ème des 3 concurrents français, qui tente de revenir. Malheureusement pour lui, la tête de course ne relâche plus ses efforts. Il y a bien trop de monde pour Nino Schurter et Jaroslav Kulhavy qui décident d’imprimer un tempo d’enfer.

Leurs accélérations sont violentes, Stander et Hermida en sont les victimes. Il y a donc 2 coureurs en moins pour la médaille d’or. En revanche, Marco-Aurélio Fontana ne cède pas le moindre mètre. Mieux, il place même une accélération dans l’avant-dernier tour ! Kulhavy lâche quelques longueurs, et l’on croit le Tchèque perdu pour la gagne. Bien mal nous en a pris, le champion du monde 2011 est loin de s’avouer vaincu. Il recolle en tête de la course et c’est même le seul à tenir la violente attaque de Schurter dans le dernier tour. Le Suisse laisse parler sa force dans la montée en lacets et fait preuve d’une adresse admirable dans le pierrier. Fidèle à son statut de grand favori, il assume le poids de la course. Mais celui qui avouait vendredi dernier ne pas voir « Kulhavy comme l’un des principaux favoris » obtient aujourd’hui un droit de réponse de la part du Tchèque. Kulhavy est bel est bien présent au rendez-vous. Et c’est au sprint que les 2 pilotes d’exception vont se disputer le titre olympique.

La ligne d’arrivée est placée en bas d’une partie descendante. Nino Schurter fait le choix d’aborder en tête le final afin de prendre les meilleures trajectoires possibles. Au dernier virage le suisse est encore en tête, mais le très rapide Kulhavy le déborde dans les derniers mètres pour finalement s’imposer d’une petite longueur d’avance. La joie est immense pour celui qui a connu une année difficile, très en retrait par rapport à son exceptionnelle année 2011. Cruelle sentence en revanche pour Schurter, à qui l’on ne voit pas bien ce que l’on peut lui reprocher tant sa course était maîtrisée. Il est simplement tombé sur un Jaroslav Kulhavy euphorique, en état de grâce.  Il ne faisait pas bon être grandissimes favoris aujourd’hui. Nino Schurter et Julien Absalon en savent quelque chose.

Classement :

1. Jaroslav Kulhavy (TCH) en 1h29’07 »
2. Nino Schurter (SUI) à 1 sec.
3. Marco-Aurélio Fontana (ITA) à 25 sec.
4. José Antonio Hermida (ESP)à 29 sec.
5. Burry Stander (AFS) à 30 sec.
6. Carlos Coloma (ESP) à 1’00 »
7. Manuel Fumic (ALL) à 1’24 »
8. Geoff Kabush (CAN) à 1’36 »
9. Alexander Gehbauer (AUT) à 2’09 »
10. Todd Wells (USA) à 2’21 »

11. Stéphane Tempier (FRA) à 2’23 »