Il y a deux ans, lorsqu’il franchissait la ligne tracée sur le Mall, sous la fenêtre de la reine, Alexandre Vinokourov affichait une réelle rage de vaincre au moment de remporter son titre olympique. Près de 24 mois plus tard, et alors qu’il a troqué sa place sur le vélo pour celle plus confortable dans la voiture, le Kazakh a trouvé son disciple en la personne de Vincenzo Nibali qu’il dirige désormais chez Astana. Le Requin de Messine a fait preuve du même sens de la course pour arracher à Sheffield une première victoire d’étape sur le Tour. En cette fin d’après-midi, le champion italien endosse un deuxième maillot jaune en deux jours, là où son manager se paraissait d’or olympique un jour de juillet 2012, quelques jours avant de se retirer, en haut de l’affiche, après avoir mené à bien une course aux anneaux complètement folle et indécise jusqu’au bout.

Les deux premières étapes auxquelles nous venons d’assister ont, elles aussi, réservé leur lot de surprises et d’émotions, en plus d’éveiller chez les Britanniques une ferveur populaire, rarement vue au cours d’un Grand Départ. Cette dernière étape anglaise quitte les routes vallonnées et piégeuses du Yorkshire pour rejoindre la capitale britannique. Les velléités offensives des favoris du Tour, mais aussi ces petites routes plus ou moins escarpées, sont rangées au placard pour cette étape qui s’avérera presque fade, en tout cas prévisible, bien loin du scénario fou des Jeux Olympiques où les sprinteurs n’avaient pas eu, contre toute attente, leur mot à dire.

Aujourd’hui donc l’appétit des sprinteurs qui ont vu le maillot jaune s’éloigner définitivement hier est encore aiguisé sur cette étape nettement plus plate que celle de samedi. Même si avec la perte de Mark Cavendish (Omega Pharma-Quick Step) et dans une moindre mesure celle de Sacha Modolo (Lampre-Merida), les baroudeurs ont moins de prédateurs, le troupeau d’hommes rapides avides de victoire est encore bien fourni. Quand bien même leurs chances de victoire sont, pour ainsi dire, néantes, le Tchèque Jan Barta (Team NetApp-Endura) et le Breton Jean-Marc Bideau (Bretagne-Séché Environnement) faussent compagnie au peloton avant même le kilomètre zéro. Les deux équipes de 2ème division vont alors faire précisément ce que le Tour attend d’elles : animer les étapes où les sprinteurs partent favoris.

Maillot jaune éphémère, Marcel Kittel impressionne par sa facilité dans l’emballage final

Cette tâche si ingrate soit elle sera accomplie à merveille et sans broncher par ce tandem qui sert d’appât aux sprinteurs en attendant l’explication finale sous la fenêtre de la reine. L’équipe Astana mène le tempo, épaulé par les équipiers de Marcel Kittel (Giant-Shimano) et d’André Greipel (Lotto-Belisol). Sous l’influence des sbires des deux bolides allemands, l’écart entre le peloton et l’échappée ne dépassera pas la barre des quatre minutes. L’entente cordiale entre le Français et le Tchèque résiste pourtant bien dans un premier temps aux assauts des deux formations, même si leur avance diminue constamment jusqu’à l’approche du premier sprint intermédiaire à 47 kilomètres du but, au moment où le Grand Londres se profile déjà au loin. Buckingham Palace n’est alors plus très loin.

Après ce sprint intermédiaire duquel se désintéressent André Greipel et Marcel Kittel, mais qui permet à Peter Sagan (Cannondale) d’empocher encore quelques points, la pluie fait son apparition et l’écart augmente. Car devant, Jan Barta et Jean-Marc Bideau, au courage, n’ont pas rendu les armes et croient encore à la victoire d’étape. Les deux hommes embrayent, appuient un peu plus leurs relais tandis que la route humide pousse les équipes de leaders à pointer le bout du nez en tête de peloton. Les deux hommes seront finalement vaincus par leurs nombreux efforts. Bideau est le premier à céder à 8 kilomètres de l’arrivée. Barta fera un peu de résistance avant de se rendre à l’évidence et de laisser la place aux cadors du sprint qui ont déjà, semble-t-il, trouvé leur maître.

Tout dans le sprint de Marcel Kittel est parfait aujourd’hui. D’abord, le travail de placement de ses équipiers qui font l’effort au bon moment. Un bon roi se doit d’être entouré, et l’Allemand possède en John Degenkolb, un dauphin parfait qui n’hésite pas à se sacrifier corps et âme pour celui qui est son suzerain sur ce Tour de France. Puis il y a ce sprint à proprement parler : troisième à la sortie du dernier virage à 500 mètres de la ligne, Marcel Kittel attend patiemment pour produire son effort. La facilité qu’il dégage est presque embarrassante pour ses concurrents qui ne peuvent lui contester la victoire, pas même Peter Sagan. L’autre Allemand, André Greipel ne rencontrera pas le même succès, peut-être perturbé par la chute qui secoue le peloton à 1,5 kilomètre de la ligne. De toute façon, Kittel aujourd’hui était sur une autre planète.

Demain, la caravane revient en France avec une étape courte entre Le Touquet et Lille (163,5 km).

Classement 3ème étape :

1. Marcel Kittel (ALL, Giant-Shimano) les 155 km en 3h38’30 » (42,6 km/h)
2. Peter Sagan (SVQ, Cannondale) m.t.
3. Mark Renshaw (AUS, Omega Pharma-Quick Step) m.t.
4. Bryan Coquard (FRA, Team Europcar) m.t.
5. Alexander Kristoff (NOR, Team Katusha) m.t.
6. Danny Van Poppel (PBS, Trek Factory Racing) m.t.
7. Heinrich Haussler (AUS, IAM Cycling) m.t.
8. José-Joaquin Rojas (ESP, Movistar Team) m.t.
9. Romain Feillu (FRA, Bretagne-Séché Environnement) m.t.
10. Daniel Oss (ITA, BMC Racing Team) m.t.

Classement général :

1. Vincenzo Nibali (ITA, Astana) en 13h31’13 »
2. Peter Sagan (SVQ, Cannondale) à 2 sec.
3. Michael Albasini (SUI, Orica-GreenEdge) m.t.
4. Greg Van Avermaet (BEL, BMC Racing Team) m.t.
5. Christopher Froome (GBR, Team Sky) m.t.
6. Bauke Mollema (PBS, Belkin) m.t.
7. Alberto Contador (ESP, Tinkoff-Saxo) m.t.
8. Alejandro Valverde (ESP, Movistar Team)
9. Jurgen Van Den Broeck (BEL, Lotto-Belisol) m.t.
10. Romain Bardet (FRA, Ag2r La Mondiale) m.t.

Classement par points :

1. Peter Sagan (SVQ, Cannondale) 117 pt
2. Marcel Kittel (ALL, Giant-Shimano) 90 pt
3. Bryan Coquard (FRA, Team Europcar) 88 pt
4. Alexander Kristoff (NOR, Team Katusha) 47 pt
5. Greg Van Avermaet (BEL, BMC Racing Team) 40 pt
6. Ramunas Navardauskas (LIT, Garmin-Sharp) 38 pt
7. Vincenzo Nibali (ITA, Astana) 30 pt
8. José-Joaquin Rojas (ESP, Movistar Team) 30 pt
9. Mark Renshaw (AUS, Omega Pharma-Quick Step) 30 pt
10. Michael Albasini (SUI, Orica-GreenEdge) 27 pt

Classement de la montagne :

1. Cyril Lemoine (FRA, Cofidis) 6 pt
2. Blel Kadri (FRA, Ag2r La Mondiale) 5 pt
3. Jens Voigt (ALL, Trek Factory Racing) 4 pt
4. Nicolas Edet (FRA, Cofidis) 4 pt
5. Pierre Rolland (FRA, Team Europcar) 2 pt
6. Tom-Jelte Slagter (PBS, Garmin-Sharp) 2 pt
7. Perrig Quemeneur (FRA, Team Europcar) 2 pt
8. Thomas Voeckler (FRA, Team Europcar) 2 pt
9. David De La Cruz (Spa, Team NetApp-Endura) 2 pt
10. Christopher Froome (GBR, Team Sky) 1 pt

Classement des jeunes :

1. Peter Sagan (SVQ, Cannondale) en 13h31’15 »
2. Romain Bardet (FRA, Ag2r La Mondiale) m.t.
3. Michal Kwiatkowski (POL, Omega Pharma-Quick Step) m.t.
4. Thibaut Pinot (FRA, FDJ.fr) à 14 sec.
5. Tom Dumoulin (PBS, Giant-Shimano) m.t.
6. Rudy Molard (FRA, Cofidis) à 33 sec.
7. Sébastien Reichenbach (SUI, IAM Cycling) à 1’19 »
8. Anthony Delaplace (FRA, Bretagne-Séché Environnement) à 1’43 »
9. Jesus Herrada (ESP, Movistar Team) m.t.
10. Tom-Jelte Slagter (PBS, Garmin-Sharp) à 2’48 »

Classement de la combativité :

1. Jan Barta (TCH, Team NetApp-Endura)

Classement par équipes :

1. Team Sky (GBR) en 40h33’45 »
2. Astana (KAZ) à 12 sec.
3. BMC Racing Team (SUI) à 14 sec.
4. Team NetApp-Endura (ALL) à 47 sec.
5. Trek Factory Racing (USA) m.t.
6. IAM Cycling (SUI) à 1’01 »
7. Team Katusha (RUS) à 1’20 »
8. Belkin (PBS) à 1’31 »
9. Lampre-Merida (ITA) m.t.
10. Cannondale (ITA) à 1’42 »